Jean-Louis Chambon, président fondateur du
Cercle Turgot, assisté du gouverneur Jean-Claude Trichet, président du grand
jury, orchestrait la cérémonie de la 31e édition du Prix Turgot qui s’est tenue
le 4 avril 2018 au Ministère de l’Économie et des Finances Ensemble, ils ont introduit les auteurs et les
livres distingués par le jury composé de vingt membres rompus à la finance et à
l’économie.
Jean-Louis Chambon a rappelé toute la valeur de la pensée de Turgot.
Premier concepteur d’une politique de redressement des finances publiques, il
préconisait dans une lettre au roi, devenue une référence, cette règle
d’or : « pas d’impôt nouveau, point d’emprunt » et « je
sais mieux que quiconque qu’il ne faut pas toujours faire le mieux qu’il est
possible, mais corriger peu à peu les défauts d’une Constitution
ancienne ». Au-delà d’un principe, Turgot élevait la réduction des
dépenses publiques au rang de discipline, destinée à rappeler en permanence que
les ressources de l’État ne sont pas sans limites. Cette feuille de route
idéale reste valable aujourd’hui. Les contribuables espèrent voir enfin
approcher l’efficacité de la dépense publique.
Jean-Louis
Chambon
Les nominés
• Fabrice Houzé, La
Facture des idées reçues – Odile
Jacob ;
Fabrice Houzé est trader. Son métier l’oblige à s’intéresser à
tout et l’a poussé à écrire. Technologie, politique, scandale, tout affecte les
prix. La perte inéluctable d’argent, dans son activité, fait prendre conscience
que modèles et prévisions sont faux, qu’on peut se tromper. C’est une façon
d’apprendre à remettre en question ses idées dans un milieu qui partage des
émotions collectives au gré des fluctuations des marchés. Se montrer totalement
objectif semble difficile, néanmoins, on peut essayer de s’en donner les moyens.
• Vivien Levy-Garboua, Le
Monde à taux zéro : voyage au bout de l’économie – PUF ;
La remontée des taux se généralise, mais elle atteindra une limite et
les taux réels resteront plafonnés partout où les États sont endettés. La
reprise de l’emploi va s’accompagner d’un accroissement de l’inflation. À
partir du moment où la hausse nominale des taux d’intérêt s’enclenche, les business
models des banques et des compagnies d’assurances vont s’inverser. Pour
éviter la déflation, les banques centrales ont accepté le risque d’alimenter
les bulles financières par des liquidités abondantes. La mission des
régulateurs va se complexifier dans un univers de taux d’intérêt restés faibles
et de marchés puissants.
• François Meunier, Comprendre
et évaluer les entreprises du numérique –
Eyrolles ;
Les rendements d’échelle donnent des avantages considérables aux
leaders du Web en position monopolistique qui disposent des ressources
financières suffisantes pour acquérir toute nouvelle activité concurrente ou
différente. Les autorités de régulation se sont tenues en retrait pendant un
temps face à des puissances considérées comme bienveillantes, puis la
protection des données personnelles a été portée à l’ordre du jour. Nous
constatons une folle volatilité sur les marchés, et un événement d’ampleur peut
tout souffler.
• François-Xavier Oliveau, Microcapitalisme – PUF ;
Chacun a la possibilité d’utiliser son microcapital pour produire de la
valeur (Blablacar, Airbnb…). Sans véritable révolution, le paradigme bouleverse
le capitalisme traditionnel. Il donne l’opportunité de participer à l’économie
sans accumulation de capital. Un individu seul, avec un compte de résultat
simplissime, devient concurrentiel pour une compagnie nationale. L’avantage qui
était lié à une surface financière puissante disparaît face à un acteur
indépendant. Un pacte social révisé permettrait de construire autour de ce
microcapitalisme un environnement réducteur des inégalités. Le système social
français est catégoriel, or l’engagement de solidarité de la nation ne devrait
pas être attaché au statut, mais à la personne. De plus, la fiscalité n’est pas
prête, il faut également la revoir.
• Denis
Pennel, Travail, la soif de liberté – Eyrolles.
Malgré les discours qui pronostiquent depuis plus de quinze ans le
remplacement de l’humain par la technologie, il n’y a jamais eu autant de
personnes au travail sur la planète qu’aujourd’hui. D’ailleurs les pays qui
achètent le plus de robots industriels arborent les taux de chômage les plus
bas (Chine, États-Unis, Japon, Allemagne). Les machines ne nuisent pas, elles
améliorent le contexte pour l’homme. En un siècle, la démocratisation s’est
étendue, mais curieusement, il semble qu’elle peine à franchir les portes de
l’entreprise. Le management reste autoritaire et hiérarchique. Le salariat
fonctionne dans une relation de subordination qui ne favorise pas, a priori,
l’épanouissement de tous les protagonistes. Cessons de marier travail et
emploi.
Palmarès
• Prix du
jeune talent : Valérie Palma-Amalric : L’Autonomie financière
des autorités indépendantes – L’Harmattan ;
• Prix des
ouvrages collectifs : Ezra Suleiman – Frank Bournois – Yasmina
Jaïdi : La Prouesse française : le management du CAC 40 vu d’ailleurs – Odile Jacob ;
• Prix des
directeurs financiers DFCG : Fabrice Houzé : La Facture des idées
reçues – Odile Jacob ;
• Prix de la
pédagogie économique : Revue Banque pour l’ensemble de ses
parutions et sa collection Repère.
• Prix
de la francophonie ffa Turgot :
- Prix collectif :
S/Dr Laurent Manderieux – Michele Vellano : Éthique globale, bonne
gouvernance et droit international économique, Giappichelli Editore ;
- Prix individuel :
Abdelmalek Alaoui : Le Temps du continent – chroniques africaines
2016-2017 – Descartes&Cie.
• Trois mentions
d’honneur :
- Fabrice Houzé : La Facture des idées reçues
–
Odile Jacob ;
- François Meunier : Comprendre et évaluer les
entreprises numériques – Eyrolles ;
- Denis Pennel : Travail, la soif de liberté
– Eyrolles.
• Prix
spécial du jury : François-Xavier Oliveau :
Le Microcapitalisme – Puf.
• Prix
Turgot : Vivien Levy-Garboua : Le Monde à taux zéro – voyage au bout de
l’économie – Puf.
• Grand prix
d’honneur pour l’ensemble d’une œuvre : pour l’ensemble de son œuvre (et son dernier ouvrage Les
Lames de fond se rapprochent chez Odile Jacob) : gouverneur Jacques de
Larosière.
C2M