ACTUALITÉ

Club de l’Audace - « La priorité pour BPCE : investir sur les plateformes digitales, afin d’en faire les meilleures du marché »

Club de l’Audace - « La priorité pour BPCE : investir sur les plateformes digitales, afin d’en faire les meilleures du marché »
Publié le 23/03/2018 à 10:36

François Pérol était l’invité du Club de l’Audace le 8 février dernier, dans les locaux de BDO. Le président du directoire de BPCE (Banque populaire-Caisse d’épargne) est intervenu sur la transformation digitale des activités bancaires et d’assurances. Pour s’adapter, le groupe a dû repenser ces métiers en investissant massivement dans les outils technologiques et la formation.




Successivement inspecteur général des Finances, banquier d’affaires ou encore secrétaire général adjoint de la présidence de la République sous Nicolas Sarkozy, quand François Pérol parle de « révolution industrielle et technologique », il semble plutôt sûr de lui. « L’arrivée concomitante à maturité de plusieurs technologies est en train de bouleverser le fonctionnement de l’économie et de la société, et nous devons comprendre ce processus pour l’appréhender correctement », a notamment argué l’actuel président du directoire du groupe bancaire BPCE, lors de son intervention au Club de l’Audace, le 8 février dernier. Une révolution qui, selon lui, bouleverse en profondeur l’économie, mais davantage encore nos modes de vie, notre façon de consommer, nos relations de travail. François Pérol est même allé jusqu’à qualifier ce changement de « séculaire », « aussi important que la machine à vapeur en son temps, que l’électricité en un autre temps, et que les ordinateurs il y a quelques années ». « Nous vivons une période extraordinaire, au sens où la banque et l’assurance sont en train d’être réinventées de fond en comble ; c’est probablement ce qui nous arrive de plus important, s’est-il réjoui. Évidemment, l’évolution du taux d’intérêt est très importante, la réglementation aussi, mais tout cela est beaucoup moins primordial que l’impact des technologies sur nos métiers et sur nos salariés ». Et le président du directoire de BPCE est bien placé pour le savoir, puisque toutes les activités de son groupe, des banques de proximité à la banque de grande clientèle en passant par la gestion d’actifs ou encore l’assurance, sont concernées. La transformation des véhicules en capteurs et collecteurs de données a, par exemple, toutes les chances de métamorphoser les métiers de l’assurance automobile. Sauf qu’aujourd’hui, les constructeurs sont devenus avant tout producteurs de logiciels : « Ils peuvent donc décider plus facilement à l’avenir de devenir leur propre assureur : nous qui le sommes aussi, nous devons nous interroger sur la façon dont nous allons exercer notre métier, tout en faisant face à cette nouvelle concurrence », a indiqué François Pérol.


 


Des algorithmes pour conseiller


Chez BPCE, toutes les branches sont ainsi en train d’être repensées. Dans le domaine de la gestion d’actifs, le groupe développe actuellement des algorithmes pouvant réaliser des schémas d’allocations simples ou sophistiqués d’épargne, « plus fiables, plus évolutifs, plus solides que ne peuvent le faire des personnes physiques », a souligné le président du directoire. « Ces programmes ne remplaceront pas le jugement humain, ni la relation humaine, mais ils pourront traiter et produire des diagnostics fondés sur de plus grandes quantités de données ». D’ailleurs, les sociétés proposant ce type de services se déploient sur le marché, donnant à croire que la démocratisation du « robot advisory » est pour très bientôt, a estimé François Pérol. Et dans la banque de marché, métier où la technologie est déjà très présente, le développement du trading risque de remplacer le besoin des traders eux-mêmes. Même la banque de proximité nécessite de moins en moins d’intermédiaires, puisqu’aujourd’hui nous sommes capables de réaliser la totalité de nos opérations bancaires courantes en totale autonomie, sans avoir à nous déplacer.


 


« Nous devons agir en industriels »


François Pérol ne s’en est toutefois pas caché : réinventer n’est pas sans difficultés. Dans le secteur de la banque de proximité, la priorité pour BPCE est d’investir sur les plateformes digitales, afin d’en faire les meilleures du marché. Ainsi, alors que 2,4 milliards d’euros sont investis chaque année dans leur système d’information, 50 % sont consacrés au fonctionnement, dont la moitié au digital. « Nous devons investir dans des domaines, dans des compétences, dans des outils, avec des hommes et des techniques, d’une manière que nous sommes en train de nous approprier, a martelé François Pérol. Nous devons agir en industriels, c’est-à-dire réfléchir à des plateformes capables de traiter de façon aussi performante que possible des millions, des milliards d’opérations ». Reste que les investissements de BPCE dans le digital n’ont qu’une portée limitée pour l’instant. « Ce que le digital génère comme revenus, c’est, en banque de proximité, moins de 0,5 % de la totalité de nos revenus, générés très majoritairement encore actuellement par nos conseillers et la “banque traditionnelle” », a-t-il admis. Mais le groupe préfère miser sur les années à venir. François Pérol a ainsi prédit que le crédit immobilier serait bientôt un produit dont le coût de revient sera moins élevé qu’il ne l’est actuellement, car les offres auront été simplifiées, les processus auront été automatisés et feront intervenir moins de personnes, et les technologies auront changé la façon de produire. Ces crédits seront aussi distribués de façon différente. « Vous aurez, d’ici quelques années, accès à des crédits immobiliers sur votre mobile, votre tablette, chez vous. Pour discuter d’une opération plus complexe, vous aurez toujours besoin d’en référer à un conseiller, mais pour les opérations simples, ce sera possible », a-t-il auguré, renvoyant au crédit à la consommation, pour lequel nous pouvons déjà souscrire des crédits sans avoir à se déplacer. Un système qui, lui aussi, sera amené à évoluer incessamment : « si aujourd’hui cela est possible pour les clients d’une banque, demain ce sera possible sans que vous soyez clients ».


 


Transformer la façon de travailler au sein de l’entreprise


Pour rester performante, l’entreprise mise aussi sur ses quelque 100 000 salariés. Ses réseaux Banque Populaire et Caisse d’Épargne comptent à eux seuls 65 000 salariés, tout aussi bien ingénieurs financiers, conseillers clientèle, spécialistes agricoles, spécialistes des marchés d’entreprises, et dont le groupe veut améliorer les compétences. La solution : investir massivement (aussi) dans la formation. « Nous construisons des équipes de spécialistes de marketing digital, de design digital, de spécialistes de la donnée, de manière à transformer notre système de production et d’information », a indiqué François Pérol. « Nous devons également faire en sorte que les conseillers clientèle deviennent des experts, et que nous n’ayons plus de conseillers dévolus à l’accueil », a-t-il ajouté.


Par ailleurs, le président du directoire de BPCE s’est confié sur le processus de réaménagement de l’entreprise, afin de transformer la façon d’y travailler : « Les agences seront de plus en plus de mini-plateaux téléphoniques, des espaces collaboratifs, des lieux pour accueillir le client mais plus des lieux de trafic ». Une transformation que le président du directoire a qualifiée de « progressive », et qu’il n’envisage qu’à l’échelle globale de l’entreprise : « Nous réussirons si nous sommes capables de faire participer l’ensemble des salariés à cette transformation, de dissiper leurs inquiétudes, de les rassurer. Nous essayons de leur faire comprendre que l’évolution est nécessaire, que c’est une période d’opportunité : nous sommes en train d’inventer de nouveaux services, de nouvelles offres : il faut qu’ils s’en saisissent ! » D’autant que les clients doivent rester demandeurs du conseil bancaire, alors qu’ils sont par ailleurs de plus en plus avertis. Des clients « moteurs » de cette révolution, a jugé François Pérol, qui a reconnu que l’avènement du digital avait eu pour effet de redonner du pouvoir aux clients. « Dans nos métiers qui sont des métiers de relations, de service, cela a une importance fondamentale. Les banques se sont fort heureusement réintéressées à leurs clients, qu’elles avaient un peu oubliés jusqu’au début des années 2000 », a-t-il déploré. Mais si elles sont désormais plus proches de leurs clients, les banques doivent encore se donner de la visibilité, afin d’être identifiées comme des acteurs majeurs du numérique bancaire – ce qui n’est pas encore le cas, a reconnu François Pérol. « On a beau avoir une bonne stratégie et une bonne vision, ce qui compte c’est d’être capables de la délivrer ».


 


Bérengère Margaritelli


 


 


0 commentaire
Poster

Nos derniers articles