DROIT

Comment Éric Dupond-Moretti veut « simplifier » le recrutement des magistrats

Comment Éric Dupond-Moretti veut « simplifier » le recrutement des magistrats
Éric Dupond-Moretti lors de la présentation du plan issu des États généraux, le 5 janvier 2023 ©JSS
Publié le 25/05/2023 à 15:01

Entendu mardi par la commission des lois du Sénat sur son plan d’action pour une justice plus rapide et plus efficace, le garde des Sceaux a appelé à ouvrir et professionnaliser le recrutement des magistrats, à mettre en place des priorités d’affectation et à instaurer un troisième grade. En sus, le ministre estime que la modernisation de la magistrature passe par la restructuration du Code de procédure pénale, qui doit être « plus lisible ».

Dans la continuité des États généraux de la justice et à la suite du Conseil des ministres du 3 mai dernier, le ministre de la Justice et garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti s’est rendu au Sénat ce 23 mai, afin de faire part à la commission des Lois des propositions de textes et préconisations en faveur de son plan d’action présenté le 5 janvier 2023.

Si le ministre a rappelé les moyens engagés dans le cadre du projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de la Justice 2023-2027, avec une hausse « historique » des moyens alloués à la justice et la volonté de simplifier la procédure pénale de la justice commerciale, il a également évoqué les actions à mener dans le cadre du projet de loi organique relatif à l’ouverture, la modernisation et la responsabilité du corps judiciaire, projet qui vient compléter la loi de programmation.

Faciliter l’accès au recrutement des magistrats pour atteindre les 1 500 annoncés

Le plan d’action présenté en début d’année rend compte de la volonté de moderniser les ressources humaines, autrement dit de réformer le statut de la magistrature, un « chantier majeur » porté par le projet de loi organique, explique le ministre de la Justice, qu’il qualifie également de « plus grande réforme de l’ordonnance statutaire depuis plus de 20 ans ». Une réforme qui n’est toutefois pas au goût du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), comme le souligne un article paru dans les Echos le 28 avril dernier.

Le garde des Sceaux l’a redit, il faut embaucher plus. Mais pour atteindre les 1 500 magistrats annoncés en début d’année, il faut selon lui faciliter l’accès à la magistrature. Il a ainsi proposé à ce titre une ouverture des recrutements qui simplifierait les différentes voies d’accès, pour les avocats notamment, mais aussi de professionnaliser le recrutement par l’instauration d’un jury de professionnels. « Le maintien du principe du concours républicain nous garantira l’excellence du niveau de recrutement », a tenu à rassurer le ministre, qui préconise par ailleurs la création de postes de magistrats en service extraordinaire.

Éric Dupond-Moretti a également réclamé devant la commission des Lois une simplification des voies d’accès à la magistrature en interne, notamment pour les personnes ayant une expérience professionnelle antérieure qui voudraient se reconvertir (comme, par exemple, des avocats désireux de devenir juges).

Mais recruter des magistrats est une chose, les garder en fonction en est une autre. Pour cela, le ministre a défendu un assouplissement des règles ayant trait aux ressources humaines à titre temporaire, ainsi qu’une simplification des règles de GRH en pérennisant les brigades de soutien de magistrats et de greffiers, et en mettant en place des priorités d’affectation des magistrats qui ont accepté de partir dans des territoires peu attractifs. Il s’est également prononcé pour la création d’un troisième grade pour garder des magistrats d’expérience en première instance afin de l’améliorer, conformément au rapport Sauvé.

Décomplexifier certaines procédures

Moderniser la magistrature passe par une refonte des textes. C’est en tout cas ce que pense le ministre, qui a estimé que pour se doter d’une justice « plus rapide et plus efficace », il faut simplifier un certain nombre de procédures, civiles comme pénales, qui selon lui sont « un facteur de complexité pour les non professionnels et d’éloignement entre le citoyen et notre justice ».

Le troisième chantier de réforme porte ainsi sur la restructuration du Code de procédure pénale, afin de le rendre plus lisible pour les professionnels, en réécrivant notamment des articles rédigés par des renvois successifs à d’autres articles, et ce afin d’éviter des erreurs procédurales. Et pour garantir qu’elle se fera bien à droit constant, un groupe de liaison avec l’ensemble des groupes parlementaires et les deux présidents des commissions des Lois de l’Assemblée nationale et du Sénat a été mis en place.

En matière civile, le ministre aspire à une réforme de niveau réglementaire et entend ainsi simplifier la procédure d’appel en réformant le décret Magendie. Mais Éric Dupond-Moretti souhaite surtout une révolution de l’amiable, « qui se fait tant attendre », et a indiqué qu’il comptait faire parvenir au Parlement dans le courant de la semaine les projets de décrets relatifs à la mise en place de la césure et de l’audience de règlement amiables.

En outre, parmi la série de mesures proposées, le ministre a mentionné celle relative à la dématérialisation des déclarations de créances dans le cas de procédure collective. Il entend mettre en place une nouvelle plateforme qui permettra un « suivi complet de la procédure », et avec un coût « extrêmement réduit pour le justiciable », a-t-il précisé. De plus, cette plateforme accompagnera la nouvelle profession de commissaire de justice de par sa prise en charge, sous contrôle d’un juge, des saisies de rémunération, qui de surcroit allégera le travail des greffiers.

Le ministre a par ailleurs évoqué l’accompagnement des autres professions règlementées du droit dans leur modernisation, avec notamment une réforme de la profession d’avocat, et le rétablissement de la base légale permettant aux greffiers des tribunaux de commerce de percevoir des honoraires libres, supprimée par erreur en 2016.

Allison Vaslin

 

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