Face au
besoin stratégique de performance contractuelle, les directions juridiques de
quatre grands groupes français, Thalès, Areva, DCNS, Engie, ont créé
l’Association française du contract management (AFCM) il y a trois ans. Si le
contract management fait son chemin au sein des entreprises, il est essentiel
pour l’AFCM de le promouvoir au sein des entreprises françaises.
Rencontre
avec Coralie Bouscasse, son président, qui décrypte avec nous les enjeux de cette
nouvelle fonction – dont le rôle est de gérer les relations contractuelles
entre l’entreprise et ses clients – qui tend à s’élargir de plus en plus.
Quelle est la plus-value
d’un contract manager dans l’anticipation et la maîtrise des risques
contractuels par rapport aux juristes d’entreprise ?
La plus-value du contract manager réside dans
le fait que l’on va lui demander d’intégrer à la fois la dimension
opérationnelle et la dimension contractuelle du projet. Le juriste quant à lui
va être associé à la rédaction de l’offre mais sauf exception, il n’aura pas
une vision extrêmement précise sur la construction du prix ni sur les
problématiques opérationnelles qu’il conviendra de surmonter. Le contract
manager aura une approche plus large et globale qui englobera à la fois
l’aspect opérationnel et le volet contractuel du projet.
Qu’est-ce qui, chez un contract manager, garantit sa
compréhension des enjeux globaux d’un projet ?
Ce qui
garantit la compréhension des enjeux globaux du projet et par conséquent sa
parfaite efficacité, c’est sa participation le plus en amont possible du
projet. Comme disent les Anglais : « from the cradle to the
grave », du berceau à la tombe !
Sur toutes
les phases du projet à mener, le contract manager doit être présent.
Chacune d’entre elles est intimement liée à l’autre et sont de facto
interdépendantes les unes aux autres. La qualité de la rédaction de l’offre va
dépendre de la perception de la capacité technique de l’entreprise à répondre à
l’expression des besoins du client. En d’autres termes, la rédaction du contrat
va dépendre du résultat de la négociation de l’offre alors que les positions du
contract management élaborées et tenues dans le cadre du contrat vont
dépendre de l’exécution du contrat.
De quelles ressources dispose-t-il
concrètement pour maîtriser les risques inhérents à l’ensemble contractuel dont
il a la charge ?
Il va lui
falloir des moyens financiers et humains. Les moyens financiers représentent le
budget qui est alloué au contract manager pour mener à bien sa mission, ce
budget lui permettra de constituer son équipe, elle-même dimensionnée par la
taille et la complexité du projet auquel il est affecté. Le contract manager devra s’entourer de « quantity surveyor », de « quality surveyor », de superviseurs, d’ « asset contract manager », etc. Les profils seront variables selon
les secteurs d’activités.
Les outils du contract manager ont-ils évolué, par exemple
se tourne t-il plus qu’avant vers les modes alternatifs de règlement des
différends ?
Il faut
lutter contre une idée fausse qui est de croire que le contract manager
est là pour faire des réclamations ou claims. Il est avant tout là pour
faire respecter l’équilibre du contrat, ou en d’autres termes les droits et
obligations de chacune des parties et c’est là sa mission première, et ce quel
que soit le contrat. Pour le vendeur, il est le gardien de la marge !
Celle qui était décidée au moment
de la signature du contrat. Selon les circonstances dans lesquelles se
déroulera le projet, le contract manager sera un vecteur important de
l’amélioration de cette marge. Employé par le client, le contract manager
participera à la sécurisation du déroulement du projet dans le respect du
calendrier et du budget définis au début du projet.
La
survenance du contentieux peut être assimilée à l’échec ou à l’incapacité des parties à
comprendre et à gérer dans leur intérêt commun une situation à laquelle ils
font face.
Pour être
efficace, le contract manager doit être capable de se situer au
carrefour des acteurs du projet : client, le(s) fournisseur(s)
mais également les équipes internes qui l’informent des avancées et difficultés
rencontrées. Il a le devoir d’informer les parties prenantes de l’écart
constaté et doit être capable de proposer des mesures à prendre pour y remédier
afin de préserver l’équilibre contractuel agréé par les parties à la date de
signature du contrat.
Que nous disent les
évolutions de la fonction du contract manager sur l’environnement
juridique des entreprises ?
Ces évolutions indiquent et traduisent que le
rapport de force qui s’établissait entre les parties principalement lors de la
phase de négociation du contrat s’est déplacé et s’étend dorénavant lors de la
phase d’exécution. (…)
Propos recueillis par Cécile Leseur
Retrouvez la suite de cet article dans le Journal Spécial des Sociétés
n°21 du 15 mars 2017
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