Depuis quelques
mois, les commissaires aux comptes sont très inquiets. Un an et demi après l’entrée
en vigueur de la réforme européenne de l’audit, et pour se mettre en conformité
avec celle-ci, le gouvernement français a décidé de revoir le cadre des obligations
de contrôle en France, lequel est beaucoup plus strict dans l’Hexagone que dans
les autres nations européennes. En novembre dernier, Nicole Belloubet, ministre
de la Justice, et Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et des Finances, ont
donc lancé une mission auprès de l’Inspection générale des finances (IGF) afin
d’évaluer l’opportunité de relever les seuils d’audit légal dans les PME. Une perspective
que redoutent les commissaires aux comptes, car cette dernière pourrait leur
faire perdre près de 150 000 mandats, et un chiffre d’affaires compris entre
800 et 900 millions d’euros. « Jamais la menace sur nos
mandats PME n’a été aussi forte », a rappelé Jean-Luc Flabeau, le
président du syndicat professionnel Experts-Comptables et Commissaires aux comptes
de France (ECF), lors du Forum CAC 2018 organisé le 6 février 2018 au centre d’affaires
Paris Trocadéro. Dans une ambiance tendue, les débats de ce jour se sont
focalisés sur cette question sensible des seuils.
La présence des CAC est-elle toujours nécessaire
dans les petites entreprises ? S’agit-il d’une charge ou d’un atout pour ces
dernières ? Autrement dit, quel avenir pour le commissariat aux comptes dans
les PME ? Pour Jean-Luc Flabeau, loin de s’avouer vaincu, la place de l’auditeur
légal dans les PME doit être « vigoureusement défendue », car sa mission
participe de l’intérêt général : lutte contre la fraude, révélation des faits délictueux,
pérennité des entreprises, etc. Par conséquent, plutôt que de relever les
seuils, il faudrait, au contraire, selon ce dernier, les abaisser afin d’élargir
le champ d’intervention des CAC. Il convient cependant, a-t-il reconnu, de
revoir les méthodologies d’audit,- qui souffrent actuellement d’un « excès de
formalisme », et d’adapter les procédures de contrôle à la taille des entités auditées.
À l’occasion du Forum, l’ECF a donc remis ses « Propositions pour
un audit adapté dans les petites entreprises » aux représentants des
pouvoirs publics, avec l’espoir que le gouvernement renonce à ses projets. La réponse
dans quelques jours, puisque les conclusions du rapport de l’IGF sont attendues
fin février.
Maria-Angélica Bailly