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Inauguration du tribunal de Paris - Le plus grand centre judiciaire d’Europe

Inauguration du tribunal de Paris - Le plus grand centre judiciaire d’Europe
Publié le 19/04/2018 à 11:36

Jugé froid et impersonnel par les uns, fonctionnel et indispensable par les autres, le nouveau tribunal de Paris a été inauguré le 16 avril dernier avec les deux premières audiences au tribunal civil. Se voulant le symbole d’une justice moderne – celle du XXIe siècle – le colosse de verre situé dans le 17e arrondissement, dans le quartier des Batignolles, crée déjà la polémique.


Alors qu’à Paris, cela faisait plusieurs siècles que le Palais de justice était installé au cœur de la capitale, il quitte désormais l’île de la Cité et ses murs historiques pour centraliser ses services non loin du périphérique, dans le 17e arrondissement, au Nord-Ouest de la ville. « Répartie sur plus de vingt-cinq sites, la juridiction parisienne n’était plus en mesure de relever les défis de la justice du XXIe siècle. » ont conjointement déclaré François Molins et Jean-Michel Hayat, respectivement procureur de la République et président du TGI. « Le regroupement de tous les services devenait indispensable tant pour garantir un accueil de qualité aux justiciables que pour améliorer les conditions d’exercice de la justice » ont-ils poursuivi.


Perçu pour le ministère de la Justice comme la « réponse adaptée à la saturation du Palais de justice historique », ce tribunal se révèle comme « une référence majeure des transformations attendues en matière d’accueil des justiciables et de fonctionnement des juridictions pour un service public de la justice simplifié et plus efficace ».


Aussi, le 16 avril dernier, se sont tenues les deux premières audiences du tribunal civil, dans ce bâtiment de verre imaginé par Renzo Piano – à qui l’on doit notamment, avec Richard Roger, la réalisation du musée Beaubourg – faisant de cette bâtisse de 160 mètres le deuxième bâtiment le plus haut de la capitale, derrière la tour Montparnasse (210 mètres).

 


Quelles juridictions aux Batignolles ?


Le nouveau bâtiment situé porte de Clichy rassemble de nombreuses juridictions : le Parquet national financier, le tribunal de grande instance de Paris, le tribunal des affaires de Sécurité sociale, le tribunal de police. Il fusionne également les vingt tribunaux d’instance en une juridiction unique compétente sur les vingt arrondissements de Paris, pour former au total le plus grand centre judiciaire d’Europe. La cour d’appel et la Cour de cassation demeurent, quant à elles, sur l’île de la Cité.





Crédit : © Jean-Baptiste Gurliat/Mairie de Paris

 



Un partenariat public/privé



Avec la signature du contrat de Partenariat et la présentation du projet, le 15 février 2012 marque le lancement du futur tribunal de Paris. Arélia, société constituée spécifiquement pour la réalisation du tribunal, a pour actionnaires notamment les sociééts Bouygues Bâtiment Île-de-France et Bouygues E´nergie Services.


Malgré la suppression des partenariats public/privé jugés trop coûteux par la garde des Sceaux, celui-ci devrait pourtant s’étendre jusqu’en 2044, puisque le contrat de partenariat portait sur la conception, la construction, le financement, l’entretien et la maintenance du futur tribunal durant 27 ans.


« Le nouveau palais de justice va servir à être le lieu qui permettra de rendre une justice apaisée. » déclarait Nicole Belloubet le 16 avril dernier sur France Culture. L’apaisement n’est toutefois pas au rendez-vous chez les avocats qui s’insurgent contre les box vitrés présents dans le tribunal correctionnel.

 


Les « cages de verre » font polémique


Dans une lettre datée du 13avril adressée à la ministre de la Justice, le Conseil national des barreaux (CNB) conteste en effet la présence des cages de verre dans les salles d’audience correctionnelles du nouveau tribunal. « Sous couvert d’une prétendue sécurité, il s’agit en réalité d’économiser des escortes policières » assure le barreau de Paris qui a lui aussi fait part de sa consternation. « Nous ne ferons pas l’économie de la dignité des justiciables qui doivent pouvoir librement communiquer avec leur avocat » poursuit-il en assurant avoir déjà alerté le Défenseur des droits à ce sujet, qui « recommande de renoncer à la comparution systématique et généralisée dans des box sécurisés des personnes prévenues ou accusées lorsqu’elles sont détenues ».


En effet, « ce nouveau symbole national de la justice du XXIe siècle voulu par les pouvoirs publics, ne peut pas imposer aux justiciables et aux avocats des salles d’audience équipées de "cages de verre" » affirme le CNB. Jugeant ces box isolants et stigmatisants pour le prévenu alors éloigné de son avocat, l’instance représentative des avocats y voit une « atteinte intolérable à la présomption d’innocence et aux droits de la défense », tout comme la Conférences des bâtonniers, l’ordre des avocats de Paris et les syndicats de la profession.


Dans un communiqué du 19?mars dernier, l’ADAP (Association des avocats pénalistes) s’insurgeait déjà contre les box du tribunal de Fort-de-France et demandait « solennellement à la garde des Sceaux d’ordonner sans délai le démontage des dispositifs sécurisés en place et de suspendre tout projet d’installation ». Alors que les instances représentatives des avocats réclament le démontage de toutes les cages en verre et/ou à barreaux, lesquelles ne sont « pas dignes d’une démocratie moderne » avant le 23 avril prochain, jours des premières audiences correctionnelles, le président de l’ADAP, lui, prévoit déjà ce même jour une action.


En attendant, le déménagement des services et des 1 800 magistrats et agents du ministère de la Justice a quant à lui déjà commencé et devrait se prolonger jusqu’au mois de juin.



Le tribunal de Paris en chiffres


62 000 m2 de surface utile


90 salles d’audience


205 cellules de détention


5 000 m2 pour la salle des pas perdus


38 guichets d’accueil


160 m de haut


38 étages


8 800 personnes quotidiennes


 


Constance Périn


 


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