« La parole, lorsqu’elle n’est pas cri ou éructation, relie
les hommes entre eux », a affirmé Jacques Horrenberger, bâtonnier de Bordeaux
en préambule de son discours, lors de la rentrée solennelle du barreau. Mais
encore faut-il savoir maîtriser son propos. À l’origine de nos sociétés, a-t-il
rappelé, la parole publique était la prérogative des élites religieuses et
politiques. On en est loin aujourd’hui ! Au contraire, la tendance actuelle des
individus est celle de s’exprimer à tout moment et pour rien, via notamment les
réseaux sociaux. Cette logorrhée infernale a conduit peu à peu les mots à
perdre de leur valeur. C’est pourquoi, selon le bâtonnier : « il faut surveiller
notre parole afin de ne pas la diluer, la démonétiser ». Un conseil qu’il a
tout particulièrement adressé aux avocats présents ce jour-là. En effet,
l’éloquence n’est-elle pas le propre des gens de robe ? Cette aptitude à
s’exprimer avec aisance, les deux secrétaires de la conférence du stage l’ont
parfaitement démontrée ce 23 juin.
Maxime Gravellier, a partagé avec l’assistance ses
réflexions sur le thème de la grandeur et de la décadence. Et, pour faire
comprendre « les rouages de cette transition parfois brutale de la gloire à la chute d’un homme »,
il a pris pour exemple la figure du héros. Ce dernier, a expliqué le jeune
homme, se distingue du commun des mortels par un acte « passionné, extraordinaire,
souvent violent », et son engagement peut aller jusqu’au sacrifice. Mais le drame
du héros, c’est qu’il semble condamné à connaître une gloire éphémère. Ainsi,
pour Maître Gravellier, il est avant tout une victime. Victime de son excès et
de son orgueil, mais aussi de l’inimitié de ceux qui le jalousent. Clément
Bourie, lui, a fait l’éloge du temps perdu, une manière de critiquer «
antimodernes et réactionnaires » qui font sans cesse l’apologie du passé au
détriment du présent. Pour le jeune avocat, penser que tout était « aimable »
avant, c’est en fait avoir perdu sa capacité à s’émerveiller devant la nouveauté.
Cette rentrée solennelle a également été l’occasion pour la vice-bâtonnière,
Françoise Casagrande, de remettre la médaille du barreau de Bordeaux à Maître
Ghislaine Seze, qui milite sans relâche pour les avocats en danger dans le
monde.
Maria-Angélica Bailly