Sans modifier en profondeur les dispositions qui
intéressent les entreprises en difficulté, la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative
à la croissance et la transformation des entreprises dite « loi PACTE »,
a cependant introduit deux mesures intéressantes relatives à la procédure
de liquidation judiciaire : l’extension de la procédure de liquidation
judicaire simplifiée applicable aux petites entreprises, et la fin de
l’inscription au casier judiciaire du débiteur de la procédure de liquidation.
Le gouvernement avait souligné
que la durée moyenne d’une liquidation judiciaire est de deux ans et demi,
période pendant laquelle un entrepreneur ne peut pas démarrer une nouvelle
activité. Les rédacteurs de la loi PACTE se sont ainsi donné comme objectif que
les « entrepreneurs
» puissent « rebondir plus facilement, en
permettant à leur entreprise d’être liquidée et redressée plus rapidement, de manière peu coûteuse et non
stigmatisante » (1).
Créée par la loi du 26 juillet 2005, modifiée
par l’ordonnance du 18 décembre 2008 puis par l’ordonnance du 12 mars 2014, la procédure de liquidation
judiciaire simplifiée est une procédure ouverte aux débiteurs personnes
physiques ou personnes morales qui ne possèdent pas d’actifs immobiliers
(articles L. 641-2 et
L. 641-2-1 du Code de commerce).
En 2017, les liquidations judiciaires simplifiées
représentaient 53,6 % de l’ensemble des liquidations (2).
Jusqu’à présent, la procédure de liquidation
judiciaire simplifiée était obligatoire pour les entreprises débitrices n’ayant
employé qu’un seul salarié au cours des six mois précédant l’ouverture de
la procédure, et dont le chiffre d’affaires hors taxes n’a pas dépassé
300 000 euros. Elle était facultative, comme laissée au libre choix
du tribunal, pour les entreprises dont le nombre de salariés est compris entre
deux et cinq et dont le chiffre d’affaires hors taxes n’est pas supérieur à
750 000 euros (articles L. 641-2-1 alinéa 1 et D. 641-10 du Code de commerce). Si
elle est prononcée au cours de la période d’observation, le tribunal décide
d’appliquer la procédure simplifiée dans le jugement de liquidation judiciaire.
La durée de cette procédure ne pouvait, conformément
à l’article L. 644-5?du Code de commerce,
excéder six mois à compter de la décision ayant ordonné ou décidé l’application
de la procédure simplifiée obligatoire ou douze mois à compter de la
décision ayant ordonné ou décidé l’application de la procédure simplifiée
facultative, avec une possibilité de prorogation de trois mois au plus dans les
deux hypothèses. La clôture étant ordonnée par le tribunal.
L’article 57 de la
loi PACTE vient supprimer l’article L. 641-2-1 du
Code de commerce qui fixe les seuils d’application de la liquidation judiciaire
simplifiée facultative. La procédure reste donc obligatoire pour les débiteurs
dont le chiffre d’affaires est inférieur ou égal à 300 000 euros et
dont l’effectif salarié durant les six derniers mois est inférieur ou égal
à un an.
Selon l’article 15 de
l’étude d’impact du projet de loi, la loi PACTE va également rendre obligatoire
la procédure de liquidation judiciaire simplifiée pour toutes les entreprises
employant cinq salariés au maximum et réalisant moins de
750 000 euros de chiffre d’affaires. L’article D. 641-10 du Code de commerce fixant les seuils sera à ce titre modifié par décret.
« Afin
de permettre un traitement rapide et simplifié des procédures de liquidation
ouvertes à l’encontre des plus petits débiteur » (3), la loi PACTE vient
également modifier la durée de la procédure en prévoyant dorénavant que sa fin
devra être prononcée dans un délai de six mois à compter de la décision l’ayant
ordonné ou décidé, le débiteur entendu ou dûment appelé, porté à un an si le
nombre de salariés ainsi que le chiffre d’affaires sont supérieurs à des seuils
fixés par décret.
La possible prorogation de trois mois
par décision spécialement motivée reste quant à elle en vigueur en application
de l’article L. 644-5 alinéa 2 du Code de commerce.
Ces dispositions sont entrées en vigueur depuis le
24 mai 2019 et
devront être précisées par décret. Elles ne sont pas applicables aux procédures en cours au
jour de la publication de la loi PACTE.
Les autres règles concernant cette procédure restent
inchangées. Rappelons que la procédure de liquidation judiciaire simplifiée est
soumise aux mêmes règles que la liquidation judiciaire classique à l’exception
des règles dérogatoires visant à accélérer le cours de la procédure des
articles L. 644-2 à L. 644-6 et R. 644-1à R. 644-4 du Code de commerce.
Ainsi, il appartient notamment au liquidateur de
procéder à la vente des biens mobiliers de gré à gré ou aux enchères publiques
dans les quatre mois suivant le jugement de la liquidation judiciaire sans
avoir besoin de l’accord du juge-commissaire. À l’issue de ce délai, les biens
restants sont vendus aux enchères publiques. La réalisation d’un inventaire
n’est pas systématique.
S’agissant de la procédure de vérification des
créances, celle-ci n’est obligatoire que pour les seules créances susceptibles
de venir en rang utile dans les répartitions
et les créances résultant d’un contrat de travail.
À l’issue de la procédure de vérification et d’admission des créances et de la
réalisation des biens, le liquidateur fait figurer ses propositions de
répartition sur l’état des créances qui est déposé au greffe. Un avis de ce
dépôt est publié au BODACC ainsi que dans un journal d’annonces légales.
Néanmoins, si les sommes à répartir ne permettent que de payer les créanciers
mentionnés à l’article L. 641-13du Code de commerce
(créanciers superprivilégiés, créanciers postérieurs privilégiés, sûreté
immobilière), l’état complété ne fait l’objet que d’un dépôt au greffe.
Tout intéressé peut prendre connaissance de l’état
des créances et, à l’exclusion du liquidateur, former réclamation devant le
juge-commissaire dans le délai d’un mois à compter de la publication de l’avis
de dépôt au greffe ou de la notification de ce dépôt. Les créanciers peuvent
faire un recours à l’encontre de la décision du juge commissaire dans un délai
de dix jours à compter de la notification qui leur en a été faite, sauf s’ils
ont été parties à la décision du juge commissaire. Les réclamations du débiteur
ne peuvent quant à elle concerner que les propositions de répartitions.
Enfin, le tribunal peut à tout moment, par jugement spécialement
motivé, décider de mettre fin au régime de la liquidation judiciaire simplifiée
au profit de la procédure de liquidation classique, même dans le cas où
l’ouverture de la procédure est obligatoire. Cette décision est une mesure
d’administration judiciaire insusceptible de recours.
Soulignons qu’aux termes de l’étude d’impact de la
loi PACTE, le gouvernement a spécifié que, d’après les retours de praticiens
consultés, la bascule d’une liquidation judiciaire simplifiée à la liquidation
judiciaire de droit commun est fréquente, en raison
principalement du non-respect des délais jugés trop courts.
À ce titre, il est regrettable que les rédacteurs de la loi PACTE ne soient pas
venus faciliter le travail du liquidateur en assouplissant certains délais
rigoureux, ainsi que les formalités de publicité et qu’il n’est pas été introduit des mesures
plus protectrices pour les créanciers, certains étant purement exclus des répartitions de la procédure judicaire simplifiée.
Pour finir, à l’heure actuelle, les jugements qui
prononcent la liquidation judiciaire à l’égard d’une personne physique comme la
faillite personnelle ou l’interdiction de gérer sont inscrits au casier
judiciaire de l’intéressé pour cinq ans à compter du jugement (articles 768 5e et 769 1er du Code de
procédure pénale). L’article 59 de
la loi PACTE supprime cette inscription pour les liquidations judiciaires afin
de faciliter le rebond du débiteur.
Notes
1)
Données issues de l’Exposé des motifs de la loi numéro 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la
transformation des entreprises.
2)
Données issues des statistiques DACS du ministère de la Justice – Étude
d’impact de la loi PACTE – Article 15 relatif au rétablissement professionnel et la liquidation
judiciaire simplifiée.
3)
Données issues de l’Exposé des motifs de la loi numéro 2019-486 du 22 mai
2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.
Céline Gris,
Avocat,
Dolidon
Partners,