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La procédure de liquidation judiciaire au regard de la loi PACTE

La procédure de liquidation judiciaire au regard de la loi PACTE
Publié le 07/06/2019 à 11:57



Sans modifier en profondeur les dispositions qui intéressent les entreprises en difficulté, la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises dite « loi PACTE », a cependant introduit deux mesures intéressantes relatives à la procédure de liquidation judiciaire : l’extension de la procédure de liquidation judicaire simplifiée applicable aux petites entreprises, et la fin de l’inscription au casier judiciaire du débiteur de la procédure de liquidation.


Le gouvernement avait souligné que la durée moyenne d’une liquidation judiciaire est de deux ans et demi, période pendant laquelle un entrepreneur ne peut pas démarrer une nouvelle activité. Les rédacteurs de la loi PACTE se sont ainsi donné comme objectif que les « entrepreneurs » puissent « rebondir plus facilement, en permettant à leur entreprise d’être liquidée et redressée plus rapidement, de manière peu coûteuse et non stigmatisante » (1).


Créée par la loi du 26 juillet 2005, modifiée par l’ordonnance du 18 décembre 2008 puis par l’ordonnance du 12 mars 2014, la procédure de liquidation judiciaire simplifiée est une procédure ouverte aux débiteurs personnes physiques ou personnes morales qui ne possèdent pas d’actifs immobiliers (articles L. 641-2 et L. 641-2-1 du Code de commerce).


En 2017, les liquidations judiciaires simplifiées représentaient 53,6 % de l’ensemble des liquidations (2).


Jusqu’à présent, la procédure de liquidation judiciaire simplifiée était obligatoire pour les entreprises débitrices n’ayant employé qu’un seul salarié au cours des six mois précédant l’ouverture de la procédure, et dont le chiffre d’affaires hors taxes n’a pas dépassé 300 000 euros. Elle était facultative, comme laissée au libre choix du tribunal, pour les entreprises dont le nombre de salariés est compris entre deux et cinq et dont le chiffre d’affaires hors taxes n’est pas supérieur à 750 000 euros (articles L. 641-2-1 alinéa 1 et D. 641-10 du Code de commerce). Si elle est prononcée au cours de la période d’observation, le tribunal décide d’appliquer la procédure simplifiée dans le jugement de liquidation judiciaire.


La durée de cette procédure ne pouvait, conformément à l’article L. 644-5?du Code de commerce, excéder six mois à compter de la décision ayant ordonné ou décidé l’application de la procédure simplifiée obligatoire ou douze mois à compter de la décision ayant ordonné ou décidé l’application de la procédure simplifiée facultative, avec une possibilité de prorogation de trois mois au plus dans les deux hypothèses. La clôture étant ordonnée par le tribunal.


L’article 57 de la loi PACTE vient supprimer l’article L. 641-2-1 du Code de commerce qui fixe les seuils d’application de la liquidation judiciaire simplifiée facultative. La procédure reste donc obligatoire pour les débiteurs dont le chiffre d’affaires est inférieur ou égal à 300 000 euros et dont l’effectif salarié durant les six derniers mois est inférieur ou égal à un an.


Selon l’article 15 de l’étude d’impact du projet de loi, la loi PACTE va également rendre obligatoire la procédure de liquidation judiciaire simplifiée pour toutes les entreprises employant cinq salariés au maximum et réalisant moins de 750 000 euros de chiffre d’affaires. L’article D. 641-10 du Code de commerce fixant les seuils sera à ce titre modifié par décret.


« Afin de permettre un traitement rapide et simplifié des procédures de liquidation ouvertes à l’encontre des plus petits débiteur » (3), la loi PACTE vient également modifier la durée de la procédure en prévoyant dorénavant que sa fin devra être prononcée dans un délai de six mois à compter de la décision l’ayant ordonné ou décidé, le débiteur entendu ou dûment appelé, porté à un an si le nombre de salariés ainsi que le chiffre d’affaires sont supérieurs à des seuils fixés par décret.


La possible prorogation de trois mois par décision spécialement motivée reste quant à elle en vigueur en application de l’article L. 644-5 alinéa 2 du Code de commerce.


Ces dispositions sont entrées en vigueur depuis le 24 mai 2019 et devront être précisées par décret. Elles ne sont pas applicables aux procédures en cours au jour de la publication de la loi PACTE.


Les autres règles concernant cette procédure restent inchangées. Rappelons que la procédure de liquidation judiciaire simplifiée est soumise aux mêmes règles que la liquidation judiciaire classique à l’exception des règles dérogatoires visant à accélérer le cours de la procédure des articles L. 644-2 à L. 644-6 et R.  644-1à R. 644-4 du Code de commerce.


Ainsi, il appartient notamment au liquidateur de procéder à la vente des biens mobiliers de gré à gré ou aux enchères publiques dans les quatre mois suivant le jugement de la liquidation judiciaire sans avoir besoin de l’accord du juge-commissaire. À l’issue de ce délai, les biens restants sont vendus aux enchères publiques. La réalisation d’un inventaire n’est pas systématique.


S’agissant de la procédure de vérification des créances, celle-ci n’est obligatoire que pour les seules créances susceptibles de venir en rang utile dans les répartitions et les créances résultant d’un contrat de travail.


À l’issue de la procédure de vérification et d’admission des créances et de la réalisation des biens, le liquidateur fait figurer ses propositions de répartition sur l’état des créances qui est déposé au greffe. Un avis de ce dépôt est publié au BODACC ainsi que dans un journal d’annonces légales. Néanmoins, si les sommes à répartir ne permettent que de payer les créanciers mentionnés à l’article L. 641-13du Code de commerce (créanciers superprivilégiés, créanciers postérieurs privilégiés, sûreté immobilière), l’état complété ne fait l’objet que d’un dépôt au greffe.


Tout intéressé peut prendre connaissance de l’état des créances et, à l’exclusion du liquidateur, former réclamation devant le juge-commissaire dans le délai d’un mois à compter de la publication de l’avis de dépôt au greffe ou de la notification de ce dépôt. Les créanciers peuvent faire un recours à l’encontre de la décision du juge commissaire dans un délai de dix jours à compter de la notification qui leur en a été faite, sauf s’ils ont été parties à la décision du juge commissaire. Les réclamations du débiteur ne peuvent quant à elle concerner que les propositions de répartitions.


Enfin, le tribunal peut à tout moment, par jugement spécialement motivé, décider de mettre fin au régime de la liquidation judiciaire simplifiée au profit de la procédure de liquidation classique, même dans le cas où l’ouverture de la procédure est obligatoire. Cette décision est une mesure d’administration judiciaire insusceptible de recours.


Soulignons qu’aux termes de l’étude d’impact de la loi PACTE, le gouvernement a spécifié que, d’après les retours de praticiens consultés, la bascule d’une liquidation judiciaire simplifiée à la liquidation judiciaire de droit commun est fréquente, en raison principalement du non-respect des délais jugés trop courts.


À ce titre, il est regrettable que les rédacteurs de la loi PACTE ne soient pas venus faciliter le travail du liquidateur en assouplissant certains délais rigoureux, ainsi que les formalités de publicité et qu’il n’est pas été introduit des mesures plus protectrices pour les créanciers, certains étant purement exclus des répartitions de la procédure judicaire simplifiée.


Pour finir, à l’heure actuelle, les jugements qui prononcent la liquidation judiciaire à l’égard d’une personne physique comme la faillite personnelle ou l’interdiction de gérer sont inscrits au casier judiciaire de l’intéressé pour cinq ans à compter du jugement (articles 768 5e et 769 1er du Code de procédure pénale). L’article 59 de la loi PACTE supprime cette inscription pour les liquidations judiciaires afin de faciliter le rebond du débiteur.


 


Notes

1) Données issues de l’Exposé des motifs de la loi numéro 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.

2) Données issues des statistiques DACS du ministère de la Justice – Étude d’impact de la loi PACTE – Article 15 relatif au rétablissement professionnel et la liquidation judiciaire simplifiée.

3) Données issues de l’Exposé des motifs de la loi numéro 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.


 


Céline Gris,

Avocat,

Dolidon Partners,


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