JUSTICE

Le CESE formule une série de recommandations dans son avis sur le sens de la peine

Le CESE formule une série de recommandations dans son avis sur le sens de la peine
Publié le 16/09/2023 à 12:00

Réuni en assemblée plénière le 13 septembre, le Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE) a adopté un avis qui dresse une situation préoccupante des « parcours de peine », observant que le recours aux alternatives à la prison reste en-dessous des objectifs. Il recommande notamment l’adoption d’une convention prévoyant, « à partir d’un certain seuil d’occupation, l’identification de solutions de sortie [anticipée] ».

Le CESE avait déjà consacré, en 2019, un avis sur « la réinsertion des personnes détenues : l’affaire de tous et toutes ». Quatre ans après, il « centre sa nouvelle réflexion autour du parcours pénal et de ses enjeux » dans un avis dédié au « sens de la peine », ayant pour rapporteurs Alain Dru, ex éducateur à la protection judiciaire de la jeunesse, et Danièle Jourdain-Menninger, ex inspectrice générale des affaires sociales.

Pour analyser les évolutions en la matière durant cette période, l’assemblée constitutionnelle a consulté des avocats, magistrats, conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation, associations de réinsertion et d'aide aux victimes, et organisé deux journées d’observation, au tribunal judiciaire de Bobigny et à la maison d'arrêt de Nanterre.

Après une analyse approfondie des parcours de peine, le CESE tire la sonnette d’alarme et pointe une détérioration de la situation carcérale. Il souligne d’abord que la surpopulation carcérale ne cesse de croître chaque trimestre et que l'objectif de renforcer les alternatives à la détention - pourtant porté par deux lois récentes - n'a pas été atteint.

Il constate également que les inégalités sociales, telles que la précarité, les addictions et les fragilités, se perpétuent au sein du système pénal, ce qui rend la réinsertion plus difficile et augmente les risques de récidive.

De plus, le CESE rapporte un « grand écart budgétaire entre les sommes considérables investies dans la construction de nouvelles places de prison et les budgets consacrés à la réinsertion, aux alternatives à la détention et aux aménagements de peine » ; tendance est renforcée par le fait que des infractions entraînant des peines de prison sont constamment créées, tandis que les alternatives restent d’un usage limité.

Enfin, l’assemblée constitutionnelle note que la prison constitue souvent « le choix le moins risqué », mais aussi la réponse immédiate à l'attente de sanction, et que si la surveillance électronique est de plus en plus utilisée, souvent mise en place sans accompagnement, elle n'offre que peu d'avantages en termes de réinsertion.

Trois priorités identifiées

Le CESE a par ailleurs défini trois priorités qui doivent être « un préalable » aux propositions d’actions listées dans son avis rendu le même jour. En premier lieu, promouvoir une meilleure compréhension de la peine par les victimes, les personnes condamnées et la société dans son ensemble. En effet, le Conseil observe que la justice pénale et certains de ses principes, tels que la présomption d'innocence ou la prescription, sont régulièrement mal interprétés, ce qui engendre des malentendus. Il est donc nécessaire selon lui d’améliorer l'accompagnement des victimes dès le début et à chaque étape du processus.

En second lieu, le CESE appelle à considérer la question de la dignité de la punition. Cela inclut la nécessité de réduire l'utilisation de la détention provisoire, de mettre en place une peine de probation indépendante de l'emprisonnement et d'instaurer une gestion carcérale à la sortie. Cette gestion ne vise pas à empêcher les juges de prononcer des condamnations. Elle implique qu’ « au-delà d’un certain seuil d’occupation des établissements, une nouvelle entrée en prison impose l’identification, par les autorités judiciaires et les services pénitentiaires et de la réinsertion, de solutions pour libérer une place en détention ».     

Troisième priorité : personnaliser la sanction en permettant au système judiciaire de prendre des décisions éclairées. Ces dernières doivent, selon le Conseil, se baser sur des informations concrètes, précises et exhaustives concernant la situation de l'individu, afin de de déterminer la peine la plus efficace pour prévenir la récidive et favoriser la réintégration sociale.

Zoom sur les recommandations

Au titre des 19 recommandations contenues dans l’avis qu’il a adopté à l’issue de l’assemblée plénière, le CESE recommande notamment que le Parlement réalise régulièrement une évaluation complète des infractions et des sanctions. Cette démarche permettrait d'examiner leur pertinence et leur efficacité, de réduire le nombre de délits punis par de courtes peines de prison et de garantir une cohérence générale.

Il suggère en outre de mettre en place une approche globale pour réduire la détention provisoire. Cela pourrait inclure la décriminalisation de certains délits, la limitation de sa durée selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, et une justification plus approfondie de son utilisation en expliquant pourquoi d'autres alternatives ne seraient pas efficaces.

Par ailleurs, le CESE préconise de mettre en œuvre une régulation carcérale en établissant une convention prévoyant qu'à partir d'un certain niveau d'occupation, des « solutions de sortie » seront identifiées pour les personnes « susceptibles d’être libérées de façon anticipée » (libération sous contrainte, réductions supplémentaires de peine, conversion du reliquat de peine…). Une démarche qui impliquerait la collaboration des autorités judiciaires, pénitentiaires, d'insertion et de réinsertion, et la coordination du processus au niveau des cours d’appel.

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