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Le paradoxe des délais de paiement

Le paradoxe des délais de paiement
Publié le 20/10/2017 à 11:08

Le Cabinet Arc a publié son 7e baromètre annuel réalisé avec l’Ifop. Pour commenter cette étude, qui révèle un regain de confiance mais aussi une explosion des retards de paiement, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, était invité le 3 ocobre dernier. Il a également répondu aux questions de Denis Le Bossé, président du Cabinet Arc, et  Jean-Marc Sylvestre, journaliste spécialiste de l’économie.


 

« La situation économique en France est la meilleure de ces 10 dernières années » affirme Bruno Le Maire. Pour autant, « les délais de paiement sont encore trop longs », ajoute-t-il.

Les chiffres du 7e baromètre le confirment : le retard de paiement moyen pour les PME a explosé. Il est passé de 11,8 jours en 2016 à 14,5 jours cette année. Dans le même temps, du côté des grandes entreprises il connaît une diminution, puisqu’il est passé de 10,4 jours en 2016 à 9,6 aujourd’hui. Plus précisément, le baromètre indique une hausse des longs retards en 2017 (11 % se situent à plus de 30 jours pour les PME, contre 4 % en 2016 ; et 20 % pour les grands comptes, contre 9 % en 2016). Les petits retards, eux, sont en recul.

Pour Denis Le Bossé « les grands groupes améliorent globalement leur comportement de paiement, sans doute sous l’effet de la politique du name & shame ». Or, cela n’empêche pas le rapport de force, qualifié de « trop grand » par le ministre de l’Économie, de toujours jouer en faveur des grandes entreprises. Pour y remédier, Bruno Le Maire s’est dit favorable « à la baisse du plafond et à une dématérialisation plus poussée ». Un avis partagé par 31 % des entreprises interrogées qui estiment qu’abaisser le délai maximal de paiement à 30 jours, date de facture, est la solution la plus efficace.



La dématérialisation des factures plébiscitée


Sans surprise, 94 % des dirigeants pensent que le non-respect des délais de paiement met en danger la santé des entreprises pouvant aller jusqu’au dépôt de bilan. Ils ne sont cependant pas fatalistes, car 56 % estiment possible de les réduire en publiant les noms des entreprises sanctionnées pour retard de paiement, sur les bases d’informations légales, et ils sont un point de plus à plébisciter la dématérialisation des factures. Pour Denis Le Bossé : « Même si le name & shame mis en place par Emmanuel Macron en 2015 s’est révélé efficace, la publication des amendes uniquement sur le site de la DGCCRF n’apparaît plus suffisante ». Le président du cabinet Arc pense d’ailleurs que cette « légère amélioration du comportement de paiement des grands groupes » devrait encourager les pouvoirs publics à renforcer les contrôles et mettre en place un véritable name & shame. « Un duo efficace pour casser le rapport de force toujours omniprésent ».

Cependant, l’éternel problème des délais de paiement n’est pas l’apanage des grandes entreprises du secteur privé. Bruno Le Maire l’a dit : « L’État doit être exemplaire en la matière ». Or, c’est loin d’être le cas : « 76 % des entreprises pensent que le secteur public respecte moins bien les délais de paiement que le secteur privé et 53 % des PME refusent de répondre aux appels d’offres émis par le secteur public par crainte de ne pas être payées ou de subir des délais de paiement trop longs », révèle le baromètre.

 

D’importantes difficultés de trésorerie


Les retards dans les délais de paiement nuisent à la trésorerie. Face aux besoins que cela entraîne, plusieurs « solutions » existent : ainsi, selon l’étude publiée par le Cabinet Arc et réalisée par Ifop, 35 % des entreprises utilisent le découvert bancaire, 27 % allongent le délai de paiement fournisseur et 17 % utilisent l’affacturage. Mais Denis Le Bossé précise que les entreprises considèrent ces « outils à leur disposition » inadéquats et qu’elles « restent très attachées au financement bancaire ». Seulement voilà, les banques refusent souvent les sollicitations des TPE/PME en matière de crédit de trésorerie. Pour Bruno Le Maire « Le cœur du problème ce ne sont pas les banques, c’est la profitabilité des entreprises parce que les impôts et charges sont trop élevés ». Le ministre de l’Économie en a ensuite profité pour vanter les mérites de la politique du gouvernement sur le mode pédagogique : « Nous réinjectons des liquidités dans l’économie. Alléger la fiscalité sur le capital alors qu’on faisait l’inverse depuis 30 ans, cela prend du temps à comprendre pour les Français, car ça n’a jamais été fait ».

 


Victor Bretonnier

 




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