C’est au ministère de la Justice, place Vendôme, que s’est tenue le
mardi 6 mars 2018 la cérémonie de remise du prix Vendôme 2017. Créé en 2007 par
la Mission de recherche Droit et Justice, de concert avec la direction des
Affaires criminelles et des Grâces du ministère de la Justice, ce prix vise à
récompenser une thèse de droit pénal, de procédure pénale ou de sciences
criminelles consacrée à un sujet jugé pertinent par le ministère. Cette année,
la thèse d’Iryna Grebenyuk « Pour une
reconstruction de la justice pénale internationale. Réflexions autour d’une
complémentarité élargie », soutenue le 8 décembre 2016 à l’université Paris I Panthéon-Sorbonne
a été distinguée ce jour.
Afin de
récompenser la thèse lauréate de cette distinction, le jury a procédé à une
présélection de trois thèses ; puis deux rapporteurs désignés pour chaque
thèse ont présenté chaque ouvrage au jury final, présidé par Robert Gelli,
directeur des Affaires criminelles et des Grâces. Distinguant son travail de
recherche, le jury a attribué le prix à Iryna Grebenyuk, accompagné d’une
dotation financière à hauteur de 3 000 euros. Le
jury a attribué une mention spéciale à Nicolas Picard pour sa thèse « L’application
de la peine de mort en France, 1906-1981 », soutenue le 15 octobre 2016 à l’université Paris I
Panthéon-Sorbonne. La campagne de recueil des candidatures pour le prix Vendôme
2018 est quant à
elle déjà lancée.
Résumé de la
thèse d’Iryna Grebenyuk
Selon la
lecture classique du principe de complémentarité, le Statut de Rome confère à
la Cour pénale internationale (CPI) une fonction purement supplétive :
elle n’a vocation à intervenir que si l’ordre juridique national, ayant la
compétence prioritaire sur le crime international, est défaillant. La présente
thèse part de l’insuffisance de cette lecture et propose d’élargir la
définition de la complémentarité pour la fonder sur l’idée d’interaction et de
partenariat des ordres juridiques international et national, et, ce faisant,
plaide pour une reconstruction de la justice pénale internationale s’appuyant
sur une nouvelle répartition du contentieux des crimes internationaux à la fois
légitime et efficace. À cette fin, dans l’ordre international, l’auteur
préconise, d’un côté, d’instaurer une primauté sélective de la CPI pour les
hauts dirigeants étatiques ayant conçu et dirigé le dessein criminel, et d’un
autre côté, pour le contentieux ne concernant pas ces auteurs, d’impulser une
nouvelle dynamique de complémentarité qui permettrait d’associer l’État à la
procédure menée par la CPI, grâce à une dissociation des phases du procès
(dissociation enquête/poursuite ou jugement sur la culpabilité/prononcé de la
peine). Dans l’ordre étatique, il conviendrait de renforcer la mise en œuvre de
deux perspectives conjointes : d’une part, devrait être confortée la
restauration de la paix sociale grâce à des commissions de vérité inspirées de
la théorie de justice restaurative ; d’autre part, devraient être
diversifiés les mécanismes de lutte contre l’impunité consistant à recourir à
la justice accélérée (plaidoyers de culpabilité, pratiques ancestrales) ainsi
qu’à la technique des juridictions pénales hybrides.
Le parcours d’Iryna Grebenyuk
Née en Ukraine, Iryna Grebenyuk a rejoint la France en 2003. Après une
formation juridique initiale à l’université d’Amiens et à l’université Paris
II, elle a intégré le master II « Droit pénal et Politique criminelle
en Europe » (Option Droit comparé) de l’université Paris I
Panthéon-Sorbonne. La rencontre avec le professeur Geneviève Giudicelli-Delage,
directrice du Master, a été décisive pour Iryna Grebenyuk : elle lui donne
le goût de la recherche et lui fait découvrir une passion pour la justice
pénale dans toutes ses manifestations. C’est sous sa direction qu’Iryna
Grebenyuk entreprend ensuite une thèse de doctorat. Grâce à un contrat
doctoral, elle mène une réflexion sur le principe de complémentarité, véritable
pierre angulaire de la justice pénale internationale. En parallèle de ses
travaux de recherche, elle enseigne en Licence 1, 2, 3 et Master 1 diverses matières relevant des branches pénale, civile et
commerciale du droit privé dans plusieurs universités, dont l’université Paris
I Panthéon-Sorbonne. Qualifiée à la Maîtrise de conférences en droit privé et
sciences criminelles en 2016, Iryna Grebenyuk obtient la même année le prix de
thèse en Droit privé Robert Dennery de la Chancellerie des universités de Paris
et continue à enseigner à l’université d’Amiens.