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Reforme Prud’homale, un an après la Loi Macron, par Sylvie Goldgrab

Reforme Prud’homale, un an après la Loi Macron, par Sylvie Goldgrab
Publié le 04/10/2016 à 11:50

Un an après l’entrée en vigueur de la loi du 6 août 2015, dite Loi Macron, qui a profondément modifié la première phase de la procédure prud’homale (cf. article du Journal Spécial des Sociétés du 23 janvier 2016), les décrets des 20 mai puis du 18 juillet 2016 ont achevé cette importante réforme.

L’essentiel du décret du 20 mai 2016 concerne la procédure devant le Conseil de prud’hommes de la saisine jusqu’au bureau de jugement, puis devant la Cour d’appel, tandis que le décret du 18 juillet 2016 réglemente la désignation des défenseurs syndicaux.

Ces règles s’appliquent depuis le 1er août 2016.

 

I. De la saisine du Conseil de prud’hommes au bureau de jugement  

 

A. La saisine du Conseil de prud’hommes

 

Depuis le 1er août 2016, il ne suffit plus de remplir un formulaire type pour introduire une action devant la juridiction prud’homale mais il faut rédiger une requête comportant les mentions de l’article 58 du Code de procédure civile, sous peine de nullité (articleR. 1452-2 du Code du travail). Il n’est pas précisé si c’est le Bureau de Conciliation et d’Orientation (BCO) ou le Bureau de Jugement (BJ) qui pourra prononcer la nullité.

La requête « contient un exposé sommaire des motifs de la demande » et est accompagnée des pièces énumérées sur un bordereau, en autant d’exemplaires que de défendeurs, outre l’exemplaire pour le greffe.

La rédaction d’une requête contenant un exposé sommaire des motifs de la demande nécessitera qu’avant d’introduire une demande, une analyse du dossier soit faite, ce qui évitera des saisines et demandes infondées, ce qui devrait désengorger la juridiction prud’homale.

Le respect de cette règle permettra au BCO, statuant en tant que BJ, de juger immédiatement l’affaire, dans l’hypothèse où, sans motif légitime, le défendeur ne comparaîtrait pas (article L. 1454-1-3 du Code du travail).

Changement important, la règle de l’unicité de l’instance (qui voulait que toutes les demandes issues du contrat de travail connues à la date des débats fassent l’objet d’une seule demande) est supprimée. Cela permettra au salarié de saisir plusieurs fois le Conseil de prud’hommes de demandes différentes issues du même contrat de travail. L’employeur risque de faire face à des instances successives, ce qui constitue une insécurité pour lui.

Le corollaire sera qu’il faudra que les demandes additionnelles soient liées à la demande initiale faute de pouvoir former de nouvelles demandes en cours de procédure. Cela ouvre la porte à de sérieuses discussions entre les Conseillers prud’hommes.

Le greffe adressera un avis, par tous moyens au demandeur et par lettre recommandée avec accusé de réception au défendeur, pour les convoquer à la séance du BCO.

Si le litige porte sur un licenciement économique l’employeur devra transmettre au greffe les éléments visés à l’article L. 1235-9 du Code du travail.

 

B. La procédure devant le Bureau de Conciliation et d’Orientation

 

C’est devant le BCO que devra être soulevée la contestation de la section et non plus comme auparavant jusqu’au bureau de jugement (BJ). Cela évitera tout procédé dilatoire, l’incident étant réglé désormais avant l’audience du BJ.

Est ajoutée une mesure que pourra prendre le BCO : il pourra rendre une décision récapitulant les éléments à faire figurer sur l’attestation Pôle Emploi (si l’employeur n’a pas délivré cette attestation) et la notifier à Pôle Emploi.

Le rôle du BCO dans la mise en état des dossiers est renforcé puisqu’il assurera la mise en état jusqu’à la date qu’il déterminera pour l’audience de jugement (article R 1454-1 du Code du travail).

Le BCO fixera des délais et conditions de communication des prétentions, moyens et pièces. Il pourra y avoir des séances à cette fin avec dispense de s’y présenter.

Si les parties ne respectent pas les dates fixées, l’affaire sera radiée, ou renvoyée devant le bureau de jugement qui en tirera toute conséquence.

Il est évident que cette mesure va mettre un terme aux audiences du BJ qui jouaient ce rôle de mise en état, les parties se présentant pour demander des renvois, au grand dam des Conseillers prud’homaux venus pour juger et non pour mettre le dossier en état.

Le principe du contradictoire, qui sous couvert d’oralité des débats était souvent mis à mal, devrait désormais être respecté devant la juridiction prud’homale grâce à la mise en état préalable des dossiers. On ne peut que s’en féliciter.

La loi Travail du 21 juillet 2016 a ajouté que le Conseil de prud’hommes (BCO et BJ) pouvait clôturer l’instruction de l’affaire par une ordonnance non susceptible de recours.

Enfin est prévue la possibilité de recourir à la médiation devant le BCO ainsi que devant le BJ.


C. La procédure devant le bureau de jugement et le référé en la forme

 

Le BJ, s’il a été saisi directement ou si le dossier n’est pas en état, pourra procéder à une mise en état. Après la date fixée est prévue la possibilité d’écarter des débats ce qui est communiqué ou demandé.

Le BJ pourra prononcer une ordonnance de clôture de l’instruction.

Quand les parties sont assistées d’un avocat leurs conclusions devront contenir les prétentions, les moyens de fait et de droit et viser les pièces. Le dispositif devra récapituler les prétentions. Le BJ ne statuera que sur ce qui sera énoncé au dispositif et seules seront prises en considération les dernières conclusions.

Ces règles sont applicables également devant la formation de référé.

Le défenseur syndical, dont il sera traité ci-après, n’est pas tenu à ces obligations.

Cela signifie que des règles différentes s’appliqueront en fonction du choix du représentant, avocat ou défenseur syndical.

Enfin a été institué un référé en la forme qui permettra, en cas d’urgence, à la formation de référé de prendre une décision au fond.



II. La représentation des parties


 A. Devant le Conseil de prud’hommes (assistance et représentation)

 

Les parties peuvent se faire assister ou représenter.

Il n’est plus nécessaire de justifier d’un motif légitime pour se faire représenter, ce qui permettra à l’employeur en particulier de ne pas avoir à écrire une lettre d’excuse s’il ne peut assister à l’audience.

Désormais ce seront des défenseurs syndicaux qui, à côté des avocats et des personnes précédemment habilitées, pourront assister ou représenter les parties à condition d’être munis d’un pouvoir spécial.

Devant le BCO, le défenseur syndical devra être autorisé à concilier ou prendre part aux mesures d’orientation.

Les organisations de salariés et d’employeurs ont déjà proposé des défenseurs syndicaux que la DIRECCTE a désigné par région. La liste sera révisée tous les quatre ans.

Le défenseur syndical exercera sa fonction dans le ressort des Cours d’appel de sa région. (…)


 

Sylvie Goldgrab,

Avocat,

117 rue de Rennes - 75006 Paris

           


Retrouvez la suite de cet article dans le Journal Spécial des Sociétés n° 74 du 1er octobre 2016

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