Un an après
l’entrée en vigueur de la loi du 6 août 2015, dite Loi Macron, qui a
profondément modifié la première phase de la procédure prud’homale (cf. article
du Journal Spécial des
Sociétés du 23 janvier 2016), les décrets des 20 mai
puis du 18 juillet 2016 ont achevé cette importante réforme.
L’essentiel
du décret du 20 mai 2016 concerne la procédure devant le Conseil de prud’hommes
de la saisine jusqu’au bureau de jugement, puis devant la Cour d’appel, tandis
que le décret du 18 juillet 2016 réglemente la désignation des défenseurs
syndicaux.
Ces règles
s’appliquent depuis le 1er août 2016.
I. De la
saisine du Conseil de prud’hommes au bureau de jugement
A. La saisine
du Conseil de prud’hommes
Depuis le 1er août 2016, il ne
suffit plus de remplir un formulaire type pour introduire une action devant la
juridiction prud’homale mais il faut rédiger une requête comportant les
mentions de l’article 58 du Code de procédure civile, sous peine de nullité
(articleR. 1452-2 du Code du
travail). Il n’est pas précisé si c’est le Bureau de Conciliation et
d’Orientation (BCO) ou le Bureau de Jugement (BJ) qui pourra prononcer la
nullité.
La requête « contient un exposé sommaire des motifs de la
demande » et est accompagnée des pièces énumérées sur un bordereau, en
autant d’exemplaires que de défendeurs, outre l’exemplaire pour le greffe.
La rédaction d’une requête contenant un exposé sommaire des motifs de
la demande nécessitera qu’avant d’introduire une demande, une analyse du
dossier soit faite, ce qui évitera des saisines et demandes infondées, ce qui
devrait désengorger la juridiction prud’homale.
Le respect de cette règle permettra au BCO, statuant en tant que BJ, de
juger immédiatement l’affaire, dans l’hypothèse où, sans motif légitime, le
défendeur ne comparaîtrait pas (article
L. 1454-1-3 du Code du travail).
Changement important, la règle de l’unicité de l’instance (qui voulait
que toutes les demandes issues du contrat de travail connues à la date des
débats fassent l’objet d’une seule demande) est supprimée. Cela permettra au
salarié de saisir plusieurs fois le Conseil de prud’hommes de demandes
différentes issues du même contrat de travail. L’employeur risque de faire face
à des instances successives, ce qui constitue une insécurité pour lui.
Le corollaire sera qu’il faudra que les demandes additionnelles soient
liées à la demande initiale faute de pouvoir former de nouvelles demandes en
cours de procédure. Cela ouvre la porte à de sérieuses discussions entre les
Conseillers prud’hommes.
Le greffe adressera un avis, par tous moyens au demandeur et par lettre
recommandée avec accusé de réception au défendeur, pour les convoquer à la
séance du BCO.
Si le litige porte sur un licenciement économique l’employeur devra
transmettre au greffe les éléments visés à l’article L. 1235-9 du Code du travail.
B. La procédure
devant le Bureau de Conciliation et d’Orientation
C’est devant
le BCO que devra être soulevée la contestation de la section et non plus comme
auparavant jusqu’au bureau de jugement (BJ). Cela évitera tout procédé
dilatoire, l’incident étant réglé désormais avant l’audience du BJ.
Est ajoutée
une mesure que pourra prendre le BCO : il pourra rendre une décision
récapitulant les éléments à faire figurer sur l’attestation Pôle Emploi (si
l’employeur n’a pas délivré cette attestation) et la notifier à Pôle Emploi.
Le rôle du
BCO dans la mise en état des dossiers est renforcé puisqu’il assurera la mise
en état jusqu’à la date qu’il déterminera pour l’audience de jugement (article R 1454-1 du Code du travail).
Le BCO
fixera des délais et conditions de communication des prétentions, moyens et
pièces. Il pourra y avoir des séances à cette fin avec dispense de s’y
présenter.
Si les
parties ne respectent pas les dates fixées, l’affaire sera radiée, ou renvoyée
devant le bureau de jugement qui en tirera toute conséquence.
Il est
évident que cette mesure va mettre un terme aux audiences du BJ qui jouaient ce
rôle de mise en état, les parties se présentant pour demander des renvois, au
grand dam des Conseillers prud’homaux venus pour juger et non pour mettre le
dossier en état.
Le principe
du contradictoire, qui sous couvert d’oralité des débats était souvent mis à
mal, devrait désormais être respecté devant la juridiction prud’homale grâce à
la mise en état préalable des dossiers. On ne peut que s’en féliciter.
La loi
Travail du 21 juillet 2016 a ajouté que le Conseil de
prud’hommes (BCO et BJ) pouvait clôturer l’instruction de l’affaire par une
ordonnance non susceptible de recours.
Enfin est prévue la possibilité de recourir à la médiation devant le
BCO ainsi que devant le BJ.
C. La procédure
devant le bureau de jugement et le référé en la forme
Le BJ, s’il
a été saisi directement ou si le dossier n’est pas en état, pourra procéder à
une mise en état. Après la date fixée est prévue la possibilité d’écarter des
débats ce qui est communiqué ou demandé.
Le BJ pourra
prononcer une ordonnance de clôture de l’instruction.
Quand les
parties sont assistées d’un avocat leurs conclusions devront contenir les
prétentions, les moyens de fait et de droit et viser les pièces. Le dispositif
devra récapituler les prétentions. Le BJ ne statuera que sur ce qui sera énoncé
au dispositif et seules seront prises en considération les dernières
conclusions.
Ces règles
sont applicables également devant la formation de référé.
Le défenseur
syndical, dont il sera traité ci-après, n’est pas tenu à ces obligations.
Cela
signifie que des règles différentes s’appliqueront en fonction du choix du
représentant, avocat ou défenseur syndical.
Enfin a été
institué un référé en la forme qui permettra, en cas d’urgence, à la formation
de référé de prendre une décision au fond.
II. La représentation des parties
A. Devant le Conseil de prud’hommes
(assistance et représentation)
Les parties
peuvent se faire assister ou représenter.
Il n’est
plus nécessaire de justifier d’un motif légitime pour se faire représenter, ce
qui permettra à l’employeur en particulier de ne pas avoir à écrire une lettre
d’excuse s’il ne peut assister à l’audience.
Désormais ce
seront des défenseurs syndicaux qui, à côté des avocats et des personnes
précédemment habilitées, pourront assister ou représenter les parties à
condition d’être munis d’un pouvoir spécial.
Devant le
BCO, le défenseur syndical devra être autorisé à concilier ou prendre part aux
mesures d’orientation.
Les
organisations de salariés et d’employeurs ont déjà proposé des défenseurs
syndicaux que la DIRECCTE a désigné par région. La liste sera révisée tous les
quatre ans.
Le défenseur
syndical exercera sa fonction dans le ressort des Cours d’appel de sa région. (…)
Sylvie Goldgrab,
Avocat,
117 rue de Rennes - 75006 Paris
Retrouvez
la suite de cet article dans le Journal
Spécial des Sociétés n° 74 du 1er octobre 2016
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