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« Les experts-comptables sont pleinement concernés par les mutations sociétales, sociales et environnementales » - Entretien avec Michaël Fontaine, rapporteur général du 77e congrès des experts-comptables

« Les experts-comptables sont pleinement concernés par les mutations sociétales, sociales et environnementales » - Entretien avec Michaël Fontaine, rapporteur général du 77e congrès des experts-comptables
Publié le 22/09/2022 à 10:32

L’expert-comptable au cœur de la société : vaste programme pour le prochain congrès des experts-comptables, qui se déroulera les 28, 29 et 30 septembre prochains, Porte de Versailles, à Paris. RSE, numérisation, innovation… : pour son rapporteur général Michaël Fontaine, également vice-président du Conseil national de l’Ordre des experts-comptables, le professionnel du chiffre, partenaire du dirigeant, est aujourd’hui pleinement concerné par ces transformations et leurs conséquences sur l’entreprise.

 

 



 

Du 28 au 30 septembre, se tiendra le 77e congrès des experts-comptables, axé cette année sur l’expert-comptable au cœur de la société. Pourquoi ce thème ?

L’année dernière, à Bordeaux, le congrès avait placé l’expert-comptable au cœur de la relance, thème éminemment justifié par l’actualité liée à la crise sanitaire.

En 2022, le Conseil national de l’Ordre des experts-comptables (CNOEC) a souhaité placer l’expert-comptable au cœur de la société, un choix qui s’inscrit dans le prolongement des 100 propositions concrètes pour une France plus forte, juste, compétitive, faites dans le cadre de l’élection présidentielle et des débats parlementaires. Les experts-comptables sont pleinement concernés par les mutations sociétales, sociales et environnementales, et ont un rôle central à jouer au cœur de l’activité sociale et démocratique du pays. La profession accompagne les entreprises, notamment les plus petites, dans ces évolutions.

 

 

Quels seront les temps forts qui rythmeront le congrès ? Sous quelles formes ? Et pouvons-nous attendre quelques nouveautés ?

Avant de parler du fond, je tiens tout d’abord à parler de la forme. Pour la première fois, notre congrès annuel se tiendra Porte de Versailles (Hall 7 niveau 3), à Paris. Le Palais des Congrès, porte Maillot, n’était plus adapté. L’agencement sur deux niveaux ne facilitait pas les échanges.

Au Parc des expositions, l’organisation sur un seul niveau permettra plus de fluidité et une meilleure mise en avant de nos partenaires. Le Palais des Congrès était également devenu trop étroit. Nous devons en effet répondre à une forte sollicitation tant de la part des congressistes que des partenaires. Nous sommes heureux d’accueillir cette année 270 partenaires, un record ! Au 7 septembre, nous avions déjà dépassé le nombre d’inscrits l’année dernière (4 800 participants en 2021) et dépassons les 5 000 congressistes !

Toutefois, l’objectif n’est pas de faire plus, mais de faire mieux. Nous avons ainsi travaillé sur la forme du congrès, en faisant notamment le choix de reconduire ce format hybride qui avait bien fonctionné l’édition précédente, et qui répondait à l’époque à de potentielles restrictions de flux. Cette ouverture au digital nous permet de toucher plus de monde et répond à une demande des congressistes, qui ne peuvent pas forcément faire le déplacement pour trois jours.

En outre, cela permet aussi de limiter l’empreinte carbone [voir prochaine question].

 

 

« On va faire le maximum, tous ensemble, pour rendre ce congrès le plus écoresponsable possible. C’est un beau signal que nous envoyons à nos clients, aux futures générations, mais aussi au gouvernement. » 

 

 

 

Pour ce qui est du programme, nous gardons une organisation rythmée par des temps forts, à savoir la plénière d’ouverture, les grandes interviews, les grandes conférences et la plénière de clôture. Nous nous réjouissons d’accueillir Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des Petites et Moyennes Entreprises, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme, et Michel Barnier, négociateur en chef de l’Union européenne en charge du Brexit, ancien vice-président de la Commission européenne et ancien ministre. Nous accueillerons également le sélectionneur et entraîneur du XV de France Fabien Galthié, dans le cadre d’un grand entretien, le jeudi 29 septembre à 10h30.

Le congrès aura enfin son lot de nouveautés, avec par exemple l’organisation d’un grand débat des éditorialistes, même jour à 13h30. Les intervenants apporteront leur regard sur des thèmes principalement économiques. Mais je ne veux pas trop en dévoiler, et préfère garder la surprise pour les participants.

 

 

Cette nouvelle édition est placée sous le label « Congrès éco-responsable ». Qu’est-ce que cela suppose ?

C’est une première, et je m’en félicite ! L’année dernière, en clôture du congrès, lors de la passation des rapporteurs, j’ai en effet annoncé qu’on organiserait un congrès écoresponsable, sans réellement savoir quelle forme cela prendrait. Mais il me paraissait important d’inscrire la profession dans cette voie, avant même que les tragiques événements estivaux ne viennent nous en rappeler l’urgence.

En tant que conseiller auprès des entreprises, notamment en politique RSE, il m’est apparu cohérent d’engager le Conseil national dans cette démarche responsable dans l’organisation de son rendez-vous annuel. Aujourd’hui, alors que la capitale va accueillir en 2024 des Jeux olympiques écoresponsables, nous devons, en tant qu’experts-comptables, nous inscrire dans cette dynamique.

Cela part aussi d’un constat : de façon générale, un congrès attire beaucoup de monde, et en réaction, nous avons souvent tendance à vouloir en faire toujours plus. Mais un congrès engendre aussi énormément de déchets. On ne peut plus continuer comme ça, il est temps de faire mieux. À cet égard, on a travaillé, avec toutes les équipes partenaires, à rendre ce congrès écoresponsable, ce qui est, je dois l’admettre, un travail assez conséquent. Cela touche à l’organisation, mais aussi aux partenaires et aux congressistes eux-mêmes.

La mobilité, l’aménagement et la restauration sont les trois piliers sur lesquels nous pouvons agir. Nous incitons par exemple les participants à utiliser des transports plus écologiques. L’organisation d’un congrès hybride répond également à cette exigence, afin de limiter les déplacements. Nous sensibilisons aussi nos partenaires, en les invitant à réfléchir à l’utilité des flyers et des goodies et à s’intéresser à leur mode de fabrication.

Pour ce qui est de l’agencement des stands, nous prévoyons de limiter l’utilisation des moquettes. En effet, chaque année, des centaines de mde moquettes sont jetés, c’est aberrant. Ce choix aura certainement des conséquence visuelles et acoustiques, on en a conscience, mais c’est nécessaire. Quand il le faudra, nous utiliserons des panneaux de moquette réutilisables. Nous sommes heureux d’être ainsi l’un des premiers congrès à faire ce choix audacieux.

Limiter son impact et initier une nouvelle dynamique demande un effort de la part de tous pour repenser l’organisation. Nous nous engageons ainsi à faire des économies d’électricité la nuit, en demandant aux partenaires d’éteindre leurs stands. De même pour la restauration qui proposera des repas moins consommateurs en CO2 en privilégiant les circuits courts. Nous invitons également nos partenaires à ne pas utiliser de dosettes à café.

Limiter son impact et initier une nouvelle dynamique demande un effort de la part de tous pour repenser l’organisation. Nous nous engageons ainsi à faire des économies d’électricité la nuit, en demandant aux partenaires d’éteindre leurs stands. De même pour la restauration qui proposera des repas moins consommateurs en CO2 en privilégiant les circuits courts. Nous invitons également nos partenaires à ne pas utiliser de dosettes à café.

Pour quantifier notre impact, un bilan carbone sera réalisé à la fin du congrès. Ce bilan servira de point de départ pour les prochaines éditions, le but étant, encore une fois, de faire toujours mieux en réduisant notre impact.

On va faire le maximum, tous ensemble, pour rendre ce congrès le plus écoresponsable possible. C’est un beau signal que nous envoyons à nos clients, aux futures générations, mais aussi au gouvernement. Cela s’inscrit directement dans l’intérêt public, en cohérence avec nos missions de conseil et d’accompagnement auprès des entreprises.

 

 

Avec l’accroissement du numérique – et notamment la généralisation de la facture électronique –, l’expert-comptable va être amené à gérer et interpréter un flux d’informations de plus en plus actualisées. En quoi cela influe-t-il sur le rôle de l’expert-comptable ?

Avec la facture dématérialisée, l’expert-comptable s’inscrit pleinement au cœur de la donnée. La généralisation de la facture électronique ne fera que mettre davantage en avant sa capacité à traiter de l’information, ici en temps réel, et à accompagner le client. Cela va fluidifier le flux financier.

Mais, l’exploitation de la facture électronique peut même aller plus loin, notamment en pouvant devenir, à long terme, une source de données extra-financières qui pourront éventuellement être collectées et interprétées.

Car l’enjeu de la facture électronique va au-delà de la simple dématérialisation. Le champ des interventions possibles est très vaste. Même si cela demandera des développements pour permettre le traitement de cette information. A ce titre, le fonds d’investissement DRAKARYS – et ses 7,8 millions d’euros de première levée de fonds – créé en juillet 2021, tend à répondre à cette évolution de la profession. Nous nous positionnons avec des marqueurs pour l’avenir en étant acteurs de ce changement.

Ces évolutions numériques sont inévitables, et cette mise en concurrence avec d’autres acteurs nous pousse à innover, pour fournir aux entreprises un service de qualité, elles-mêmes qui font la force de notre pays.

 





 

Pouvez-vous revenir sur les principales actualités qui ont marqué la profession ?

J’évoquerai en premier lieu le livre blanc présenté lors du précédent congrès puis remis au ministre de l’Économie, qui réunissait 50 propositions pour la relance rapide de l’économie. Notons que 12 d’entre elles ont déjà été adoptées, et 10 sont en voie de l’être ; c’est une excellente nouvelle.

Déjà évoqué plus haut, je tiens aussi à souligner la création du fonds DRAKARYS qui permet à la profession d’être actrice dans ses mutations numériques.

Je pense également à la création du label École de la profession, qui vise à mieux préparer les collaborateurs de demain aux enjeux de la profession, dans un contexte où l’expertise-comptable souffre d’un cruel manque d’attractivité. Avec ce label, le CNOEC entend engendrer une nouvelle dynamique pour mieux intégrer les besoins des experts-comptables, dès la formation.

Je souhaite enfin parler d’Image PME, le nouveau baromètre de l’Ordre des experts-comptables qui analyse l’activité économique. Cet outil vise à renforcer la place de la profession, qui peut fournir aux différents acteurs économiques qui en feraient la demande (des collectivités par exemple) des données économiques portant sur la performance de leur région, de leur département ou de leur ville. En se basant sur les déclarations des experts-comptables, nous pouvons fournir une information de manière fiable et ciblée.

 

 

L’année dernière, le congrès était axé sur le rôle de l’expert-comptable au cœur de la relance. Quel bilan en tirez-vous ? Comment les entreprises françaises se portent-elles ?

Il faut croire qu’une crise en chasse une autre, et avec le contexte international actuel marqué par la guerre en Ukraine, il est aujourd’hui difficile de se prononcer.

Malgré tout, l’étalement des PGE, mesure que nous avons soutenue, contribue à une meilleure gestion post crise de la trésorerie et de la relance des entreprises. Le fonds de solidarité et l’aide dite « Coûts fixes » ont également participé au maintien de l’activité et donc à préserver l’emploi. Ces mesures ont ainsi permis à l’économie française de se maintenir, et ont initié une transition en douceur vers la reprise et la relance. Je tiens également à souligner les belles performances constatées cet été dans les zones touristiques françaises. Cependant, avec la guerre en Ukraine, je ne saurais prévoir les conséquences, mais on le voit, l’inflation et la hausse du prix de l’énergie ont déjà des effets sur les entreprises.

En période de crise comme d’euphorie, l’expert-comptable garde sa place de partenaire et occupe un rôle primordial auprès des entreprises. En cette période incertaine, l’entreprise doit-elle investir ? Pour quelle rentabilité ? Nous sommes là pour y répondre. Dans ce contexte de turbulence, la profession sera assurément présente auprès des entreprises et du gouvernement pour accompagner le mieux possible le tissu économique.

 

 

Pour conclure, quelles sont, selon vous, les grands enjeux qui animeront la profession ces prochaines années ?

J’en identifierais principalement trois.

Le premier, on l’a dit, concerne la facture électronique et ses conséquences en termes d’investissements et de données.

Le deuxième est l’attractivité : le Conseil entend ainsi lancer une large campagne de communication qui s’inscrira dans le temps, à l’image de ce qui se fait au Canada, pour montrer la profession telle qu’elle est aujourd’hui, une profession inscrite dans son temps et dans l’innovation. On y travaille avec les écoles de formation.

Enfin, il y a les enjeux liés à la durabilité : la RSE, la comptabilité soucieuse de l’environnement ou encore la performance extra-financière sont autant de leviers sur lesquels nous travaillons. Nous souhaitons sensibiliser nos confrères à ces mutations sociétales. Et en tant qu’entrepreneur, nous sommes doublement concernés, et nous devons nous aussi les intégrer dans nos cabinets pour attirer nos collaborateurs, et les garder.

 

Propos recueillis par Constance Périn

 


 

 


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