Acquérir
son local professionnel ne s’improvise pas. Cependant, pour les professions
libérales, il n’est pas toujours facile de libérer du temps pour réaliser ces
démarches. Spécialisée dans l’investissement immobilier des professions
libérales réglementées, l’entreprise Prestonn propose de les accompagner à
chaque étape de leur projet d’acquisition, en mettant à leur service leur
expérience et leur connaissance du marché immobilier et sa réglementation.
Entretien.
Pouvez-vous, en premier lieu, vous présenter ?
J’ai un parcours assez classique. Après avoir effectué une licence
en Économie et Gestion, j’ai intégré, via les voies parallèles, une école de
commerce à Nantes. J’ai, par la suite, réalisé plusieurs stages dans
l’immobilier. Au fil de mes expériences professionnelles, j’ai eu la chance de
découvrir différents pans du secteur : j’ai été notamment gestionnaire de fonds
d’investissement immobilier chez Internos Global Investors ; j’ai ensuite été
asset manager immobilier, et ai assuré dans ce cadre la gestion d’un
portefeuille immobilier assez vaste. Puis, en intégrant la foncière Klépierre,
j’ai découvert, en tant que leasing manager, le marché des centres commerciaux.
J’ai ainsi acquis de solides connaissances dans l’immobilier de bureau,
logistique, et commercial, et dispose d’une bonne vision du marché et de ses
opportunités.
Quand et comment est née votre entreprise ?
Tout est parti d’un constat personnel. J’ai, dans mon
environnement proche, un grand nombre de personnes exerçant en profession
libérale, à commencer par mon père, avocat, qui, au bout de 40 ans d’activité,
n’a jamais pris le temps d’acquérir un local.
Adrien Boussagol, ami devenu depuis mon associé chez Prestonn, a,
de son côté, un membre de sa famille qui est diététicienne qui, avec des
revenus plutôt modestes, cherchait à s’installer. En consacrant beaucoup de
temps à son projet, elle est parvenue à acheter ses locaux professionnels aux
Batignolles (Paris, 17e ), et en loue aujourd’hui une partie. En plus de créer
ainsi des synergies entre les professions médicales, cette solution lui permet
de générer un loyer venant faciliter ses capacités de remboursement. Forte de
ce succès, elle a pu acheter un second local. Elle n’a toutefois pas manqué de
nous confier les difficultés qui avaient été les siennes dans la réalisation de
cette acquisition, sans parler du temps investi, au détriment de ses
consultations, et donc de son chiffre d’affaires. À cette même période, avec
Adrien Boussagol, nous avons réalisé, ensemble, un premier investissement
immobilier ; il s’agissait de l’acquisition d’un local en usage d’habitation
transformé en un cabinet paramédical.
C’est, au final, de la somme de ces expériences qu’est née l’idée
de Prestonn, en mars 2019. L’envie de se lancer dans l’aventure
entrepreneuriale a fait le reste, appuyée par les connaissances dans la
création d’entreprise d’Adrien. Nos profils nous sont apparus complémentaires :
lui est davantage moteur dans la gestion et le pilotage administratif et
financier de l’entreprise, et moi, j’apporte mes connaissances du marché immobilier
et mon expertise dans ce domaine. Ma formation théorique en école de commerce
m’a également bien aidé, mais le terrain reste à mon sens la meilleure façon
d’apprendre. Nous avons également pu profiter des connaissances des
entrepreneurs de notre entourage. Ça a été un vrai plus. Cela nous a permis de
poser librement nos questions auprès des bonnes personnes qui avaient déjà
rencontré des difficultés similaires, lors de la création de leur propre
entreprise.
Nous nous sommes vite rendu compte qu’une agence de conseil des
professions libérales comme la nôtre n’existait pas. Il y avait déjà des
structures offrant des services similaires, mais elles ne s’adressent qu’aux
professions médicales, et proposent tant de l’acquisition que de la location.
Nous, nous avons choisi d’être généraliste, en nous spécialisant dans
l’acquisition de biens.
Le projet a ainsi réellement été lancé en février 2020, juste
avant la crise sanitaire ; un coup dur pour nous, car notre première semaine de
rendez-vous commerciaux coïncidait avec la première semaine du confinement.
Après quelques jours de panique, les clients sont, assez rapidement, revenus
vers nous, plus sereins, maintenant leur projet d’acquisition, une idée
réfléchie répondant à leur besoin. Cette période de trouble s’est au final
avérée positive pour nous, elle a permis de désengorger le marché de la
transaction et a ouvert la voie à de nouvelles opportunités. En effet, le
chiffre d’affaires de nos clients n’a pas baissé, mais les biens sont
actuellement davantage sujets à la négociation, ce qui se traduit, pour nos
clients, par une meilleure opération. L’entreprise a bien évolué en un an, et
nous avons déjà pu recruter deux personnes.
« L’acquisition
d’un local professionnel est très réglementée.
Il y a de nombreux points à
prendre en compte, concernant le type de biens, mais aussi sa localité »
Vous dites que les professions libérales sont «
délaissée face aux problématiques immobilières liées à leur activité ».
C’est-à-dire ?
Sur notre secteur, c’est-à-dire le marché parisien et la première
couronne, les professions libérales réglementées se situent fréquemment dans un
entre-deux : elles sont trop grandes pour être flexibles et agiles sur le
marché de l’immobilier, mais pas assez importantes pour attirer les acteurs de
l’immobilier traditionnels, estimant que leurs projets ne sont pas suffisamment
rémunérateurs. De cette situation naît une frustration.
Nous avons souhaité nous intéresser aux professions libérales
réglementées qui, faute de temps, n’ont pas toujours les moyens de se lancer
dans l’acquisition d’un bien immobilier. La gestion de leurs clients et la
lourdeur administrative de leur activité ne leur laisse pas le temps de
réfléchir à une stratégie immobilière. De plus, à Paris notamment, se lancer
dans ce projet demande un certain nombre de connaissances. Nous avons souhaité
leur accorder du temps et de l’écoute.
L’acquisition d’un bien immobilier apparaît en effet
être un vrai casse-tête pour ces professions. Concrètement, à quelles épreuves
se heurtent-elles ? À quelles spécificités et réglementations les locaux
professionnels répondent-ils ?
L’acquisition d’un local professionnel est très réglementée. Il y
a de nombreux points à prendre en compte, concernant le type de biens, mais
aussi sa localité. Dans la grande majorité des cas, l’acquisition d’un bien
immobilier professionnel concerne les locaux à usage de bureaux ou d’anciens
locaux commerciaux (pour les professions libérales, à Paris notamment, il faut
toutefois vérifier si ces locaux ne sont pas protégés par un plan local
d’urbanisme, qui sert notamment à préserver les commerces).
Les professions libérales réglementées ont cependant la chance de
pouvoir se positionner sur une autre typologie de bien : il s’agit du local à
usage d’habitation, habituellement réservé aux particuliers (une exception qui
vient sans doute du fait que ces professions travaillaient, auparavant,
fréquemment de chez elles). C’est typiquement sur ces biens que nous nous
positionnons à 90 %.
Cependant, il y a de nombreux points à vérifier : d’abord auprès
du règlement de la copropriété, afin de s’assurer qu’il autorise bien
l’exercice d’une profession libérale. Il faut ensuite demander l’autorisation
de changement d’usage à titre personnel auprès de la Mairie de Paris. Il n’y a
pas de restriction particulière pour les locaux en rez-de-chaussée (exception
faite du 8e arrondissement limité à 50m2 maximum) et l’installation dans les
étages doit répondre à des critères bien précis. En effet, dans les quartiers
dits à « prédominance de bureau » (centre de Paris, 16e nord et 17e sud), il
est impossible de s’installer en étage, tandis que pour les autres
arrondissements/ quartiers, une installation au-delà du RDC peut se faire en
respectant un ratio de 50m2 par professionnel et dans la limite de 150m2
maximum. Cette réglementation stricte vise à protéger l’habitat parisien et
éviter de faire de la ville une vaste zone de bureaux.
Il n’est donc pas aisé de s’installer où on veut en tant que professionnel
libéral, et il s’agit pour cela de parfaitement maîtriser la réglementation.
Chez Prestonn, nous sommes très vigilants à cette réglementation, et sommes en
contact permanent avec les services de la Mairie de Paris.
L’acquisition d’un bien immobilier passe par la
recherche, puis la visite du local à la rédaction d’une offre (voir une
négociation), en passant par l’obtention du financement. Quels services
proposez-vous à vos clients ?
Notre travail commence dès la première rencontre. Le client nous
expose ses critères (surface, étage, quartier…). Nous sommes là pour le
conseiller et éventuellement lui proposer des solutions. Nous ouvrons son champ
de vision et affinons le projet avec lui. Il y a aussi le budget. Nous prenons
part au montage du financement, et l’orientons là aussi vers différentes
possibilités. Le professionnel libéral est un profil plutôt apprécié des
banques, mais reste à les rassurer malgré tout, en prouvant que le chiffre
d’affaires de notre client est constant sur plusieurs années. C’est aussi notre
travail.
Une fois que les premières bases de la stratégie sont posées, nous
signons un mandat. Cette étape est primordiale, car elle permet de définir nos
obligations contractuelles respectives et lance officiellement notre collaboration.
Va débuter alors la recherche du bien. Nous travaillons avec un large réseau
d’agences. Ça va vite car on connaît le process, et nous savons quels critères
ne pas négliger. On visite les biens et si cela répond à un bon nombre de
critères, nous adressons à notre client un rapport de visite, avec plans et
photos.
Nous proposons aussi une estimation potentielle des travaux :
notre œil est averti, nous savons comment transformer un appartement en bureau.
Nous envoyons également un récapitulatif des frais (comprenant ceux du notaire
et nos honoraires, soit un pourcentage entre 2 et 5 % du prix du bien TTC, en
fonction de la nature des projets et son ampleur), avec un taux de
remboursement d’emprunt estimé mensuellement.
Nous procédons ensuite à la mise en œuvre de toutes les étapes :
rédaction de l’offre d’achat (avec négociation), demande du règlement à la
copropriété, première relecture des documents…
La prochaine phase concernera la signature d’un compromis de
vente, avec une mise en relation avec le notaire du client, ou le nôtre,
particulièrement aguerri quant à la réglementation de ce type de projet, à
Paris). La majorité de ces tâches se font de façon dématérialisée, offrant plus
de souplesse et un gain de temps considérable, aujourd’hui indispensable. Nous
assurons enfin la gestion du financement, en lien avec la banque (montage du
dossier, production des pièces nécessaires pour favoriser l’obtention du plan,
etc.). Enfin, concernant les travaux potentiels, nous adressons au client un
projet, avec un budget (négocié) et un rétroplanning fixé pour que le projet
soit complet. Notre mission s’arrête le jour de la signature de l’acte
authentique.
Pour faire simple, notre objectif est d’optimiser et de sécuriser
le projet de A à Z : optimiser en termes de temps et de coût, et sécuriser afin
de ne négliger aucune étape, dans le respect de la réglementation en vigueur,
qui peut s’avérer parfois subtile et complexe.
Justement,
quels sont les critères à ne pas négliger ?
Lorsqu’on recherche un bien, le quartier, bien sûr, est un critère
très important. À Paris, outre les écarts de prix, la réglementation est
différente selon les arrondissements. Il faut donc bien se renseigner. En cas
d’acquisition d’un bien à usage d’habitation, et notamment lors de partage de
bureaux, je conseillerais d’être très vigilent quant au changement d’usage
temporaire. Celui-ci est nominatif et incessible : il s’arrête donc quand la
personne s’en va. Le nouveau propriétaire devra alors renouveler la demande.
Prestonn peut naturellement accompagner les professionnels libéraux dans cette
démarche.
Quels
avantages l’achat d’un local professionnel présente-t-il ?
Les professions libérales sont très prises par leur activité
professionnelle, et n’ont pas toujours l’opportunité d’investir. En achetant un
local, le professionnel reste dans son environnement, et continue à engager son
activité.
Il y a aussi une vision à long terme : ces professions gagnent
fréquemment bien leur vie, mais elles doivent cependant préparer leur retraite.
Aussi, le jour où un professionnel cesse son activité, être propriétaire d’un
bien se présente comme un réel atout. Deux options s’offrent à lui : soit il
décide de revendre le bien, et profite ainsi d’un rentrée d’argent, en faisant
éventuellement une plus-value (ce qui est fréquemment le cas, car il s’agit
d’investissements à long terme) ; soit il conserve son bien et le met en
location, bénéficiant alors d’un complément de revenu non négligeable. Il peut
également y avoir un intérêt dans le partage des locaux. Cela crée une réelle
synergie.
Qui
sont vos principaux clients ?
Nos clients sont principalement des professionnels du secteur
médical et paramédical, des avocats et des experts-comptables, qui ont entre 35
et 45ans. Ils sont déjà installés, mais en début de carrière, c’est-à-dire
qu’ils ont suffisamment d’expérience pour attester d’une stabilité
professionnelle, mais ont déjà éprouvé la frustration de payer un loyer,
laquelle a nourri leur envie d’acheter.
Quels
conseils donneriez-vous à un professionnel libéral qui souhaiterait se lancer
dans l’acquisition d’un bien professionnel ?
Je conseillerais en premier lieu d’être extrêmement prudent sur la
réglementation (surtout à Paris, et dans les villes de plus de 200 000
habitants, qui connaissent une forte concentration d’activités). Bien que
contraignante, cette réglementation est utile, car elle permet de contrôler
l’activité, de préserver le logement. Ça évite que nous assistions à
l’inactivité d’une « ville morte » le week-end.
Je conseillerais aussi de ne pas sous-estimer le temps que prend
un investissement immobilier. Cela demande une bonne organisation, car on est
facilement en contact avec une dizaine d’interlocuteurs.
Enfin, mon dernier conseil concerne la recherche du bien en
lui-même. Les locaux à usage de bureaux sont souvent plus chers à Paris. Le
prix du commerce étant fixé en fonction de son attractivité commerciale. Aussi,
il peut s’avérer pertinent d’investir dans un commerce situé dans une rue
calme, le prix n’en sera que plus intéressant.
La
crise sanitaire est venue chambouler notre façon de travailler. La stratégie
immobilière des entreprises est-elle affectée ?
En effet, avec le déploiement du télétravail, nos modes de travail
sont appelés à évoluer. Les entreprises réfractaires au télétravail vont
assurément devoir se plier à ces nouvelles méthodes. Toutefois, je n’ai pas de
crainte. Le 100 % télétravail n’apparaît pas comme la solution ; outre le
problème de productivité parfois constaté, la crise sanitaire a mis en exergue
l’importance du lien social au bureau. Il est apparu comme un lieu d’échange.
Les locaux professionnels vont évoluer, mais ne vont pas disparaître. Il y aura
peut-être des roulements entre les salariés, ou plusieurs locataires pour un
même local.
Concernant les professions libérales, le tout numérique n’est pas
possible, tant le contact humain est important pour un médecin ou un avocat. À
l’heure de la crise de Covid-19, nous constatons l’essor de la
téléconsultation, mais cela ne peut pas être le modèle unique. C’est un
équilibre à trouver. En quelques mots, comment se porte le marché immobilier?
Plus lent à évoluer que le marché boursier, le marché de l’immobilier est toujours
à contre-courant. Les process d’acquisition sont en effet assez longs.
Nous constatons cependant beaucoup d’attentisme, tant de la part
des acheteurs que des vendeurs. Chacun a peur de vendre ou acheter au mauvais
moment, et donc au mauvais prix, ce qui crée une forme d’inertie. Il y a donc
peu d’offres actuellement. Malgré tout, les prix à Paris restent très élevés.
Les prix affichés restent approximativement les mêmes, mais on note cependant
des marges de négociation plus importantes, ce qui permet une plus grande marge
de manœuvre. Les taux d’intérêt demeurent quant à eux très bas (et ont vocation
à le rester, selon les estimations de la BCE.), cela favorise les transactions
immobilières.
Je reste optimiste quant à l’avenir. Les gens continuent à vouloir
se lancer dans des projets immobiliers ; la pierre, contrairement à la
volatilité en Bourse, et une valeur refuge.
Enfin,
quels sont vos projets à venir ?
Nous avons toujours plein de projets. Nous développons
actuellement, dans le prolongement de Prestonn, une agence immobilière qui nous
permettrait d’accompagner nos clients également sur la revente de leur bien.
Une façon de « boucler la boucle », mais aussi de se constituer un réseau
important, qui profiterait aussi à nos clients cherchant à acquérir un bien.
Outre Paris et la petite couronne, nous souhaiterions nous étendre en
Île-de-France. Enfin, dans 3-4 ans, nous entendons, sur le même modèle, tester
notre offre en créant des antennes dans d’autres villes, à savoir Lyon
Marseille et Bordeaux. Dans ces grandes villes, les professions libérales
rencontrent les mêmes problématiques. Nos services leur seront tout aussi
utiles.
Propos
recueillis par Constance Périn