Une attestation qui ne respecte pas l’article
202 du Code de procédure civile est soumise à l’appréciation du juge.
L’arrêt
rendu le 14 février 2023 par la 1re chambre civile de la Cour de
cassation (RG N°23-11.641) rappelle
opportunément que les dispositions de l’article 202 du Code de procédure
civile ne sont pas prescrites à peine de nullité.
Les faits
Le
23 janvier 2023, une femme décède et ses parents ne sont pas d’accord avec son
compagnon sur les modalités des funérailles, étant précisé qu’il n’y a pas eu
de discussion sur la volonté de la défunte d’être incinérée. La divergence
porte sur le devenir de ses cendres.
Les
parents de la femme décédée entendaient voir l’urne funéraire de leur fille,
être inhumée dans le caveau où son frère reposait dans l’Est de la France. Le
compagnon prétendait que la défunte avait émis le souhait de voir ses cendres
déposées à un Lac situé dans l’Hérault.
Le
31 janvier 2023, le Premier président de la cour d’appel de Reims rendait une
ordonnance selon laquelle les cendres seraient déposées auprès du Lac, et qu’il
appartenait au compagnon de la femme décédée d’organiser les funérailles aux
motifs que la défunte n’avait laissé aucune disposition concernant l’organisation de
ses funérailles, et que les attestations produites par les parents de la défunte ne comportaient
pas toutes les mentions visées par l’article 202 du Code de procédure civile. C’est
ce dernier motif qui a donné lieu à la cassation.
L’article 202 du Code de procédure civile
Ce
texte dispose en son alinéa 2 que l’attestation mentionne : « les
nom, prénoms, date et lieu de naissance, demeure et profession de son auteur,
ainsi que s’il y a lieu, son lien de parenté ou d’alliance avec les parties, de
subordination à leur égard, de collaboration ou de communauté d’intérêts avec
elles ».
Selon
la jurisprudence, ces dispositions ne sont pas prescrites à peine de nullité, et les attestations qui ne comportent pas toutes les mentions prescrites par
le texte constituent néanmoins, un commencement de preuve qui peut être
corroboré par d’autres témoignages (CA Lyon, 2e chambre 6 juin
2011 RG N°10/02395). Dès
lors, il appartient aux juges du fond d’apprécier souverainement si ces
attestations non conformes, présentent ou non des garanties suffisantes pour
emporter leur conviction. (Cass, 16 mars 2016 RG N°14-22.922)
En
l’espèce, le compagnon de la défunte soutenait qu’elle souhaitait que ses
cendres soient déposées auprès du Lac héraultais, et a produit des attestations
pour justifier sa position. En
appel, les parents de la défunte produisaient également des attestations dont
les auteurs indiquaient au contraire, qu’elle désirait que son urne funéraire
soit inhumée dans le caveau familial auprès de son frère décédé quelques
semaines avant sa sœur.
Le
Premier président de la cour d’appel de Reims a relevé que plusieurs
attestations produites par les parents ne mentionnaient pas les date et lieu
de naissance de leurs auteurs et leurs liens avec les parties, et les a
déclarées irrecevables. Ainsi,
il s’est déterminé uniquement en fonction de la régularité formelle des
attestations, sans apprécier quelle pouvait être leur valeur probante
intrinsèque, ce qui a conduit la Cour de cassation à le sanctionner. La
position prise par la 1re chambre civile, doit être approuvée.
Le devenir des cendres
L’urne
funéraire est une sépulture et à ce titre, bénéficie de la protection légale
accordée à toute sépulture. L’article
3 de la loi du 15 novembre 1887 dispose que les désirs d’un défunt doivent être
parfaitement respectés, et ses proches sont tenus de réaliser ses directives.
Dès
lors, quand le défunt n’a laissé aucune directive ou s’est contenté d’émettre
des souhaits oraux, les proches peuvent se trouver en difficulté, d’autant plus
qu’en cas de désaccord, il leur appartient d’apporter la preuve de leurs
allégations quant à la volonté présumée du défunt.
Les
proches n’auront pas d’autres solutions que d’interroger l’entourage du défunt
qui peut avoir recueilli ses souhaits ou ses confidences. Ainsi,
il est conseillé de prévoir son mode de sépulture et ses funérailles afin
d’éviter tout litige à ses proches.
Patricia Barthélémy
Avocate à la Cour