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Covid-19 : quel avenir pour l’industrie du mariage ? - Entretien avec Virginie Mention, présidente de l’association des consultants en mariage

Covid-19 : quel avenir pour l’industrie du mariage ?  - Entretien avec Virginie Mention, présidente de l’association des consultants en mariage
Publié le 06/04/2021 à 15:27

Aujourd’hui, en pleine pandémie, le secteur du mariage connaît une crise sans précédent. À l’heure où l’horizon d’un déconfinement est encore flou, comment le secteur entrevoit-il l’avenir ? Entretien avec Virginie Mention, co-fondatrice et présidente de l’Assocem (Association des consultants en mariage) et wedding planner chez Ceremonize.



En 2020, la grande majorité des acteurs de l’industrie du mariage ont déjà perdu plus de 70 % de leur chiffre d’affaires, et plus de deux tiers des fêtes de mariages ont été reportées en 2021. Qu’est-ce que ces chiffres vous inspirent ?

Cela m’inspire une double peine : pour les mariés, d’abord, qui voient une des plus belles journées de leur vie, dans laquelle ils ont investi beaucoup de temps et d’argent, passer au second plan ; et de la peine bien sûr pour les prestataires du mariage, qui n’ont plus aucune rentrée d’argent et qui, potentiellement, auront une année 2021 voire 2022 très affectées. C’est une crise sans précédent. Pour le secteur du mariage, les conséquences financières sont très lourdes.

 


Le Fonds de Solidarité actuel et les aides vous apparaissent-ils suffisants ?

Le Fonds de Solidarité et les aides mises en place par le gouvernement ont le mérite d’exister. Ce n’est pas forcément le cas de tous nos voisins européens. Ils ne sont malheureusement pas suffisants. Le Fonds de Solidarité de 1 500 euros versé sur certains mois ne couvre pas la totalité des charges auxquelles doivent faire face nos entreprises, et ce quelle que soit leur taille. Il faut faire avec. Mais c’est là qu’on note la différence de traitement entre les salariés, pour lesquels le chômage partiel a pu maintenir une bonne partie des salaires, et les indépendants qui doivent composer avec les aides, et parfois reprendre un travail alimentaire pour les compléter.




« Sur un mariage, il nous arrive souvent de faire face à des imprévus, il faut donc savoir rebondir. Disons que cette crise est un très gros imprévu. »


 


Diriez-vous que les professionnels du mariage sont aujourd’hui les grands oubliés de la reprise ?

Grâces aux actions menées avec différentes associations et notamment l’UPSE (Union des Professionnels Solidaires de L’événementiel), le gouvernement a eu écho de nos difficultés, et ce dès le début de la crise sanitaire. Malheureusement, nous sommes une industrie qui n’est pas prise au sérieux. Le mot « mariage » semble faire sourire. Peut-être pense-t-on
que les professionnels du mariage s’amusent le jour d’un mariage, passent leur temps au buffet ou à danser ? Sans rien préparer en amont ? C’est en ce sens que nous avons eu du mal à nous faire entendre, à être pris au sérieux. Il a fallu montrer que l’industrie du mariage représente tout de même plus de trois
 milliards de chiffre d’affaires, 230 000 mariages a minima par an et plus de 55 000 entreprises en France. Nous n’avons, à ce jour, aucune visibilité sur une possible reprise de notre activité, mais je n’irai pas à dire que nous sommes les « grands oubliés » car malheureusement, beaucoup d’autres secteurs n’ont pas plus de visibilité.

 


À ce jour, les mariages civils et religieux sont autorisés, mais pas les réceptions. Pourtant, certains rassemblements « sauvages » sont organisés. Quel regard portez-vous sur cette situation ?

C’était prévisible ! Et c’est un point sur lequel le gouvernement a été alerté. C’est une très bonne chose d’autoriser les mariages civils et religieux. Mais il est évident qu’à la fin de la cérémonie, les invités ne vont pas se « checker » le coude (à défaut de pouvoir sembrasser) et repartir chacun dans leur coin ! Des réceptions de mariage sont organisées sauvagement chez les mariés, la famille ou même dans des lieux loués sur des plateformes entre particuliers ! Cela porte préjudice à notre industrie, mais cela a surtout un grand impact sanitaire que nous déplorons.

En réponse à cette situation, votre association, associée à trois autres (l’UPSE - Union des Prestataires Solidaires de l’Évènementiel, La Demeure Historique - Association représentant les Châteaux et Monuments Historiques ; et le Sydhev - Syndicat Professionnel des Hébergeurs d’Évènements) réclame la possibilité dorganiser un « mariage test ».

 


Pouvez-vous nous en dire plus ? Quelle forme prendrait-il ?

À l’instar de concerts tests ou matchs tests, l’idée est de proposer l’organisation d’un mariage test pour démontrer que les mesures sanitaires peuvent être compatibles avec une réception de mariage. Lors de ce mariage test, il s’agirait de mettre en application le protocole sanitaire qui a été spécialement rédigé pour l’industrie du mariage. C’est une solution qui a été proposée par l’UPSE pour montrer que l’industrie du mariage est professionnalisée et est force de proposition également. Il n’était pas envisageable de rester les bras croisés en attendant que la crise prenne fin. Sur un mariage, il nous arrive souvent de faire face à des imprévus, il faut donc savoir rebondir. Disons que cette crise est un très gros imprévu.

 


Ces mêmes associations avaient remis au gouvernement, à l’été 2020, un protocole sanitaire. De quoi s’agissait-il ?

En effet, l’UPSE a travaillé sur une première version de protocole remise au gouvernement à l’été 2020.

Depuis, ce protocole a été amélioré et enrichi. Il a été envoyé à nouveau fin février et il est d’ailleurs en cours d’étude et de lecture au gouvernement. L’idée est de décomposer toutes les mesures sanitaires pour chaque métier qui intervient sur un mariage. On en dénombre une vingtaine, tout de même. Ceci afin de minimiser les risques de transmission et permettre aux mariages de pouvoir se tenir en toute sécurité.

Ce document détaille également le protocole sanitaire à tenir avant la réception, donc pendant les préparatifs et l’installation, mais aussi pendant les différents moments de la journée, jusqu’à la fin du mariage. Il est aussi demandé aux invités de se faire tester avant l’évènement et de nommer un référent sanitaire qui sera le garant du respect des règles sanitaires. Tout en définissant également les rôles et responsabilités de chacun, mariés et invités inclus.

 


Quel serait le rôle de ce référent sanitaire ?

Le référent sanitaire est une personne désignée par les mariés (cela ne pourra en aucun cas être les mariés eux-mêmes). Il peut s’agir d’un invité ou d’un prestataire dédié à cette tâche, comme par exemple un wedding planner. Ce référent serait la personne garante de la bonne compréhension et application du protocole par les prestataires et mariés en amont du mariage. Il devrait aussi s’assurer, le jour du mariage, du respect des règles sanitaires de la part des invités, mais aussi des prestataires : s’assurer que les gels hydro-alcooliques soient bien prévus, et faire un éventuel réassort, s’assurer que les masques soient bien mis à disposition des invités souhaitant en changer ou ayant oublié le leur, etc.

 


Comment envisagez-vous l’avenir ?

Plutôt sereinement. Je suis une éternelle positive. Je suis convaincue que l’industrie va repartir en flèche dès que la crise sera passée. Il y aura d’une part tous les mariages de 2020 qui n’ont pas pu se tenir. À l’Assocem, au cours d’un sondage, nous avons constaté que près de 70 % des réceptions de mariage n’ont pas pu se tenir l’année dernière. À cela s’ajoutent tous les mariages de 2021 ! En voyant la tournure de la crise, beaucoup de futurs mariés « 2021 » ne se sont pas engagés dans les préparatifs. Ils n’attendent que le feu vert pour foncer. Le mariage reste une valeur refuge. L’amour sera toujours présent, peut-être même plus fort après cette crise que nous traversons. Les relations sociales nous manquent beaucoup et les fêtes ne seront que plus belles une fois cette crise passée. Mais il faut encore être patient, et continuer à serrer les dents le temps que cette crise soit derrière nous .

 

Propos recueillis par Constance Périn


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