A l’occasion de l’audience
de rentrée de la Cour de cassation, le 11 janvier dernier, Chantal Arens et
François Molins ont prononcé leurs allocutions de rentrée dans une
grand’chambre clairsemée. La Première présidente et le procureur général sont
notamment revenus sur le rôle du juge et les évolutions de la justice.
La
Première présidente et le procureur général insistent tous les deux sur
l’éprouvant contexte, traversé par notre pays, qui affecte la sécurité, la
santé, l’économie, et n’épargne pas la justice. Les juridictions ont mis en
œuvre des plans de continuité de l’activité pour s’adapter à la situation, révélant
au passage la marge de progression importante à réaliser concernant les outils
numériques.
Le
siège et le parquet ont assuré leurs missions, partagé leurs interrogations,
amélioré leurs méthodes. Les réflexions et réformes menées durant l’exercice
visent à renforcer la cohérence de l’action de la Cour de cassation et à
consolider son rôle normatif.
La
société est en proie à de puissants courants économiques, politiques, culturels
et médiatiques. Cet environnement véhément ne manque pas de critiquer ni de saper
l’action des juges qui s’érigent pourtant en rempart face à l’arbitraire, et
maintiennent la paix sociale.
Pour Chantal
Arens, le juge originel protège, répare, pacifie, régule. Il restaure le lien entre
les parties. Il tire sa légitimité de son indépendance, de son impartialité, et
défend l’État de droit comme la démocratie. « Le juge ne peut se substituer au politique et le politique ne peut
s’immiscer dans l’office du juge » précise François Molins. Les citoyens
attendent du juge de demain qu’il soit proche des gens, communicant, collectif,
moderne, éventuellement spécialisé.
Quant
aux évolutions de la justice, qu’elles passent par l’open data ou la visioconférence,
elles doivent respecter ses fondements : humains, contradictoires, collégiaux… L’instauration
de circuits différenciés de procédure, circuit court pour les affaires simples,
circuit approfondi pour les pourvois complexes, et circuit intermédiaire pour
les autres pourvois, avance et devrait être pleinement effective le 1er mars prochain.
Les deux chefs de Cour y voient un progrès majeur.
Le
parquet général souligne que l’avocat général rend des avis sur les pourvois, dans
l’intérêt de la loi et du bien commun. Tel un avocat de la Loi, indépendant, il
éclaire la Cour sur la portée de la décision. En conséquence, François Molins
propose que les textes législatifs et réglementaires en vigueur mentionnent explicitement
que les membres du parquet général ne relèvent pas de l’autorité du garde des
Sceaux. D’autre part, il préconise que la dénomination de « rapporteur public » soit associée à la fonction
d’avocat général lorsqu’il conclut devant les chambres de la Cour.
Invité
d’honneur de cette audience, Souheil Abboud, Premier président de la Cour de cassation
du Liban, également président de l’Association des hautes juridictions de
cassation des pays ayant en partage l’usage du français (AHJUCAF), assure voir en la Cour de cassation
française une source d’inspiration pour les cours suprêmes, et un modèle de
solidarité, d’entraide, de diversité et de tolérance. Dans son propre pays, actuellement,
la justice libanaise renforce son indépendance et lutte contre la corruption.
C2M