Dans un communiqué,
l’instance ordinale de la profession pointe les risques encourus par les
créateurs de contenus et explique comment ceux-ci peuvent faire valoir leurs
droits face au plagiat, ou, au contraire, face à une accusation de plagiat.
Alors que le Sénat a adopté
en première lecture la proposition de loi visant à réguler le secteur des
influenceurs, la Chambre nationale des commissaires de justice (CNCJ) a publié récemment
un communiqué rappelant que si les influenceurs ont des devoirs, ils ont aussi
des droits que « les commissaires de justice peuvent aider à protéger ».
L’occasion de revendiquer le rôle d’alliés de ces derniers aux côtés des
créateurs de contenus.
L’instance ordinale rappelle
que tout influenceur, qu’importe son domaine de prédilection ou son métier
(illustrateur, photographe, coach sportif, cuisiner, youtubeur, etc.), publie
des contenus qu'il a préalablement pris le soin d'imaginer, produire puis
poster. Or, l’article L.111-1 Code de la propriété intellectuelle prévoit que «
l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit, dès sa création, d’un droit de
propriété incorporelle exclusif et opposable à tous », et ce, quelles que
soient les créations : marques, dessins, photos, manuscrits, partitions, idées
de start-up, etc.
Le constat de propriété intellectuelle
pour protéger en amont ses créations
La loi prévoit une durée de
protection plus ou moins longue en fonction des créations de l’esprit, mais encore
faut-il pouvoir apporter la preuve qu’on en est bien le véritable créateur, notamment
pour faire valoir ses droits et prouver qu’on les a créées avant un tiers qui
nous accuserait de plagiat. La preuve de la paternité de l’œuvre est donc
« primordiale », souligne la CNCJ, et il convient pour cela d’apporter
la preuve de la date à laquelle on l’a créée : cependant, alors que la
solution est simple pour les œuvres devant être enregistrées à l’INPI (brevets,
marques, etc.) pour les autres (idées de start-up, identités graphiques d’un
site, patrons de couture, manuscrits, partitions, etc.), la difficulté vient de
la liberté de la preuve.
Comme aucun dispositif n’est
exigé, pour protéger efficacement sa création, la CNCJ recommande de recourir
au constat de propriété intellectuelle établi par un commissaire de justice
pour protéger en amont ses œuvres et créations de l’esprit. Concrètement, tout
auteur de travaux intellectuels ou d'œuvres artistiques peut en faire le dépôt
chez un commissaire de justice, qui va dresser procès-verbal de ce dépôt via un
constat de propriété intellectuelle. Ce dernier va indiquer la date de dépôt et
contient un descriptif de l'œuvre. Un exemplaire de ce PV est conservé au rang
des minutes de l’office avec un exemplaire de l’œuvre, et un exemplaire est
remis au déposant. Le commissaire de justice conserve cette preuve pendant 25 ans.
En cas de litige, le juge tiendra compte de l’antériorité de l'œuvre pour en
identifier le créateur grâce à la date de création ainsi que de son
originalité.
Le constat internet permet de
prouver un plagiat
Alors qu’Internet a amplifié
le phénomène de plagiat, les influenceurs sont évidemment exposés à la copie de
leurs textes, de leurs photos, voire de leur site Internet ou de leur compte
sur un réseau social. S’ils se retrouvent victimes de plagiat, les créateurs de
contenus doivent alors constituer des preuves avant toute action, et ce, le
plus rapidement possible : par exemple, face à des « stories »
éphémères sur Instagram qui ne restent visibles que 24h, il est « essentiel
d’agir très vite pour sécuriser le constat et “figer” les “stories” litigieuses »,
souligne la CNCJ.
Dans ces situations, l’instance
ordinale souligne l’intérêt du constat Internet. Ici, le commissaire de justice
dresse un procès-verbal dans lequel il va « photographier » ce qui est visible
sur Internet ou le réseau social, en intégrant des captures d’écran dans le
constat et en annexant tous les fichiers numériques nécessaires qui s’y
trouvent. Le constat dressé, les publications sont de fait sécurisées et les « stories »
enregistrées dans le procès-verbal. La preuve est alors sauvegardée et peu
importe si la publication est supprimée ensuite sur le réseau social, indique
la CNCJ. Autant de bons conseils à garder en tête, alors que plus de
150 000 influenceurs sont répertoriés en France, comme le rappelait France
Culture en février dernier.