En juillet
2020, le Conseil d’État avait ordonné au gouvernement d’agir pour améliorer la
qualité de l’air dans plusieurs zones en France, sous peine d’une astreinte de
10 millions d’euros par semestre de retard. Les mesures prises par l’État n’ont
pas été jugées suffisantes pour le Conseil d’État qui a condamné le
gouvernement, le 4 août dernier, à payer 10 millions d’euros.
Saisi par une association de défense de
l’environnement, le Conseil d’Etat avait ordonné au gouvernement, le 12 juillet
2017, de mettre en œuvre des plans pour réduire, dans le délai le plus court
possible, les concentrations de dioxyde d’azote (NO2) et de particules fines
(PM10) dans 13 zones en France, afin de se conformer aux exigences de la
directive européenne sur la qualité de l’air, qui fixe des valeurs limites à ne
pas dépasser pour ces concentrations.
Constatant, le 10 juillet 2020, que les
valeurs limites étaient toujours dépassées dans huit zones et que l’État
n’avait pas pris toutes les mesures permettant d’assurer l’exécution de la
décision du 12 juillet 2017, le Conseil d’État lui a ordonné de prendre les
mesures nécessaires dans un délai de six mois, sous peine, à l’expiration de ce
délai, de se voir infliger une astreinte de 10 millions d’euros par semestre de
retard.
Après avoir reçu les éléments transmis par le
gouvernement pour justifier son action ainsi que les observations des
associations requérantes, le Conseil d’État a tenu une audience publique le 12
juillet dernier. Il a rendu sa décision le 4 août.
Les seuils
limites de pollution de l’air sont toujours dépassés dans cinq zones
Par cette décision, le Conseil d’État
constate que, depuis sa décision de juillet 2020, les nouvelles données
transmises montrent que les seuils limites sont toujours dépassés dans
plusieurs zones et que des actions supplémentaires restent donc nécessaires. En
2019, 5 zones ont encore enregistré un taux de dioxyde d’azote supérieur aux
seuils limites (Paris, Lyon, Marseille-Aix, Toulouse et Grenoble) et une
concernant les particules fines (Paris).
Les données provisoires fournies par les
parties pour 2020 indiquent que les dépassements persistent pour Paris et Lyon,
et que les taux ne sont que légèrement inférieurs aux seuils limites pour les
trois autres zones, alors même que plusieurs sources de pollution, notamment la
circulation routière, ont été très fortement diminuées avec les mesures prises
pour faire face à la crise sanitaire.
Pas d’amélioration
de la qualité de l’air dans le délai le plus court possible
Le gouvernement a indiqué avoir pris
plusieurs mesures de réduction de la pollution de l’air depuis juillet 2020 :
lancement d’une procédure d’évaluation des politiques publiques en matière de
qualité de l’air, instauration de nouvelles zones à faible émission (ZFE) , encouragements
à la conversion du parc automobile national vers des véhicules moins polluants,
interdiction progressive des chaudières à gaz ou à fioul…
Si le Conseil d’État estime que ces mesures
devraient avoir des effets positifs sur la qualité de l’air, il relève que des
interrogations demeurent pour plusieurs d’entre elles sur leurs effets
concernant le retour sous les valeurs limites comme sur le délai de ce retour.
Le Conseil d’État relève en outre qu’aucun
nouveau plan de protection de l’air n’a été adopté pour les zones concernées,
alors que ces plans constituent aujourd’hui un outil connu et adapté pour
préciser les actions à mener et évaluer dans quel calendrier elles permettront
de repasser sous les valeurs limites.
Pour ces raisons, le Conseil d’État juge que,
malgré les mesures prises et en dépit d’une réelle amélioration de la situation
dans plusieurs régions en dépassement, les mesures prises par le gouvernement
ne sont pas suffisantes pour considérer que sa décision de 2017 est pleinement
exécutée.
10 millions
d’euros d’astreinte pour la période allant de janvier à juillet 2021
Le Conseil d’État condamne ainsi l’État au
paiement de l’astreinte pour le 1er semestre (11 janvier - 11 juillet 2021).
Compte tenu, à la fois, de la durée du dépassement des valeurs limites (depuis
2005 pour le PM10 et 2010 pour le NO2) mais aussi des mesures prises depuis
juillet 2020, le montant de l’astreinte n’est ni majoré ni minoré et est fixé à
10 millions d’euros, comme prévu par la décision du 10 juillet 2020.
L’astreinte sera donc répartie entre
l’association Les Amis de la Terre qui a saisi initialement le Conseil d’État
et plusieurs organismes et associations engagés dans la lutte contre la
pollution de l’air pour le surplus.
À l a suite de cette décision, le Conseil
d’État réexaminera début 2022 les actions du gouvernement pour la période de
juillet 2021 à janvier 2022 et, si elles ne sont pas toujours suffisantes,
pourra à nouveau ordonner le paiement d’une nouvelle astreinte de 10 millions
d’euros, qui pourra éventuellement être majorée ou minorée. Il pourra, à cette
occasion, maintenir ou modifier la répartition du produit de l’astreinte.