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Les experts-comptables présentent le baromètre 2020 de l’économie : la relance économique est-elle possible ?

Les experts-comptables présentent le baromètre 2020 de l’économie : la relance économique est-elle possible ?
Publié le 23/04/2021 à 09:53

Le Conseil national de l'Ordre des experts-comptables (CSOEC) a présenté, lors d’une conférence de presse, le 10 mars dernier, le premier baromètre 2020 de l’économie : « Image PME ». Une étude qui démontre l'impact de la crise sanitaire et ses conséquences sur l'activité des TPE-PME françaises sur l’ensemble de l’année 2020. Tous secteurs confondus, l’activité a reculé de 8,4 % en 2020 par rapport à l’année précédente. Quel rôle joue la profession dans la relance (espérée) de l’économie ?

 


Image PME est le baromètre de la profession remis en service récemment par le CSOEC. Début mars, les experts-comptables étaient fiers de présenter le premier baromètre de l'économie 2020. À ce jour, le Conseil national est la seule institution, en France, à pouvoir présenter cette analyse précise sur l'état de l'économie de notre pays. L’institution s’est d’ailleurs engagée à publier régulièrement d’autres baromètres de l’économie.

Cette étude, basée sur les chiffres produits par plus de 500 000 entreprises françaises (qui réalisent entre 20 000 et 50 millions d’euros de chiffre d’affaires), illustre l'impact de la crise sanitaire, du confinement et des mesures de restriction sur les TPE-PME françaises.

Comme le précise le document, les données proviennent de la base de données Statexpert, construite à partir des télédéclarations sociales et fiscales réalisées par les experts-comptables pour le compte de leurs clients. Les données présentées sont issues des informations provenant des déclarations mensuelles et trimestrielles de TVA (EDI-TVA). Il s'agit du chiffre d'affaires (CA) déclaré par les entreprises sur les déclarations de TVA des périodes concernées.

 

UNE ANNÉE FORTEMENT MARQUÉE PAR LA CRISE

Selon le président de l’Ordre des experts-comptables, Lionel Canesi, malgré la crise, les entreprises ont fait preuve de résilience en 2020 : « il y a une forme de résilience, d’agilité des TPE-PME… les entreprises sont en capacité de réagir et de s’adapter » a-t-il souligné lors de son intervention.

Il reste que les chiffres sont là. Comme le révèle l'indice de chiffre d'affaires cumulé (ICAC), l'activité, tous secteurs confondus, a reculé de 8,4 % en 2020 par rapport à 2019.

Cette baisse s’est amorcée dès le 1er trimestre 2020 (indice de chiffre d'affaires - ICA à 94,4, soit une baisse de 5,6 %), c’est-à-dire avec le premier confinement mi-mars. Le chiffre d'affaires des TPE-PME s'est effondré lors du second trimestre, perdant plus de 20 % par rapport au même trimestre 2019. Le mois d'avril a été celui du plus fort recul (environ -35 %). La levée (partielle) des mesures de restriction en mai 2020 a permis à l'activité de moins décliner lors du troisième trimestre (-1 %). Au 4e trimestre, le CA a diminué de 5,6 %, résultat d'un bon mois d'octobre, d'une baisse conséquente en novembre avec le deuxième confinement, et d'une légère baisse en décembre.

Bien entendu, ces résultats généraux masquent des disparités en termes géographique, mais surtout sectoriel.

 

DES DISPARITÉS RÉGIONALES

Dans toutes les régions de France, les TPE-PME ont enregistré de fortes baisses de CA en 2020. Cependant, toutes n’ont pas été atteintes de la même façon.

La Réunion est celle qui a le mieux résisté sur l'ensemble de l'année (-4,7 % en chiffre d'affaires cumulé). Les entreprises de la moitié ouest de la France semblent aussi avoir légèrement moins souffert que les autres : -5,6 % en Bretagne, -6,2 % pour les Pays de la Loire, -6,3 % pour la Normandie, -7 % pour les Hauts-de-France, -7,1 % pour la Nouvelle-Aquitaine et l'Occitanie.

Les entreprises du Centre-Val de Loire, d'Auvergne-Rhône-Alpes, de Bourgogne-Franche-Comté, de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du Grand Est ont elles enregistré des chutes d'activité comprises entre 7,4 % et 8,7 %.

Enfin, les TPE-PME d'Île-de-France (-13,1 %) et de Corse (-14,1 %) sont celles qui ont le plus souffert, comparativement à 2019.




 

DES DISPARITÉS SELON LES SECTEURS

Les inégalités ne sont pas seulement régionales. En effet, certains secteurs ont subi de lourdes pertes tandis que d’autres s’en sont plutôt bien sortis. Les secteurs dits « non-essentiels » ont été le plus fortement affectés.

 

Les secteurs les plus affectés en 2020

Les magasins de vêtements

Les magasins de vêtements ont fortement souffert, perdant plus de 20 % de CA comparativement à l'année 2019. Le 2e trimestre (notamment le mois d'avril) a été le plus difficile, avec une baisse de l'ICA de plus de 40 %. Le 3e trimestre a cependant vu l'activité rebondir (+1,9 %). Lors du dernier trimestre, le secteur a accusé une perte de près de 20 % de chiffre d’affaires (cf. forte baisse en novembre en lien avec le reconfinement).

La coiffure

Les salons de coiffure ont perdu plus de 20 % de CA par rapport à 2019, avec notamment une perte de plus de 30 % lors du 2e trimestre. Globalement, l'activité a été en dents de scie au gré des confinements et des mesures de restriction : chute en mars et avril et rebond en mai par exemple. Les entreprises du secteur ont vu leur chiffre d’affaires s'écrouler en novembre avec le deuxième confinement, puis rebondir en décembre.

 

Restauration traditionnelle

Les TPE-PME de la restauration traditionnelle font partie des secteurs les plus touchés. Elles ont perdu plus de 38 % de CA en cumulé sur l'année 2020. Dès le 1er trimestre, l’activité a diminué de 22,5 %, puis elle s'est écroulée lors du 2e trimestre (-68,5 %). L’activité s’est un peu relevée au 3e trimestre (-6 %), mais la fin d'année a été presque aussi difficile que le second trimestre : chute de plus de 60 % du chiffre d’affaires.

 

L’hôtellerie

Selon le rapport, les hôtels ont encore plus souffert que leurs homologues de la restauration. La perte cumulée sur l'année atteint en effet les 45 %. Les hôtels ont vu leur activité chuter de plus de 75 % lors du second trimestre, et de près de 60 % lors du 4e trimestre.

 

Les transports et entreposage

Les TPE-PME des transports et de l'entreposage ont vu leur activité chuter de plus de 8 % en 2020. Comme les autres, elles ont particulièrement souffert lors du 2e trimestre, avec une perte de plus de 22 %. Cette baisse a heureusement diminué lors du 3e trimestre (-8,5 %) puis du 4e trimestre (-1,9 %).

Mais « il n’y a pas que des secteurs qui sont en forte baisse » s’est réjoui Lionel Canesi. 

 

Les secteurs ayant le mieux résisté en 2020

Les travaux de maçonnerie générale et gros œuvre de bâtiment

Les TPE-PME de la maçonnerie affichent certes un bilan annuel en recul par rapport à l'année précédente (-3,8 %) – elles ont notamment largement souffert lors du 2e trimestre (-19,6 %) –, mais elles ont relevé la tête dès le 3e trimestre avec une progression de 1,4 % du chiffre d’affaires, qui s'est accélérée lors du 4e trimestre (+5,7 %).

Services d'aménagement paysager

Les TPE-PME des services d'aménagement paysager sont parvenues à afficher une progression d'activité en cumul sur l'année (+2,2 % par rapport à 2019). Même si elles ont souffert au second trimestre avec une baisse de 8,1 % de chiffre d’affaires, elles se sont relevées lors du 3e trimestre (+3,1 %) et ont même enregistré une belle performance lors du 4e trimestre (+10,7 %).

Bref, contrairement à ce qui était prévu, il n’y a pas vraiment eu de défaillances massives à la fin de l’année 2020. « Pourquoi cela arriverait maintenant ? » s’est interrogé le président du CSOEC.

 

LE RÔLE ESSENTIEL DES EXPERTS-COMPTABLES DANS LA RELANCE DE L’ÉCONOMIE

Lors de son allocution, Lionel Canesi s’est décrit lui-même comme un « optimiste lucide ». Comme il l’a rappelé, les experts-comptables sont en effet des économistes du quotidien, de la vie réelle : « c'est précisément pour cette raison que je considère que la situation économique telle qu'on la connaît aujourd'hui laisse entrevoir un redémarrage possible ». Son optimisme se base donc sur des faits réels.

En revanche, « il manque juste une petite étincelle si on veut mettre le feu à la relance économique de notre pays » a-t-il ajouté.

Selon lui, il faut trois conditions pour que la relance advienne : il faut un plan de relance massif, une campagne de vaccination qui fonctionne (même sur les variants) et « un choc de consommation ».

Ce dernier point est primordial pour le président de la CSOEC. Dans les 50 propositions pour la relance rapide de l’économie (présentées en janvier 2021), la profession a d’ailleurs proposé trois mesures parmi elles pour provoquer ce « choc de consommation ».

Il faut donner la possibilité aux parents, grands-parents de donner à leurs enfants, petits-enfants – et, en parallèle, aux oncles et tantes pour leur neveu ou leur nièce quand ils n’ont pas d’enfants – une somme de 50 000 euros sans droits et sans conditions. Le bénéficiaire pourra alors consommer et donc participer à la relance de la consommation.

Placer son argent aujourd’hui ne rapporte en effet rien à personne, les taux d’intérêt étant très bas, a précisé Lionel Canesi.

Une autre proposition consiste à « désépargner l’épargne salariale » sans conditions.

Enfin, les experts-comptables proposent, concernant l’assurance-vie, la possibilité de retirer 50 000 euros sans droits et sans conditions encore une fois.

Pour Lionel Canesi, il est également essentiel que les Français prennent « à bras le corps le patriotisme économique », c’est-à-dire qu’ils consomment français afin que notre économie reparte.

Quand on achète sur une plateforme Internet des produits qui viennent de loin par exemple, a-t-il expliqué, on gagne certes quelques euros, mais cet l'argent va irriguer l'économie d’un autre pays.En revanche, si l’on paie un peu plus cher en allant chez les petits commerçants locaux, que l’on achète français ou européen, cela va irriguer nos circuits économiques et donc sauver nos emplois.

Enfin, une des mesures phares des 50 propositions des experts-comptables consiste à « identifier la dette Covid ». Les entreprises sont-elles capables de rembourser cette dette Covid avec leurs bénéfices ? Si elles en sont incapables, elles ne vont plus investir et donc il n’y aura pas de relance.

Les experts-comptables souhaitent par conséquent qu’on puisse étaler les dettes – jusqu’à 10 ans – aux entreprises qui sont viables, mais qui, à cause du remboursement de ces dettes, sont en difficulté. Ces dettes ne sont en effet pas le résultat d’une mauvaise gestion de la part des dirigeants, mais d’une crise qu’ils n’ont pas prévue. Il faut donc leur permettre de rembourser sur un temps beaucoup plus long pour qu’ils soient capables d’investir dans les prochaines années dans notre économie.

« Ça coûtera beaucoup moins cher à l'État de sauver ces entreprises, plutôt que d'avoir des dépôts de bilan et une crise sociale importante derrière » a certifié Lionel Canesi.

En outre, pour celles qui ne peuvent vraiment rien rembourser, les experts-comptables proposent d’exonérer ces sociétés d’une partie des PGE.

Les experts-comptables ont en tout cas un rôle essentiel à jouer dans cet accompagnement auprès des petites entreprises et de lien avec le gouvernement, a conclu le président du CSOEC.

 

Maria-Angélica Bailly

 

 

 

 

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