Droits des générations
futures, implantations d’éoliennes ou encore espèces protégées, la Revue Justice & Cassation de
cette année, consacrée à l'environnement, parcourt un champ multidimensionnel. Preuve que le droit « se saisit des enjeux environnementaux », comme l'a souligné François Guy Trébulle, auteur des conclusions de ce travail présenté jeudi 28 novembre.
Une édition très « verte ».
Le 28 novembre dernier, Thomas Lyon-Caen, président des avocats au Conseil
d'état et à la Cour de cassation, a présenté le vingtième numéro de la revue
Justice & cassation, consacré au thème de l'environnement et paru le 3
octobre dernier, dont il a par ailleurs rédigé l'édito. Ce, en présence des auteurs
et avec le concours du professeur François Guy Trébulle, auteur des conclusions
de ce travail collectif et professeur à l'école de droit de la Sorbonne.
Chaque année, l’Ordre des
avocats aux conseils publie en effet, aux éditions Dalloz, une revue porteuse d’un
dossier thématique offrant, « à travers un ensemble d’articles écrits
par des membres du Conseil d’État, des magistrats de la Cour de cassation, des
professeurs de droit et des avocats aux conseils, un regard transversal sur des
notions centrales du droit » et présentant une sélection de décisions
des Cours suprêmes ayant marqué l’année écoulée, éclairées par des conclusions
de rapporteurs publics, des rapports et des avis d’avocats généraux.
Parmi les sujets abordés
cette année, le devoir de vigilance environnementale des entreprises, le contentieux
climatique, les droits des générations futures ou encore l’éolien étaient au cœur
du vaste panorama couvert par ce nouveau cru.
« Le droit de l'environnement se déploie partout »
Pour Thomas Lyon-Caen, les coauteurs ont tenté « de saisir le
phénomène de verdissement du droit ». Un thème quotidien extrêmement
porteur qui « ignore les frontières entre le droit public, le droit privé,
le droit pénal », note-t-il.
François Guy Trébulle observe une triple crise
environnementale qui cumule le réchauffement climatique, la pollution et la
perte de biodiversité. Le droit « se saisit des enjeux
environnementaux », constate-t-il,
et compte au nombre des moyens de lutte contre cette crise protéiforme. « Le
droit de l'environnement n'est pas d'ici. Il se déploie partout, dans tous les
pays, dans toutes les matières et il est une matière sensible au dialogue des
juges et, par-delà le dialogue des juges, au dialogue des droits. »
Cette matière, en plus de la
connaissance juridique, fait appel à la physique, la chimie, la climatologie,
la biologie, la médecine, la géographie, la sociologie, et bien d’autres
domaines. Elle amène à considérer des risques identifiés, d’autres soupçonnés
qu’il faut prévenir. Les dommages peuvent concerner les hommes, les animaux, la
nature, ou encore ses ressources. Le professeur en déduit que « l'environnement
est porteur de menaces existentielles pour tous les intérêts
envisageables ».
François Guy Trébulle et Thomas
Lyon-Caen
La nature connait des
frontières aux interactions complexes. Elles entrainent des questions
juridiques, pour la plupart, assez récentes. Cela nécessite parfois la mise en
place de nouveaux outils pour assurer une forme d'harmonie entre l'homme et son
environnement.
Notre quête vertueuse conduit
à des transformations, notamment de l'entreprise, à des obligations. « Être
une entreprise aujourd'hui n'est plus la même chose que ce que cela signifiait
hier », remarque le professeur. Le contrat aussi évolue, il s’adapte aux
enjeux maintenant compris, liés à l’environnement.
Carence de l'Etat
Les affaires citées dans la
revue rappellent la carence de l'État en matière de climat. La durabilité
interroge sur la manière de conduire les institutions publiques, les sociétés
et leurs activités. Pour François Guy Trébulle, elle nous suggère « l'obligation
de moyens placés dans une dynamique spatiale, une dynamique temporelle, une
dynamique de performance ».
La principale leçon de la
jurisprudence administrative sur le sujet est formulée par une exigence de
cohérence. « Pourquoi l'État est-il condamné ? […] Parce qu'il n'est
pas cohérent entre ce qu'il a dit et, finalement, ce qui n'est pas fait »,
retient le professeur avant de conclure par un triptyque chronologique sur
l’environnement.
Tandis que le passé a des conséquences
considérables et implique des responsabilités, le présent demande à chacun
de faire preuve de vigilance dans son comportement pour ne pas hypothéquer
l’avenir, résume François Guy Trébulle. Quant au futur, il doit déployer le principe de prévention pour se saisir des
risques avant qu’ils ne se réalisent et préserver les générations suivantes.