Le parquet français est-il en crise ? « Oui », affirme
l’inspection générale de la justice (IGJ) dans un rapport baptisé « Mission sur l’attractivité des fonctions de magistrat
du ministère public », rendu le 20 décembre dernier à la garde
des Sceaux, Nicole Belloubet. Ce document fait état du malaise profond dont
souffre le ministère public en France, et qui se traduit par une fuite des
magistrats du parquet vers le siège. « Ce
rapport précis, motivé, documenté et sans concession montre que la crise
d’identité du ministère public est profonde et que nous n’exagérions pas », avait déclaré à l’époque Éric Mathais, président de
la Conférence nationale des procureurs de la République (CNPR) à l’AFP. Après
10 ans de fonction en effet, 55 % des procureurs quittent leur poste et 64 %
après 15 ans. En cause : surcharge de travail, horaires interminables,
encombrement des tribunaux, multiplication des missions, etc. Ainsi, le taux de
vacances des postes est préoccupant. Actuellement, 175 magistrats supplémentaires
seraient nécessaires pour assurer le bon fonctionnement de la justice indique
le rapport de l’IGJ.
À la tête du parquet de Nanterre depuis quatre ans,
Catherine Denis n’a pas manqué de rappeler, lors de l’audience solennelle de
rentrée du TGI de Nanterre, ce contexte dramatique, en dénonçant « le sous-effectif chronique » dont souffre le parquet. Fermement, elle a appelé la
Chancellerie à agir et à prendre des mesures. « Le temps de la réflexion est largement dépassé et il
convient d’entrer dans celui de l’action », a-t-elle vigoureusement déclaré. Même constat du côté de la présidente
du TGI, Catherine Pautrat, qui a pointé du doigt dans son discours la
diminution « de nos capacités de jugement », dont une des causes principales est la vacance des
postes, et ce, dans un contexte où l’activité, notamment pénale, a augmenté en
2018. Malgré tout, « le TGI de Nanterre ne se laissera pas
aller aux plaintes ou aux larmes, car il est important d’aller de l’avant
quelles que soient les difficultés et les exigences », a-t-elle promis d’un ton décidé. Un état d’esprit
opportun, alors que l’année 2019 s’annonce chargée « avec l’entrée en application progressive de la réforme
structurelle de l’institution judiciaire ».
Maria-Angélica Bailly