Thierry Bernard, président du Cercle des
stratèges disparus, a accueilli Valérie Bouillon-Delporte, « Strategic hydrogen leader » chez Michelin et présidente d’Hydrogène
Europe. La conférencière a exposé tout l’intérêt des moteurs électriques à pile
à hydrogène et la position de l’industrie française sur ce secteur au potentiel
prometteur.
Michelin se
fixe pour mission de transporter durablement les individus et les biens.
L’électrification des véhicules appartient à ses convictions et l’hydrogène y
occupe une place d’avenir. Hydrogène Europe s’inscrit dans un partenariat
public-privé avec la commission européenne, c’est un joint undertaking.
Valérie Bouillon-Delporte préside l’association des industriels de l’hydrogène
en Europe au nom de Michelin. La vision d’Hydrogène Europe est orientée vers
une société zéro émission grâce à l’hydrogène. Peut-être êtes-vous déjà montés
dans une voiture hydrogène sans le savoir ? À Paris, les taxis hype ont
des moteurs électriques à hydrogènes. La grande majorité des véhicules électriques
actuels ont une source d’énergie stockée dans des batteries qui présentent deux
inconvénients : faible autonomie, temps de recharge long.
Aujourd’hui, 23 % des émissions de CO2 dans le monde sont imputables aux transports, qui fonctionnent encore aux
énergies fossiles à 95 %. Elles impactent le réchauffement climatique et
Bruxelles impose une réglementation qui tend vers l’électrification des
véhicules. Mais le changement de paradigme prendra du temps et de l’argent.
Atteindre les objectifs d’émission de CO2 commande notre politique, qui ne peut pas se contenter de la
technologie des batteries. Pollution
et qualité de l’air apparaissent maintenant parmi les préoccupations majeures
des concitoyens. En 2050, trois terriens sur quatre vivront en ville. Symptôme
de cette ère naissante, chaque jour dans le monde, des villes apportent leur
lot d’interdictions contre les véhicules thermiques. Du reste, tous les
constructeurs ont une perspective qui planifie la fin de leur production et de
leur distribution. En France, en juin dernier, Nicolas Hulot annonçait les
dernières ventes de voitures dotées d’un moteur à carburant en 2040.
La pile à
hydrogène stock de l’hydrogène, et par
réaction avec l’oxygène de l’air, produit suffisamment d’électricité pour faire
avancer un véhicule. Elle émet de l’eau distillée. Indépendamment de la
mobilité, l’hydrogène apparaît comme le vecteur de stockage d’énergie
renouvelable le plus flexible. Pour respecter la feuille de route énergétique
de l’Union européenne, les applications de l’hydrogène vont se répandre :
bâtiment, industrie, mobilité.
En Europe, le clim energy package travaille sur tout ce qui
concerne la réglementation énergétique et sur la façon d’atteindre 32 %
d’énergie renouvelable dans la production d’électricité. Le mobility package
tend à faire baisser les émissions de CO2 des voitures et des camions. De nos jours, l’hydrogène est fabriqué en
craquant du gaz naturel. Il vient d’énergie fossile à 90 %. Les processus
industriels en génèrent des quantités qui ne sont pas valorisées jusqu’à
présent. L’hydrogène vert, par électrolyse à partir d’énergie renouvelable,
commence à apparaître. L’Union européenne veut arriver à une production
totalement propre en 2050.
Culturellement, l’hydrogène fait peur. Il évoque l’explosion. Pourtant,
le réservoir d’essence d’une voiture classique est une bombe latente, mais
personne n’y songe. L’automobile à hydrogène répond à une série de tests et de
contrôle de sécurité qui la rende tout à fait sûre. Quant au prix, qu’il
s’agisse de la fabrication ou de la consommation, ils s’annoncent équivalents à
ceux de la voiture thermique, lorsque la production aura atteint les mêmes
volumes. Le temps de recharge varie de 3 à
5 minutes, c’est-à-dire qu’il est similaire à celui d’un plein classique.
L’autonomie actuelle autorise 500 à
600 kilomètres. Bus, train, camion, plus le véhicule est lourd, plus les
batteries encombrent, et plus le choix de l’hydrogène a du sens.
En France, les stations de recharge en gaz sont en phase de déploiement
pour répondre aux besoins des flottes professionnelles dans un premier temps.
En effet, notre pays a mis en place une stratégie de cluster pour cette
population qui permet, avec la participation des régions, d’étendre un réseau
d’infrastructures moins dense et donc moins cher. Ce maillage sert de base au
plan national présenté le 1er juin dernier. Celui-ci prévoit
une centaine de stations hydrogène et environ 5 000 véhicules
professionnels en 2023. Cette échelle permettra de passer à une phase de
massification de la technologie pour proposer 400 à 1 000 stations en 2028 pour un
parc d’au moins 30 000 véhicules.
En 2024, les véhicules à hydrogène auront leur catégorie aux
24 heures du Mans.
C2M