Les inflations, en choisissant le pluriel
pour le titre de ce stimulant opus collectif de la Revue d’économie
financière, n°153, les directeurs de publications Hans Helmut Kotz* et
Jean-Paul Pollin** soulignent le point commun des réflexions des contributeurs
de l’ouvrage : l’inflation, comme son surprenant retour, est loin de se
résumer à un phénomène univoque.
En effet, ce qui, de ces
analyses, parait le plus dominant reste, à la fois, l’hétérogénéité des
« Histoires d’inflations », et les différences entre les pays et les
catégories de revenus. La dispersion des situations des États membres est une autre
manifestation de la multiplicité du problème (l’écart type de l’inflation
sous-jacente passant de 1,7 en moyenne historique à 6,5 en 2023 !).
L’inflation ainsi que les
discussions sur ses origines reste un sujet récurrent qui continue d’entretenir
de nombreuses polémiques entre les économistes les plus éminents. Cette
nouvelle parution de la REF apporte de précieux éclairages en quatre
chapitres particulièrement documentés.
Après un rappel du contexte
historique et des différences entre les pays de l’Union monétaire européenne,
les États-Unis, et les économies émergentes, sont exposées les raisons du
retour de l’inflation d’un point de vue analytique. Aux termes de leurs thèses,
les auteurs ouvrent des perspectives sur des politiques à mettre en œuvre pour
revenir à la stabilité des prix. Ce qui demeure le principal objectif des
banques centrales.
« […] Rares sont ceux qui ont
vu revenir l’inflation : la hausse soudaine et brutale des niveaux de prix
dans le monde entier a été sous-estimée tant par les intervenants de marché,
les analystes, que les banques centrales elles-mêmes ». Les
experts, de leur côté, continuent à débattre sur le caractère transitoire ou
permanent de la situation comme sur ses causes profondes : demande, offre,
changements structurels ?
En revanche, pour tout le
monde, apparait comme inexorable – eu égard aux tensions géopolitiques, comme à
l'ampleur que prennent les sujets liés à la sécurité nationale, à la transition
verte et numérique – une tendance lourde vers une inflation sous-jacente
plus élevée.
Avec une prolongation de la
crise du coût de la vie et des coûts politico-économiques qui l’accompagnent et
bien qu’il s’agisse d’un phénomène monétaire, l’inflation est : « un
symptôme de difficultés économiques, sociales et politiques réelles. »
(Toblin 1987). Une évolution que Pascal Blanqué*** a qualifiée de son côté de «
changement de régime ».
Jean-Louis
Chambon
Président d’honneur du Prix Turgot
* Hans Helmut Kotz :
Harvard University, resident fellow
** Jean-Paul Pollin : Professeur émérite université d’Orléans
*** Pascal Blanqué : Les aventures de l’inflation, Calmann Lévy
2024