Comme chaque année,
l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) a dévoilé son palmarès
des déposants de brevets. L’édition 2017 place ainsi Valeo, PS et Safran sur le
podium – avec plus de mille demandes de brevets déposés à l’INPI pour les deux
premiers. Pour la première fois, deux entreprises de taille intermédiaire –
Parrot SA et le Groupe Soitec –
atteignent le Top 50. Concernant les domaines, la mécanique, l’électronique et
la chimie demeurent largement représentée et le recherche publique est toujours
aussi présente. Cette étude souligne ainsi une volonté de protection accrue de
la part des organismes publics, mais aussi de la part d’entreprises plus
petites.
Le nombre de demandes de brevets déposés auprès de l’INPI s’élève à 16 250 en 2017, soit une augmentation de 0,6 % par rapport à 2016. Parallèlement, l’Institut a reçu 90 500 demandes de marques (+2,3 % par rapport à 2016) et 6 000 demandes de dessins et modèles (-7,7 % vs 2016).
« Le nombre de brevets déposés constitue un indicateur de l’effort
d’innovation de l’entreprise (budget alloué à la R&D, inventions de
salariés reconnues…) », souligne l’Observatoire de la propriété
intellectuelle.
« Le palmarès 2017 le
confirme : les grands acteurs de l’industrie et de la recherche française
sont convaincus de la nécessité de protéger leur capital immatériel, élément
essentiel de la valeur de l’entreprise, commente Romain Soubeyran, directeur général
de l’INPI. Et je me réjouis de voir pour la première fois dans ce palmarès
deux entreprises de taille intermédiaire, dont l’une a été lauréate des
Trophées INPI il y a 10 ans – un
prix qui récompense les entreprises innovantes ayant une solide stratégie de
propriété industrielle. » poursuit-il.
Le Top 4 inchangé
En 2017, les quatre
premières places du palmarès restent inchangées par rapport à 2016.
Valeo et PSA, les deux premiers du
palmarès, repassent l’un et l’autre au-dessus de la barre des 1 000 demandes publiées sur une année, ce qui n’avait plus été
le cas en 2016.
Le Groupe Valeo reste à la première place avec 1 110 demandes de brevets
publiées (contre 994 en
2016). Le Groupe PSA (consolidé incluant Faurecia) est au deuxième rang,
passant de 930 demandes
publiées en 2016 à 1 021en 2017. La troisième
place est occupée par Safran avec 795 demandes publiées (758 demandes publiées en 2016).
Le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies
alternatives (CEA) conserve la quatrième place avec le même nombre de demandes
publiées qu’en 2016 :
684.
Deux
entreprises de taille intermédiaire pour la première fois dans le classement
Pour la toute première fois, deux entreprises de
taille intermédiaire (ETI) figurent simultanément parmi les cinquante premiers déposants de
brevets à l’INPI : il s’agit de Parrot SA à la 38e place, et du
Groupe Soitec, à la 46e place.
« La présence de ces deux ETI est un signe que
les entrepreneurs français intègrent de plus en plus cette dimension
stratégique de la propriété industrielle dans leur développement », déclare Romain Soubeyran.
Parrot SA, qui avait été Lauréat des Trophées de
l’innovation INPI dans la catégorie « Brevets » en 2007, est
présent dans le palmarès avec trente six demandes publiées.
Soitec, avec trente et une demandes publiées,
revient dans le Top 50 après
6 années d’absence.
Les
évolutions les plus marquantes
Des changements de stratégies de propriété
industrielle semblent se dessiner avec des hausses et des baisses de demandes
de brevets significatives parmi les vingt premiers déposants. Les plus fortes progressions
sont Alstom, qui passe de la 30e à la 20e place (101 demandes publiées en 2017 contre 48 en 2016, +110 %), le Groupe
STMicroelectronics, de la 16e à la 14e place (+19 %), Michelin, de la 11e
à la 8e place (+15 %), le Groupe Valeo, qui reste en 1re place mais avec un nombre
de demandes de brevets qui augmente de +12 %, et le Groupe Saint-Gobain, qui passe de la 18e
à la 17e place (+11 %).
Toujours parmi les vingt premiers déposants, les
baisses les plus importantes en 2017 concernent Orange (-26 %), qui passe de la 10e
à la 12e place, L’Oréal (-26%), de la 8e à la 9e, le
Groupe Renault (-21 %),
de la 5e à la 6e, et Thales, (-15 %) de la 9e à
la 10e.
Les
principaux domaines technologiques
Tous les secteurs industriels français d’importance, comme l’automobile,
la cosmétique, l’aéronautique, les télécommunications, l’électronique, la chimie et
l’énergie, sont présents dans ce palmarès.
La mécanique est le principal domaine technologique d’innovation des
entreprises françaises du palmarès 2017. Elle représente 45 % des demandes de brevets.
Le domaine de l’électronique/électricité est le 2e secteur
dans lequel la France a déposé le plus de demandes de brevets en 2017 (26 %).
Troisième secteur dans lequel les entreprises françaises sont les plus
dynamiques : la chimie, avec 19 % des
demandes de brevets, en légère progression (0,4 %).
La recherche
publique toujours aussi présente
Les organismes publics sont de plus en plus présents
dans le palmarès des grands déposants : au nombre de 10 en 2015, ils sont treize cette année, comme en
2016. « Je suis frappé par la présence croissante des organismes
publics dans ce palmarès, ce qui montre que la sécurisation des activités
d’innovation est déterminante dans tous les secteurs, dans un environnement
mondialisé qui se réinvente de plus en plus vite. » souligne Romain
Soubeyran.
Parmi les vingt premiers déposants, le Commissariat à l’énergie atomique
et aux énergies alternatives conserve son 4e rang (avec toujours 684 demandes publiées), le CNRS gagne une place, en se classant 5e
(405 demandes publiées en 2017 contre 373 en 2016) et IFP Energies nouvelles conserve sa
13e place (175 demandes publiées).
Les nouveaux entrants (Université de Montpellier, SNCF, Sorbonne
Université et le Groupe Nexter) se classent respectivement aux rangs 35, 44, 45 et 46.
« La recherche publique est active, précise
l’Observatoire. Souvent ces organismes effectuent des codépôts avec des
entreprises privées. La recherche publique en France est partie prenante du
tissu économique et industriel », souligne l’Observatoire.
Une
concentration significative du nombre de demandes de brevets publiées
Concernant la concentration du nombre de demandes de
brevets publiées, la tendance de ces dernières années se confirme : la
concentration est de plus en plus forte. Alors qu’en 2007, ils représentaient
42 % des
demandes publiées, les cinquante premiers déposants représentent 48,8 % des demandes publiées en
2017.
Cette progression est portée uniquement par
les vingt premiers déposants : en 2017, ces derniers représentent 41 % des
demandes de brevets publiées, contre un tiers (33,4 %) en 2007. Ce phénomène
s’explique en partie par une concentration de plus en plus importante des
entreprises elles-mêmes, accentuée ces dernières années par des rachats et des
fusions.
L’Observatoire de la propriété intellectuelle commente
son palmarès
à quoi sert concrètement un dépôt à l’INPI ?
En déposant votre brevet à l’INPI, vous obtenez, en France, un monopole
d’exploitation pour une durée maximale de vingt ans. Vous êtes ainsi le seul à pouvoir l’utiliser et vous pouvez
interdire toute utilisation, fabrication, importation, etc., de votre invention
effectuée sans votre autorisation. Les brevets peuvent par ailleurs avoir un
effet bénéfique et accélérateur, en facilitant la recherche de financement
notamment : au moment de se présenter devant des investisseurs, un titre
de propriété industrielle ou un dépôt en cours crédibilise l’innovation et
donne une vraie valeur à l’activité. Une étude menée par des chercheurs de la Harvard
Business School et la Stern School of Business montre par exemple
que les start-up des technologies de l’information multiplient par deux leurs
chances de réussir leur levée de fonds si elles ont un brevet*.
En cas de développement à l’international, les brevets facilitent aussi
la recherche d’un partenaire local, industriel ou financier, pour s’attaquer à
un marché lointain. Plus qu’une arme anti-contrefaçon, le brevet peut être un
levier de développement pour l’entreprise : aide aux levées de fonds,
facilitation du développement à l’international, augmentation du pouvoir de
négociation, création de ressources financières complémentaires via des
licences etc.
Les quatre premières entreprises du palmarès 2017 restent inchangées par rapport à 2016. Cela vous apparaît-il
normal ?
Rappelons qu’il y avait eu un grand changement dans le palmarès l’an
dernier : Valeo était passé du troisième rang à la tête du classement des
plus grands déposants de brevets en France. L’équipementier automobile confirme
cette année sa pôle position, avec 1 110 brevets (+11,7 %).
Le groupe PSA, qui est donc passé second l’an dernier après dix ans en tête du classement, repasse cette année la barre symbolique des
mille brevets.
Le brevet protège une innovation technique, c’est-à-dire un produit ou
un procédé qui apporte une nouvelle solution technique à un problème technique
donné : l’innovation technique a un temps de maturation qui peut être lent
et il semble en effet normal qu’il n’y ait pas de gros changement chaque année,
car la R&D s’inscrit dans un temps long.
Pour la première fois, deux entreprises de
taille intermédiaire sont présentes dans le TOP 50. Comment expliquez-vous
cette nouveauté ? Qu’est-ce que cela révèle ?
La présence de ces deux entreprises de taille intermédiaire, dont l’une
(Parrot) a été lauréate des Trophées INPI il y a dix ans – un prix qui
récompense les entreprises innovantes ayant une solide stratégie de propriété
industrielle – est un signe encourageant : cela signifie que les
entrepreneurs français intègrent de plus en plus cette dimension stratégique de
la propriété industrielle dans leur développement et qu’ils ne la voient plus
comme un coût mais plutôt comme un investissement. C’est un mouvement de fond
que l’INPI accompagne depuis des années, par sa politique de soutien. Les aides
de l’INPI peuvent être financières (réduction de 50 % sur ses principales
redevances de procédure et de maintien en vigueur des brevets) ou consister en
une prestation de service, comme le « Prédiagnostic Propriété
Industrielle » : gratuit pour l’entreprise et adapté à ses
spécificités, il permet de donner un éclairage sur les acteurs, les risques et
les coûts de propriété industrielle et de dégager des pistes d’action pour la
mise en œuvre d’une politique de propriété industrielle au sein de
l’entreprise.
Propos
recueillis par Constance Périn