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Le Cercle Turgot décrit l’avenir de la banque

Le Cercle Turgot décrit l’avenir de la banque
Publié le 11/11/2018 à 09:30

Jean-Bernard Mateu, directeur des services financiers mobiles Europe et France d’Orange, et Olivier Klein, directeur général de la BRED, ont coécrit l’ouvrage « Les banques face à leur avenir proche », qui regroupe pas moins de 21 collaborations. Ensemble, les auteurs ont décrit le 25 septembre dernier, les métamorphoses de la banque et le futur métier qui prend forme peu à peu.




Jean-Bernard Mateu pose la question : « Que vient donc faire Orange dans l’univers impitoyable de la banque ? » Depuis trente ans, les marges ont diminué en raison d’une concurrence accrue et d’une réglementation consumériste galopante. Le passage à l’euro, par exemple, a effacé le marché profitable des commissions de change entre européens. Conjointement à la baisse des recettes, les coûts ont augmenté, pour se conformer à la réglementation (reporting, sécurité, traçabilité, etc.). Afin de s’adapter, des économies ont été réalisées. Seul le coût du réseau d’agences continue à croître alors que paradoxalement, les clients n’y vont plus.


En effet, les usages changent. En une dizaine d’années, les banques numériques avec une interface sur téléphone mobile sont apparues. Elles proposent des services immédiats, performants, que les clients utilisent sans aide. Avant cela, dans les années 90, tout avait été fait pour sortir les clients des agences. Leur format était changé, avec des automates, des présentoirs de prospectus, une frontière physique entre l’accueil du public et les conseillers de l’agence, une barrière téléphonique… les réseaux se sont restreints. Au même moment, Orange considère sa puissance dans le domaine des nouvelles technologies, son réseau de boutiques qui génère quasiment un million d’actes commerciaux par mois. Sachant que l’application mobile, depuis deux ans, est devenue le premier média de contact client/banque, l’opérateur téléphonique a conçu d’investir ce métier. Moyens technologiques, réseau de vente, portefeuille de 28 millions de clients, solidité reconnue sont autant d’atouts qui portent ses intentions.


 



 


 Parmi les modèles économiques des banques, on trouve ceux de flux et ceux de stock.
Les néobanques offrent des produits de paiement, elles se rémunèrent à chaque opération avec ledit produit. C’est un fonctionnement sur le principe des flux, immédiatement rentable. Pour diminuer les délais de mise en œuvre de sa banque et simplifier le processus, Orange a choisi d’en racheter une traditionnelle.
La compagnie se classe dans le modèle de stock. Les coûts d’acquisition de clientèle sont élevés. Les recettes ne se font qu’après plusieurs années avec des clients fidèles.


Les différences entre l’univers des télécoms et celui des banques ne manquent pas.
Avec un opérateur téléphonique, on a l’avantage de parler en euro, avec un banquier on parle en pourcentage. Ainsi, pour vendre à crédit un smartphone d’une valeur de 600
euros, le vendeur propose un échéancier de règlements de 62 euros sur dix mois. C’est une formule qui, présentée de la sorte, plaît au client. Toutefois, si on l’informe du pourcentage de crédit que cela représente (4 %), le charme n’opère plus. Autre différence, dans le milieu bancaire, le bilan est l’outil d’évaluation permanent. Les sociétés commerciales ont d’autres réflexes. La philosophie réglementaire change aussi. D’un côté, tout ce qui n’est pas interdit est autorisé, de l’autre, tout ce qui n’est pas autorisé est interdit. Malgré toutes ces difficultés, les premiers mois du modèle stratégique d’extension de l’activité d’Orange vers la banque semble fonctionner (100 000 clients).


Mondialisation et digitalisation incitent à penser que l’emploi est fragile dans la banque de détail. Ce propos trivial répété à l’envie dans les médias professe que les banques doivent diminuer leur quantité d’agences, et leur personnel afin que leur schéma s’inspire du service en ligne.
Les banques mutualistes et coopératives n’adhèrent pas à cette vision. Elles représentent 70
% des parts de marché. Globalement, depuis quatre ans, le produit net bancaire concernant la banque de détail diminue en France. Cette baisse n’est pas imputable à la digitalisation mais à l’écrasement des taux d’intérêt et à la politique de la banque centrale.


Des applications sans grande valeur ajoutée ont été développées depuis plus de 20 ans dans les banques traditionnelles. Mises à la disposition du client, elles lui permettent de disposer d’informations ou de faire des opérations à distance de toute agence.
À cette première activité essentielle, il convient d’ajouter l’accompagnement des projets des clients : acquisition immobilière, création d’entreprise, achat de véhicule, etc. Leur traitement réclame trois choses : épargner pour bénéficier d’un crédit, accéder à des assurances adaptées, recevoir des conseils. Si une banque voulait réduire de moitié son réseau d’agences, le portefeuille moyen de ses conseillers passerait de 800
clients au double, entraînant automatiquement méconnaissance des dossiers et baisse de qualité. Olivier Klein en est persuadé, il faut maintenir le contact humain et le nombre de conseillers.


Les banques en ligne fleurissent, certes, mais elles ne gagnent pas d’argent. Leur budget publicitaire est de l’ordre de 50 millions par an. Elles sont contraintes de tout offrir gratuitement à des consommateurs qui considèrent cela normal. Elles abondent les ouvertures de compte. Bref, elles font beaucoup de concessions à une clientèle volage parce que non accompagnée (ou alors contre rétribution). Tant que les banques en ligne ne proposent pas de conseillers, elles ne peuvent pas s’attacher leur portefeuille. En le faisant, elles augmentent leurs charges et s’écartent de leur politique à bas coûts.


Les Fintechs qui travaillent en B2C finissent par se vendre parce que l’accès aux clients est trop cher. Celles qui sont en B2B apportent des services complémentaires. Si les GAFA avaient accès aux données des banques, elles auraient un potentiel de vente accru. Cependant, en tant que tiers de confiance, aucun établissement n’est prêt à céder ses données. D’autre part, les GAFA ne souhaitent vraisemblablement pas s’immiscer dans le marché bancaire et se retrouver assujettis à sa réglementation, notamment sur la traçabilité des fonds.


Somme toute, les clients sont devenus plus exigeants. Ils attendent de la banque de demain de la rapidité, de la praticité mais aussi une relation durable avec un conseiller.


 


C2M


 


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