Bernard Cohen-Hadad, le
président de la CPME Paris Île-de-France, a présenté mardi 22 octobre le
livre blanc de la CPME Paris IDF intitulé Mieux
vivre et travailler à Paris – 6 ans pour agir 2020-2026. Un document qui contient les propositions concrètes des dirigeants des
TPE et PME parisiennes, recueillies suite à un sondage réalisé avec l’IFOP fin
septembre, en vue des élections municipales 2020.
En septembre
dernier, la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) Paris
Île-de-France a réalisé un sondage en partenariat avec l’IFOP concernant les
attentes des dirigeants d’entreprises à Paris pour les prochaines élections
municipales (cf. sondage CPME Paris-Île de France – Ifop, « Municipales
2020 : Regards des petits patrons sur
l’attractivité de Paris »). Les résultats de cette enquête ont donné lieu à l’élaboration d’un
livre blanc contenant 40 propositions aux candidats parisiens des prochaines élections
municipales (voir ci-après).
Le président
de la CPME Paris Île-de-France, Bernard Cohen-Hadad, a présenté ce livre blanc
à la presse, en présence de Frédéric Dabi, directeur adjoint de l’IFOP, le 22 octobre dernier.
"IL EST DIFFICILE DE VIVRE ET DE
TRAVAILLER À PARIS"
Dans l’édito du livre blanc, Bernard Cohen-Hadad déclare
sans ambages : « Il est difficile de
vivre et de travailler à Paris. C’est le parcours du combattant pour créer son
activité, se loger, se déplacer, élever ses enfants et vivre en sécurité ».
Selon lui, c’est la raison pour laquelle, depuis 2011, l’équivalent de la
population du 5e arrondissement a fui la capitale. Bref, tous ceux qui y vivent
et y travaillent semblent subir la capitale, affirme le président de la CPME
Paris. « Et pourtant nous aimons notre ville » regrette-t-il plus loin.
Le sondage réalisé en septembre par l’IFOP, « Regards des dirigeants d’entreprise
parisiens sur l’attractivité de Paris et sur les prochaines élections
municipales », confirme cette impression. Certains chiffres sont en effet
très parlants.
Ainsi, même si la capitale française semble très
attractive pour la grande majorité (64 %) des chefs d’entreprise parisiens (81
% la jugent très dynamique et 76 % moderne et innovante), 49 % seulement sont
satisfaits des actions entreprises par la Ville de Paris pour l’attractivité
économique du territoire.
En outre, 42 % des petits
patrons sont insatisfaits par les transports publics en Île-de-France, 65 % sont insatisfaits par la
politique de propreté menée par la maire de Paris, Anne Hidalgo, et 72 % sont mécontents de sa politique
de logement.
Du
côté des salariés et de ceux qui habitent dans la Ville lumière, 50 %
considèrent le trajet domicile-travail comme une contrainte importante. En
outre, 72 % de ceux qui ont plus d’une heure de trajet par jour estiment que
les transports publics se sont dégradés depuis quelques années. 76 % des
Parisiens se disent également préoccupés par le bruit. Selon une source
Airparif, 90 % des Franciliens sont exposés à une pollution au dioxyde d’azote
excédant les taux réglementaires.
Avec
la parution du livre blanc Mieux vivre et travailler à Paris, la CPME souhaite
donc « contribuer au débat public, en
promouvant une vision ambitieuse, courageuse et réaliste, pour améliorer le
quotidien des dirigeants de TPE et PME et de tous les Parisiens » a
expliqué Bernard Cohen-Hadad lors de la conférence presse de présentation du
livre blanc, le 22 octobre dernier.
SIX AXES D’AMÉLIORATION
Ce livre blanc contient 40 propositions organisées autour
de six thématiques phares.
La première thématique concerne les relations avec les
pouvoirs publics. Pour la plupart des petits dirigeants, la prise de décision à
Paris est perçue et vécue « comme
unilatérale et verticale ». Ces derniers dénoncent ainsi un manque de dialogue et
regrettent que les acteurs économiques sociaux qui vivent les réalités du
terrain soient peu consultés. La CPME Paris IDF propose donc, en tête de ses
demandes sur ce thème, de mettre en place auprès de la mairie de Paris un
conseil économique et social composé de représentants patronaux, syndicaux et
associatifs afin de « fluidifier et renforcer la communication entre
les protagonistes de l’économie parisienne et les institutions ».
Le deuxième axe a trait à l’accompagnement du développement de
l’activité des petites entreprises. En effet, même si Paris est la ville la
plus commerçante de France, le tissu commercial est très inégal selon les
quartiers, estiment la plupart des dirigeants d’entreprise. En outre, un nombre
non négligeable de Franciliens préfèrent consommer en ligne. Par conséquent,
estiment les sondés, la digitalisation de l’activité des PME et TPE doit être
accélérée. En outre, la Mairie de Paris devrait jouer un rôle plus important
dans le développement des petites sociétés par la commande publique. Or,
seulement 58 % des parts de marché sont attribuées aux PME-TPE alors que
celles-ci représentent plus de 99 % des entreprises franciliennes. La CPME
Paris Île-de-France souhaite donc que la Ville mette rapidement en place un
« Parisian Small Business Act » pour faciliter l’accès des
TPE-PME aux marchés publics de la capitale.
Autre axe de recommandation : « faciliter le trajet
domicile-travail » en Île-de-France. Actuellement, le marché de
l’immobilier est complètement déséquilibré par une offre nettement inférieure à
la demande, indique le livre blanc de la CPME. Résultats : prix des loyers
démentiels, obstruction de l’accès au logement social… Par conséquent, « les
métiers en tension et en horaires décalés doivent se loger de plus en plus loin
de la capitale ». La CPME Paris propose donc que pour l’attribution
des logements sociaux, il soit mis au point « une grille de cotation
dédiée aux employés des métiers en tension et en horaires décalés et leur
réserver 1 logement social sur 4, à l’instar de la réserve mise en place par la
Mairie de Paris pour les agents de la collectivité ».
Le quatrième axe d’amélioration concerne les conditions de vie des
Franciliens. Le livre blanc révèle ainsi que 9 Parisiens sur 10 sont
exposés à un taux de pollution atmosphérique supérieur aux normes légales. En
outre, 60 % de l’énergie régionale est consommée par les bâtiments, « ce
qui pèse fortement sur le portefeuille des propriétaires et des
locataires ». La CPME Paris souhaite donc que soit étendu le plan « éco-rénovons Paris » qui
subventionne la réalisation d’audits énergétique et encourage les rénovations.
La cinquième thématique phare du livre blanc a trait à la mobilité dans
Paris. En effet, la densité du trafic, le manque de places de stationnement
représente un coût humain et matériel important. Chaque année, les
automobilistes perdent environ 237h de leur vie (près de 10 jours) dans les
embouteillages. Sans compter la pollution qui impacte leur santé. La CPME Paris
IDF propose donc d’installer un péage urbain diurne (8h-20h) autour de la
capitale avec une tarification différenciée selon la taille du véhicule et son
émission en CO2, ainsi que la gratuité partielle ou intégrale pour
certains publics.
Enfin, le livre blanc met en exergue la nécessité pour la Ville de
Paris de favoriser un tourisme durable. Certes, le tourisme est un atout majeur
pour le développement économique de la capitale (ce secteur représente en effet
7 % du PIB régional et 9,3 % de l’emploi salarié dans le Grand Paris
soit 295 000 personnes). Cependant, les dirigeants des petites entreprises
franciliennes craignent, qu’à terme, le tourisme de masse transforme la Ville
lumière en « ville musée, victime du sur-tourisme».
En outre,
les autocars de tourisme génèrent pollution et difficultés de circulation, mais
aussi d’hébergement. La CPME propose donc de limiter la location meublée
touristique saisonnière à 60 jours par
an pour les particuliers, de renforcer la surveillance et le contrôle des
plateformes de location, mais aussi de durcir les sanctions contre les
locataires en infractions.
En résumé, ce livre blanc qui plaide pour une « entreprise
citoyenne », selon les termes de Bernard Cohen-Hadad, a été remis aux
candidats aux élections municipales. Ces
derniers en feront-ils bon usage ?
40
propositions de la CPME pour travailler et vivre mieux à Paris
Repenser les relations avec les pouvoirs publics
Mesure
prioritaire : mettre en place auprès de la Mairie de Paris un
conseil économique et social composé de représentants patronaux, syndicaux et
associatifs, afin de fluidifier et de renforcer la communication entre les
protagonistes de l’économie parisienne et les institutions.
Autres
propositions :
Décliner cette instance de
concertation auprès des maires de chaque arrondissement.
Donner à ces assemblées une
compétence facultative de médiation et d’arbitrage dès lors qu’une décision est
susceptible d’affecter les habitants ou les usagers de plus d’un
arrondissement.
Accompagner le développement de l’activité
Mesure
prioritaire : mettre en place un « Parisian Small
Business Act » exemplaire qui facilite l’accès des TPE-PME aux
marchés publics de la Ville de Paris en augmentant la part de la commande
publique qui leur est réservée, en nombre comme en valeur.
Autres
propositions :
Revitaliser l’artisanat et le
commerce de proximité en doublant le nombre des quartiers éligibles au dispositif
« Vital Quartier » et en renforçant les moyens alloués au dispositif
« Paris Commerces », en particulier sur le Nord et l’Est parisien.
Plafonner les loyers des baux
commerciaux des bailleurs sociaux dans les Quartiers Politiques de la Ville
(QPV) pour redynamiser l’économie de ces quartiers et faciliter l’accès des
TPE-PME à la location.
Étendre les 10 zones touristiques
internationales (ZTI) existantes à tout Paris pour adapter les conditions
d’ouverture des commerces le dimanche et en soirée à la réalité de la
fréquentation touristique de la capitale.
Encourager le développement d’une
« industrie 4.0 » à taille humaine, créatrice d’emplois qualifiés,
qui fabrique en faible volume des produits sur mesure au plus près des besoins
et des attentes des consommateurs.
Mener une politique volontariste pour
former les publics éloignés de l’emploi aux compétences qui manquent dans les
TPE-PME.
Créer un fonds de dotation pour
achever l’accessibilité aux personnes handicapées des établissements recevant
du public (magasins, bureaux, hôtels...).
Proposer au sein de Paris & Co un
pôle d’incubation dédié à la transformation digitale des commerces, en
coordination avec les offres « Les Digiteurs » (CCI) et
« CoSto » (Semaest).
Faciliter le trajet domicile-travail
Mesure
prioritaire : Pour l’attribution des logements sociaux, mettre au
point une grille de cotation dédiée aux employés des métiers en tension et en
horaires décalés (personnels soignants, métiers des hôtels, cafés, restaurants,
etc.) et leur réserver 1 logement social sur 4, à l’instar de la réserve mise
en place par la Mairie de Paris pour les agents de la collectivité.
Autres
propositions :
Faire du temps de trajet
domicile-travail un critère dans l’attribution des logements sociaux.
Gérer le parc social à l’échelle de
la Métropole du Grand Paris et déléguer l’attribution de logements sociaux à un
ou plusieurs organismes indépendants.
Re-conventionner certains logements
sociaux PLAI et PLUS en PLS et PLI2 pour favoriser le maintien des classes
moyennes dans Paris.
Simplifier et moderniser la
gouvernance des transports sur le territoire de la Ville de Paris.
Développer l’offre nocturne de
transport en commun pour répondre aux besoins des salariés en horaires décalés
en densifiant le réseau de bus Noctilien et en améliorant sa régularité, ainsi
qu’en élargissant les horaires du métro.
Réserver de 8h à 20h sur le Boulevard
Périphérique une voie pour le covoiturage, le transport de personnes, le
transport logistique, les véhicules sanitaires et d’urgence ainsi que pour les
personnes à mobilité réduite.
Prévoir que 50 % des nouvelles
infrastructures cyclables créées au cours de la mandature soient protégées pour
lutter contre le non-respect des pistes cyclables par les autres usagers de la
route.
Créer les conditions d’une qualité de vie durable
Mesure
prioritaire : Étendre largement le plan « Eco-rénovons
Paris » qui subventionne la réalisation d’audits énergétiques et encourage
les rénovations.
Autres
propositions :
Promouvoir l’exonération de taxe
foncière prévue par le Code général des Impôts dans le cadre des travaux de
rénovation énergétique.
Simplifier le recours aux bâches
publicitaires pour aider les copropriétés dans le financement de leurs travaux.
Déléguer les pouvoirs de propreté aux
maires d’arrondissements pour une action plus adaptée aux besoins locaux.
Renforcer les campagnes de
dératisation et de lutte contre les autres nuisibles.
Créer une vraie police municipale de
proximité rattachée aux maires d’arrondissement, développer l’ilotage dans tous
les quartiers, renforcer les patrouilles et disposer d’un maillage étroit de
vidéo protection dans les zones sensibles.
Permettre aux autorités d’être plus
réactives en facilitant le signalement d’une « incivilité »,
en reprenant par exemple le modèle de l’application « Dans ma
rue ».
Expérimenter l’installation de radars
sonores sur les grands axes de circulation.
Devenir plus mobile avec moins de voitures
Mesure
prioritaire : Installer un péage urbain diurne
(8h-20h) autour de Paris avec une tarification différenciée suivant la taille
du véhicule et son émission de CO2, ainsi que la gratuité partielle ou
intégrale pour certains publics – personnes à mobilité réduite, professionnels
du transport, véhicules indispensables pour lesquels il n’existe pas encore
d’alternative propre (bétonnières, pelleteuses, goudronneuses, etc.).
Autres
propositions :
Densifier le réseau de bornes de
recharge électrique pour les véhicules dédiés et pratiquer la tolérance zéro
pour les véhicules thermiques qui y stationnent indûment.
Élargir les critères pour obtenir une
dérogation à une interdiction de circuler dans les Zones à Faibles Émissions,
notamment pour les professionnels dont la livraison d’un véhicule plus propre
est en cours.
Développer les aides aux
professionnels pour l’acquisition de véhicules à faibles émissions.
Développer le stationnement « intelligent »
en modulant la tarification en fonction de l’émission de CO2, la
taille du véhicule, la qualité de professionnel ; ouvrir les données sur
le stationnement afin de favoriser le développement d’applications facilitant
le parking.
Développer les infrastructures de
stationnement pour les deux-roues en créant 10 000 points d’accroche
sécurisés pour vélos et 50 000 places de stationnement sur chaussée pour
deux-roues motorisés.
Développer avec la région
Île-de-France l’offre de « Park & Ride » à tarif réduit, en
périphérie de la capitale, afin d’inciter les automobilistes à accéder à Paris
en transports en commun ou partagés.
Encourager la création d’un parc
d’utilitaires propres, en free-floating, à destination des professionnels et
accessible à tous.
Favoriser un tourisme durable
Mesure
prioritaire : Limiter la location meublée touristique saisonnière
à 60 jours par an pour les particuliers, renforcer la surveillance et le
contrôle des plateformes de location, durcir les sanctions contre les
locataires en infraction.
Autres
propositions :
Interdire les autocars de tourisme
dans tout Paris et mettre en place des navettes pour relier la périphérie de
Paris aux sites touristiques majeurs.
Créer un réseau de transports
secondaires propres entre les principaux sites de tourisme d’affaires et de
loisirs – y compris par voie fluviale – afin de soulager le réseau principal
utilisé quotidiennement par les Parisiens.
Renforcer les patrouilles de sécurité
dans les rames et les stations à forte affluence touristique pour mieux
garantir la sécurité des voyageurs contre les vols à l’arraché, la mendicité
agressive et les escroqueries à la charité publique.
Améliorer l’accessibilité de la voirie et des
transports en commun aux personnes handicapées et à mobilité réduite ;
obtenir la marque d’État « Destination Pour Tous » valorisant
une destination permettant un séjour prolongé inclusif pour tous.
Maria-Angélica Bailly