Le Conseil national des
greffiers des tribunaux de commerce vient de publier son rapport d’activité
2018. Création du registre des bénéficiaires effectifs (RBE), lancement du
fichier national des interdits de gérer… Quels sont les événements qui ont
marqué l’année 2018 ?
« Les greffiers des tribunaux de commerce sont à la croisée des
mondes judiciaire et économique » a rappelé la présidente du Conseil national
des greffiers des tribunaux de commerce (CNGTC) Sophie Jonval en préambule du
rapport d’activité 2018 du Conseil récemment publié. Complétant cette citation,
elle ajoute : « [ils] sont également au carrefour de
la technologie et de la proximité ». En effet, résolument innovant, le Conseil
national des greffiers des tribunaux de commerce, qui a
lancé le 10 avril dernier le tribunal digital – portail d’accès en ligne
aux 134 tribunaux de commerce français via une adresse unique –, ne
demeure pas moins soucieux de fournir un service approprié en réponse aux
besoins des entreprises et des justiciables. Comme Sophie Jonval le précise
toutefois, « dématérialisé » ne doit pas être synonyme de
« déshumanisé » ; la présidente le martèle donc :
« la technologie ne doit pas empêcher la proximité ».
Tournée vers l’avenir, la profession propose un léger
coup d’œil en arrière en publiant son rapport d’activité de l’année écoulée,
lequel revient notamment sur les prémices de la création du tribunal digital,
résultant de 18 mois de travaux. (cf. Journal
Spécial des Sociétés n° 34 du 8 mai 2019)
En 2018, ce sont principalement des missions de police économique qui
ont été développées par les greffiers des tribunaux de commerce, notamment via
la mise en place du registre des bénéficiaires effectifs et le lancement du
fichier national des interdits de gérer, deux événements importants qui ont
inévitablement rythmé le travail quotidien du CNGTC.
Le registre des bénéficiaires
effectifs
En
2018 a été créé le registre des bénéficiaires effectifs (RBE). Né de l’application de la 4e directive européenne relative à
la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et
de la loi dite « Sapin II » puis transposée en droit français
par l’ordonnance n° 2016-1635 du 1er décembre 2016, il vise à « identifier
le ou les bénéficiaires des sociétés et autres personnes morales ainsi que les
modalités de contrôle exercées par ces bénéficiaires », rappelle le CNGTC. Plus précisément, le
bénéficiaire effectif est défini à l’article L. 561-2-2 du
Code monétaire et financier comme « la ou les
personnes physiques, soit qui contrôlent en dernier lieu, directement ou indirectement,
le client, soit pour laquelle une opération est exécutée ou une activité
exercée ».
Ce registre, géré par la profession des tribunaux de
commerce, prend la forme d’un « contrôle de police économique », assure le
Conseil. Dans ce cadre, les greffiers des tribunaux de commerce ont
dû, six mois durant, faire face à
un flux de dossiers titanesque. Pour y répondre, ont été mis en œuvre de
nouvelles applications informatiques, le recrutement de nouveaux collaborateurs
et le lancement de nouveaux modules de formations spécifiques, répondant ainsi à ces nouveaux besoins.
Pour
accompagner ces missions de police économique, en 2018, a également été mis en place un
autre outil : le FNIG.
Lancement du FNIG
L e 16 mai 2018 a été lancé le FNIG, le fichier national
des interdits de gérer. Ce dernier – qui compte aujourd’hui 12 000 noms –
permet aux greffiers des tribunaux de commerce de vérifier « dès l’immatriculation d’une société qu’un
dirigeant n’est pas frappé d’une interdiction de gérer et empêcher ainsi la
réitération de faits de mauvaise gestion qui nuisent à la vie économique ».
Cette mission de service public leur a été confiée par la loi n° 2012-387 du 22
mars 2012 relative à la simplification du droit et à l’allègement des démarches
administratives. Le FNIG recense donc et centralise l’ensemble des mesures
d’interdiction de gérer et de faillites personnelles. Sa mise en place
répondait à une « demande forte des
acteurs en charge de la lutte contre les fraudes » avait déclaré Sophie Jonval
lors de son lancement officiel le 16 mai 2018.
Autre événement important ayant marqué l’année 2018, le congrès annuel,
grand rendez-vous annuel de la profession.
130e congrès des
greffiers des tribunaux de commerce et loi PACTE
Les 11 et 12 octobre 2018, c’est au Havre que s’est tenu
le 130e congrès des greffiers des tribunaux de commerce consacré aux nouveaux
enjeux de la police économique, avec, comme invité d’honneur, le Premier
ministre, Édouard Philippe. « Cette
reconnaissance du chef du gouvernement est venue confirmer la position
incontournable de notre profession pour le bon fonctionnement de la justice
économique » a souligné le Conseil, honoré par sa venue.
Le projet de loi PACTE, relatif à la croissance et à la
transformation des entreprises et adopté le 11 avril dernier, était
naturellement au centre de ce rendez-vous, lequel prévoyait notamment la
création d’un registre général dématérialisé des entreprises qui organiserait
la dizaine de registres existants. « Une
mise en œuvre rapide et efficace de ce registre constituerait un progrès
indéniable pour les entreprises françaises » a commenté le CNGTC. En effet,
alors que le registre du commerce et des sociétés (RCS) regroupe pas moins de
80 % des sociétés recueillies (5,5 millions d’inscrits), il existe aujourd’hui
plus de dix registres d’entreprises, qui ont « chacun [leur] histoire et [leur]
pertinence », a noté le Conseil. « Les
greffiers des tribunaux de commerce sont disposés à apporter leur savoir-faire
et leurs outils dématérialisés au service des entreprises. À condition
toutefois que les exigences de simplicité qui sont à l’origine de la naissance
de ce registre général dématérialisé des entreprises prévalent également dans
sa gouvernance », poursuivait-il. Les greffiers l’affirment donc : ils
veulent un registre général « simple,
fluide et efficace », devenant un «
outil central au service des entreprises françaises et de la croissance
économique ».
Nouvelles perspectives ?
Enfin, le congrès a été également l’occasion pour la profession de
formuler ses propositions. L’une d’entre elles concerne les associations :
celles employant plus de 10 salariés ou celles assujetties à la TVA
devraient être répertoriées dans un registre de publicité légale. Pour le
CNGTC, « cela permettrait à la fois de sécuriser les actes juridiques des associations
vertueuses et de lutter contre l’utilisation abusive du statut d’association.
Les acteurs de la lutte contre la fraude, le blanchiment
d’argent et le financement du terrorisme réclament unanimement un contrôle
juridique des associations ». Lors de congrès annuel, Bruno Dalles, directeur
de Tracfin, a appuyé cette proposition, considérant « le secteur associatif
comme un secteur à risque et souhaite que toutes les associations soient
enregistrées dans le futur registre général », précise le rapport du CNGTC.
Poursuivant sa démarche, le CNGTC
donne rendez-vous aux greffiers les 3 et 4 octobre prochains, à l’occasion du
131e congrès de la profession, qui se tiendra cette année à Lyon.
Constance
Périn