En ouvrant, par un arrêté du 15 avril 2024, les archives relatives au procès de Paul Touvier, complice de crime contre l’humanité pour son rôle sous l’Occupation, le ministère de la Justice permet à toute personne d'accéder à différents types de documents tels que le dossier de procédure du procès ou les archives de la Cour de cassation sur l'instruction du procès. Une communication
permise « près de cinquante ans avant la date normalement prévue pour
leur ouverture ».
Les archives des trois procès
pour crime contre l’humanité en France pendant la Seconde Guerre mondiale sont
désormais toutes consultables !
A quelques jours de la Journée
nationale du souvenir des victimes de la déportation qui sera célébrée cette
année le 28 avril, le ministère de la Justice et le ministère de la Culture ont
de nouveau autorisé l’ouverture de nouvelles archives, concernant cette fois le
procès de Paul Touvier, clos il y a de ça 30 ans. Ancien responsable de la milice de Lyon, fonctionnaire
du régime de Vichy et premier français reconnu coupable de complicité de crime
contre l’humanité pendant l’Occupation, celui qui était qualifié de « tortionnaire »
ou d’« assassin » avait finalement été gracié par Georges
Pompidou en 1971 après des années de clandestinité, alors condamné à mort par
contumace en 1946.
Les documents liés au procès Touvier
peuvent donc être consultés grâce à l’arrêté du 15 avril 2024 portant ouverture
des archives relatives à ce procès, publié au Journal officiel cinq
jours plus tard.
Cette ouverture anticipée se
fait « près de cinquante ans avant la date normalement prévue pour leur
ouverture » précisent les deux ministères dans un communiqué, et ce
dans le but « de progresser dans la connaissance de ce procès
historique, et de favoriser toujours davantage le travail de mémoire et de
vérité », en plus de « contribuer à lutter contre le
révisionnisme et l’oubli ».
Des transcriptions dactylographiées
des audiences parmi les archives
Selon l’arrêté, il est
possible de consulter une vingtaine de documents dans les Fonds du département
de la Justice et de l’Intérieur aux Archives nationales, à savoir le dossier du
parquet général de la cour de sûreté de l'État relatif à Paul Touvier, des
dossiers du cabinet de Robert Badinter et d'Alain Peyrefitte, les
transcriptions dactylographiées des audiences du procès tenu devant la cour des
assises des Yvelines en mars et avril 1994, des dossiers de la direction des
affaires criminelles et des grâces du ministère de la Justice, dont le dossier
de recours en grâce et des dossiers d'action publique, ainsi que les archives
de la Cour de cassation relatives à l'instruction du procès de Paul Touvier, au
procès et à ses suites.
Aux archives départementales
du Rhône et de la métropole de Lyon, peuvent être consultées les archives sous
la cote 4557 W 8. Les archives sous les cotes 1603 W 1 à 64, « à
l'exclusion des scellés n° 26 et 27 contenus dans l'article 1603 W 59 »,
sont quant à elles sont consultables aux Archives départementales des Yvelines.
Les Archives nationales
avertissent toutefois : « Les dossiers ouverts au titre de cet
arrêté sont pour certains conservés dans des articles contenant d'autres
dossiers encore non librement communicables car ne concernant par le procès de
Paul Touvier. Leur consultation immédiate n'est donc pas possible. Il est
demandé aux lecteurs de passer par la demande d'une communication par
extrait, accessible depuis le compte personnel dans la salle des inventaires virtuelle des Archives nationales. »
Les archives des procès
Barbie et Papon également consultables
Ces archives relatives à un
procès pour crime contre l’humanité en temps de Seconde Guerre mondiale ne sont
pas les premières à être ouvertes par anticipation, puisque par un arrêté du 30 juin 2017, les deux
ministères avaient déjà autorisé la communication des documents en lien avec le
procès de Klaus Barbie, chef de la Gestapo de la région lyonnaise reconnu
coupable de 17 crimes contre l’humanité en 1987.
Par les arrêtés du 28 mars 2022 et du 26 janvier 2023, ce sont les archives du
procès de Maurice Papon, jugé en 1998, qui ont été ouvertes, soit plus de 57
ans avant la date normalement prévue, en 2079. Tous les documents entre 1983 et
2004 sont ainsi consultables, c’est-à-dire les documents d’avant et pendant le
procès, mais également des documents ultérieurs, indiquait au micro de radio
France la Cheffe de service interministérielle des archives de France Françoise
Banat-Berger.
Parmi ces archives concernées
par la dérogation, des documents liés à la procédure, à la préparation de l’audience,
à la veille médiatique, à la correspondance des particuliers adressées aux
autorités judiciaires, la correspondance entre le ministère et le parquet, les
dossiers de recours en grâce notamment. Autant de documents qui concourent à
l’objectif visé par le gouvernement de mémoire mais aussi de connaissance, et
qui ont permis de mettre en lumière des échanges entre les professionnels
judiciaires par exemple.
Et si depuis 1998, des
dérogations pour ouvrir des archives relatives à la Seconde Guerre mondiale ont
été prononcées, cinq arrêtés portant ouverture d’archives relatives à la guerre
d’Algérie ont également été pris en 2019, 2020, 2021 et 2023.
Allison
Vaslin