Ce mercredi 1er janvier 2025 marquait la naissance de la
commune nouvelle de Saint-Denis, née de la fusion des deux villes. Une
association votée au
printemps dernier à la surprise des habitants et qui a donné lieu à une
nouvelle bataille politique.
Nouvelle
année, nouvelle collectivité pour les 149 781 habitants de la commune nouvelle
de Saint-Denis, désormais la deuxième ville d’Île-de-France. Ce mercredi 1er
janvier marque l’unification de Saint-Denis et de sa voisine
Pierrefitte-sur-Seine, une délibération adoptée au printemps dernier et
annoncée, à la surprise générale, le 4 février 2023, qui est entrée
officiellement en vigueur ce mercredi, ont annoncé via un communiqué les
édiles socialistes des deux anciennes communes : Mathieu
Hanotin, désormais maire de la nouvelle entité, et Michel Fourcade, premier
adjoint, qui reste toutefois maire de la commune déléguée de
Pierrefitte-sur-Seine.
La fusion commence
d’ailleurs sous de bonnes nouvelles financières pour la collectivité. En effet,
avec une population légèrement en dessous du seuil des 150 000 habitants, la
commune nouvelle bénéficie d’une dotation spéciale réservée aux villes
fusionnées.
Elle
percevra ainsi 15 euros par habitant pendant trois ans, soit une somme totale
d’environ 6,74 millions d’euros.
Une baisse d'impôt pour les habitants de Pierrefitte
Mais que
signifie concrètement cette fusion pour les habitants de la nouvelle commune de
Saint-Denis ? Parmi les premiers changements notables, il est question d'une
baisse d’impôts pour les résidents de Pierrefitte, qui pourront aussi
bénéficier des services déjà en place à Saint-Denis, tels que la cantine
scolaire et les initiatives de lutte contre l’habitat indigne.
Les deux
maires ont également souligné les avantages stratégiques de cette unification.
Avec une taille accrue, la nouvelle entité espère peser davantage sur la scène
nationale, notamment dans les arbitrages financiers. Cela pourrait aussi offrir
de nouvelles marges de manœuvre pour investir, avec l’espoir d’un renforcement
des services municipaux et une amélioration des infrastructures.
Un autre
changement concerne aussi la gouvernance car le conseil municipal
d’installation, prévu pour le samedi 4 janvier 2025 à l’hôtel de ville de
Saint-Denis, comptera 94 conseillers municipaux. Un nombre qui devrait diminuer
de manière significative lors des prochaines élections municipales, pour
s’établir probablement autour de 60 élus, simplifiant ainsi la gestion
administrative.
Une fusion qui a fait couler beaucoup d’encre
Malgré les
nombreux atouts vantés par les élus, le projet d’union a également suscité une
vive opposition. Parmi les critiques les plus virulentes figurait l’association
« Stop fusion Pierrefitte – Saint-Denis », dirigée par Christian Boutin, un
résident de Pierrefitte. Par ailleurs, l’association avait même organisé un
sondage, du 2 avril au 30 mai 2024, pour permettre aux citoyens des deux
communes de se prononcer sur la fusion, qu’ils y soient favorables ou non.
Le
principal reproche adressé aux deux maires portait sur l'absence de réelle
consultation populaire, bien que des discussions aient été engagées avec les
habitants dès février 2024. Dans les faits, le cadre juridique de la fusion
repose sur une loi de 2010, complétée par d'autres textes. Celle-ci autorise
une fusion décidée par les conseils municipaux des communes concernées, sans
qu’une consultation obligatoire de la population soit prévue. Une fois votée,
la fusion doit être validée par la préfecture, qui s'assure du respect de la
procédure légale.
Face à ces
critiques, les élus ont cherché à apaiser les tensions. Entre février et juin
2024, « cinq temps de rencontre » avaient été organisés dans différents
quartiers des deux communes, permettant aux habitants de poser leurs questions
et d’exprimer leurs préoccupations. Un site dédié au projet avait également été
mis en ligne, détaillant les étapes de la fusion, les arguments des maires et
permettant aux citoyens de soumettre des remarques ou des interrogations.
Cependant, ce site n’est plus accessible aujourd’hui.
Un projet absent des programmes municipaux des deux maires
Autre
critique formulée par les opposants : l'absence de mention du projet de fusion
dans les programmes municipaux de Mathieu Hanotin et de Michel Fourcade. Face à
cette omission, certains protestataires ont exigé l'organisation d'un
référendum local. Une demande rapidement écartée par les deux maires, qui ont
invoqué les complexités liées à la traçabilité des votes. Les édiles ont alors
affirmé que seules les élections municipales de 2026 pourraient refléter de
manière légitime la volonté des habitants sur cette question, avait rappelé
l’entourage de Mathieu Hanotin dans une déclaration au Parisien.
Même la
potentielle et attendue baisse d'impôt est remise en question. Sofia Boutrih,
conseillère municipale PCF à Saint-Denis et cheffe de file de l’opposition face
à Mathieu Hanotin, a affirmé à l’AFP que « la
dotation accordée aux communes nouvelles de moins de 150 000 habitants ne
suffira pas à absorber la diminution des impôts sur Pierrefitte ».
Pour ses
détracteurs, ce projet serait avant tout une stratégie politique visant à
renforcer la base électorale socialiste de Mathieu Hanotin en vue des
municipales de 2026. En effet, ce dernier avait conquis la mairie en 2020,
mettant fin à plus de 75 ans de gouvernance communiste. Ce mercredi 1er
janvier 2025, Michel Fourcade a fermement réfuté ces accusations, déclarant que
« les voix ne nous appartiennent pas ».
De son côté, Sofia Boutrih promet de consulter les habitants en cas de victoire
en 2026. Elle s’engage d’ailleurs à mener un audit approfondi pour évaluer les
impacts de la fusion sur le long terme et à soumettre à la population la
question de poursuivre, ou non, ce projet.
Romain
Tardino