Le 76e congrès de la profession comptable s’est déroulé
cette année à Bordeaux du 6 au
8 octobre, mais a également été
retransmis en ligne, permettant ainsi à pas moins de 4 500 congressistes et 234 partenaires de pouvoir y
participer. Avec pour thème « l’expert-comptable
au cœur de la relance », l’événement a tenu
principalement à rappeler à quel point les experts-comptables sont des
partenaires privilégiés de la relance économique du fait de leur proximité avec
les chefs d’entreprise. La plénière d’ouverture a particulièrement mis en avant
le dénouement sans failles de la profession pendant la crise sanitaire.
Pour sa 76e édition, cette grand-messe de la profession
comptable a été conçue comme un plateau télé avec, dans le rôle du présentateur
vedette, Gaby Olmeta, journaliste et enseignant à Aix-Marseille Université.
Ce dernier, qui a « énormément de respect pour cette profession », selon
ses propres termes, s’est entretenu (en visio et en direct), lors de la
plénière d’ouverture, avec de nombreuses personnalités, notamment Bruno Le
Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, Lionel Canesi,
président du Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables, Pierre
Hurmic, maire de Bordeaux, Jérôme Fournel, directeur général DGFIP, Thomas
Courbe, directeur général DGE, Sébastien Raspillet, chef de service financement
de l’économie – DG Trésor, Jean-Luc Flabeau, rapporteur général du 76e Congrès,
Mélina Bouye-Malbec et Damien Dreux, rapporteurs délégués du 76e Congrès, et
Mikaël Hugonnet, président du Conseil régional de l’Ordre des
experts-comptables-Nouvelle Aquitaine.
« METTRE LES EXPERTS-COMPTABLES AU CŒUR DE
L’ÉCONOMIE »
« Ce 76e
Congrès n’est évidemment pas un congrès comme les autres. Nous ne nous sommes
pas vus depuis deux ans sans le filtre d’un écran. Aujourd’hui, nous sommes un
peu plus de 4 000 en présentiel et nous avons énormément de sujets sérieux à
partager, énormément d’actualités à décrypter pour être toujours plus
pertinents, mais nous avons surtout énormément de convivialité à rattraper » a déclaré, d’un ton badin, le président du
Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables, Lionel Canesi, en
ouverture du congrès.
« Mettre les
experts-comptables au cœur de l’économie », telle est en tout cas
l’ambition principale du président du CSOEC. « Quand on s’engage pour piloter le Conseil national de l’Ordre, la
règle d’or et ma feuille de route tiennent en une formule de cinq mots : “des
paroles et des actes” » a-t-il martelé.
Au début de son mandat, en janvier 2021, Lionel
Canesi avait d’ailleurs dénoncé la trop grande « discrétion » de la profession
comptable dans le débat public, et le fait que celle-ci semblait « tourner le dos aux questions centrales qui
rythment la vie économique de la France et des TPE-PME en particulier ».
« J’avais
dit, a-t-il rappelé lors du congrès, il faut remettre les experts-comptables au
cœur de l’économie, parce que nous sommes les économistes du quotidien, pas les
économistes de plateaux télé ou de salon. »
Voilà qui est chose faite. En effet, depuis la
crise sanitaire et ses divers confinements, les experts-comptables sont plus
que jamais écoutés et consultés. « Pas un
seul texte, pas un seul dispositif, pas une seule loi relative à l’entreprise
n’a été mis en œuvre sans qu’au préalable l’Ordre ne soit mis dans la boucle »,
s’est réjoui Lionel Canesi.
En témoignent la procédure de sauvegarde
simplifiée suggérée par la profession, l’aide aux coûts fixes avec
l’exclusivité du calcul de l’EBE pour les experts comptables, le suivi des
différents fonds de solidarité et, plus récemment, le projet de loi de finances
sur laquelle les professionnels du chiffre ont été consultés. « Un réflexe
expert-comptable est né, et vous pouvez compter sur moi pour qu’il perdure ! »
a promis le président du Conseil supérieur.
Si le regard de la société sur l’expert-comptable
a changé, c’est aussi parce que ces professionnels ont démontré qu’ils étaient
des maillons essentiels de la République, notamment pendant la crise du
coronavirus.
Alors que l’économie était en berne, « partout nous avons été les opérateurs du
“quoi qu’il en coûte” auprès de nos clients : montage de dossiers PGE, fonds de
solidarité, mise en œuvre de l’activité partielle, accompagnement psychologique
des chefs d’entreprise pris dans une tempête sans précédent, remontées
d’expériences auprès de la DGFIP, de l’Urssaf, du Trésor, de la BPI… bref nous
avons été sur tous les fronts » a énuméré Lionel Canesi.
De ce rôle au plus près des entreprises, il
s’ensuit, selon le président de l’OEC, que personne mieux que
l’expert-comptable n’est en mesure de témoigner de la pertinence de telle ou
telle mesure, de la complexité de sa mise en œuvre, de son impact réel, etc.
Outre leur action au plus fort de la crise, les
experts-comptables entendent aussi être des acteurs importants au cœur de la
relance et de la sortie de crise.
En janvier 2021, le Conseil national a ainsi
déposé à Bercy 50 propositions pour une relance rapide de l’économie, or, « sur
ces 50 propositions, 12 ont été reprises et
10 sont en cours d’étude », a annoncé Lionel Canesi à ses collègues réunis
à Bordeaux. Ce travail de propositions va se poursuivre auprès du ministre de
l’Économie, et d’Alain Griset, ministre délégué en charge des PME, a-t-il
ajouté. Dans son discours, le président de l’Ordre est aussi revenu sur les
chantiers en cours et à venir de la profession. Parmi eux, l’indépendance
numérique – un chantier lancé depuis dix mois environ –, l’indépendance
financière via le lancement de la première société d’investissement de la
profession, Drakarys, sans parler de l’attractivité de la profession qui doit
encore être améliorée.
« Nous
sommes résolus à tenir notre place au sein de l’économie nationale avec
l’humilité de ceux qui travaillent, avec la conviction de ceux qui pratiquent,
l’énergie de ceux qui entreprennent » a conclu Lionel Canesi.
Lionel Canesi
UN DÉVOUEMENT RECONNU PAR TOUS
À la suite de ses propos, chacun a tenu à remercier
les experts-comptables pour leur travail quotidien et leur savoir-faire au
service des entreprises.
« La profession
d’expert-comptable est une profession vivante que soixante-dix années
d’existence ont rendu essentielle à notre économie. Les experts-comptables sont
devenus des acteurs incontournables auprès des responsables politiques
économiques financiers et sociaux au service des entreprises et des
institutions » a ainsi reconnu le maire de Bordeaux, Pierre Hurmic.
Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, a quant à lui
remercié les experts-comptables pour leur implication et leur aide apportée
pendant la crise et la relance.
« Au moment où
je vous parle, il y a eu moins de faillites en 2020 et en 2021 que dans les
années normales, et le taux de chômage est en train de passer sous la barre des
8 %. Si vous n’aviez pas été là, le résultat aurait été tout différent. La
France vous doit beaucoup », a-t-il déclaré avec reconnaissance.
En outre, a-t-il complété, « vous avez également été au rendez-vous lors de la relance. Vous avez
continué d’accompagner les TPE, et vous avez bâti avec nous le plan de relance
pour trouver les bons systèmes, les bons mécanismes qui permettraient aux
entreprises d’investir, de développer leur ligne de production et de redémarrer
rapidement ».
Aujourd’hui, a-t-il ajouté pour nuancer son
enthousiasme quant à la reprise économique, il reste néanmoins encore beaucoup
de sociétés qui connaissent des difficultés. Là aussi, le rôle des
experts-comptables auprès d’elles est primordial. Depuis le mois de septembre,
nous sommes passés du « quoi qu’il en
coûte » au sur-mesure, or, comme l’a fait judicieusement remarquer Bruno Le
Maire, le sur-mesure est justement la spécialité des experts-comptables qui, au
quotidien, font du cas par cas selon l’entreprise dont ils ont la charge.
Le
ministre de l’Économie a d’ailleurs profité de son intervention pour rappeler
les modalités du plan d’action pour l’accompagnement à la sortie de crise mis
en place avec le garde des Sceaux (et plus de 20 partenaires publics et privés)
en septembre dernier.
Ce plan s’articule autour de trois étapes : d’abord détecter les
difficultés des entreprises, ensuite les orienter vers les dispositifs les
mieux appropriés et enfin les accompagner dans la mise en place des solutions.
Dans ce plan, les experts-comptables se sont engagés à
proposer un diagnostic de sortie de crise « simple, efficace, rapide » à toutes
les entreprises clientes avant la fin de l’année en cours.
Pour les entreprises qui n’ont pas d’experts-comptables
attitrés, la profession a également lancé une plateforme de mise en relation
avec des experts-comptables volontaires chargés de réaliser gratuitement ce
diagnostic. « C’est un geste de
solidarité exceptionnel et remarquable de la part des experts-comptables »,
a salué Bruno Le Maire.
La profession s’est aussi engagée à signaler aux conseils
départementaux à la sortie de crise, les entreprises qui doivent être
accompagnées – bien entendu dans le respect du secret des affaires.
Le ministre de l’Économie a plus largement rappelé, lors
de son intervention, à quel point le rôle de l’expertise comptable avait « profondément et positivement évolué depuis
2010 ».
Le ministre situe le point culminant de ce tournant avec
la loi PACTE qui a fait en sorte, selon lui, que les experts-comptables
prennent encore plus d’importance et d’utilité dans la vie économique de la
nation.
On pense ainsi à la création du mandat implicite
vis-à-vis des directions générales des finances publiques et des organismes de
Sécurité sociale, de la création du statut d’expert-comptable en entreprise, du
renforcement du rôle de l’expert-comptable dans la lutte contre le blanchiment
de capitaux et le financement du terrorisme.
Bref, a répété et conclu Bruno Le Maire, « la France vous doit beaucoup. Je compte sur
vous pour les mois qui viennent pour que nous réussissions une relance
économique qui intègre tous les acteurs économiques sans exception. »
32 PROPOSITIONS
DE PLUS
Les experts-comptables n’ont de toute
façon pas fini de faire parler d’eux. Ils ne comptent pas s’arrêter aux
50 propositions élaborées en début d’année. En effet, à l’issue du Congrès, 32 nouvelles
propositions – compilées dans un livre blanc – ont été remises à Alain Griset,
ministre délégué chargé des TPE-PME.
Ces mesures concernent les domaines
suivants : le financement, la consommation, l’investissement,
l’entrepreneuriat, les ressources humaines, la prévention des difficultés des
entreprises et la simplification-harmonisation.
« C’est
un nouveau livre blanc sur les mesures pour la relance (…). Sept chapitres,
32 nouvelles propositions. (…) Tout au long de notre mandature, on continuera
bien sûr à faire des propositions pour justement, à la fois alimenter le
dialogue avec les différents ministères et votre administration, et puis aussi
cela nous permet après de travailler avec vous de façon plus étroite, de
co-construire des textes ensemble » a commenté le rapporteur du Congrès
Jean-Luc Flabeau lors de la remise du livre blanc à Alain Griset.
«
Merci beaucoup pour le travail que vous avez effectué. Au-delà du travail que
vous faites au quotidien, d’accompagnement et de conseil, vous faites aussi des
propositions. C’est extrêmement important, en tout cas pour moi en tant que
ministre, d’avoir des professionnels comme vous qui savent de quoi ils parlent,
qui soient des hommes et des femmes qui proposent des choses. Naturellement,
avec mes équipes nous allons travailler, puis nous aurons la chance de nouveau
de se retrouver pour voir de quelle manière nous pouvons prendre tout ou partie
de vos propositions, parce que je n’ai aucun doute sur le fait que ces
propositions ont été faites dans le but d’améliorer la situation » lui a
répondu le ministre délégué chargé des PME, accueillant positivement ces
recommandations.
Autres ambitions de la profession :
se projeter sur la présidentielle en rédigeant un projet présidentiel
économique pour les TPE et PME, et auditionner « tous les candidats à la présidence de la République pour porter la voix
des TPE-PME ».
«
Qui mieux que nous peut porter la voix des trois millions de TPE-PME ? »
Réponse dans quelques mois.
Maria-Angélica Bailly