Lors d’une audition au Sénat sur
le sujet du narcotrafic mardi 5 mars, Isabelle Couderc avait notamment déploré « la
remise en cause permanente et dilatoire des actes accomplis par une certaine
défense qui n’est pas constructive », suscitant la colère de l’association
représentative des jeunes avocats de la cité phocéenne.
L’Union des jeunes avocats
(UJA) de Marseille a répondu, dans un
communiqué publié ce jeudi 7 mars, aux propos d’Isabelle Couderc,
vice-présidente du tribunal judiciaire de Marseille chargée de l’instruction à
la JIRS Criminalité organisée.
Auditionnée mardi 5 mars par
la commission d’enquête sénatoriale sur l’impact du narcotrafic en France,
Isabelle Couderc avait eu l’occasion de lancer plusieurs charges à l’encontre
des avocats.
Après avoir assuré que
Marseille était « la seule ville de France gangrenée à ce point par le
trafic de drogue », la magistrate avait relevé « la grande
aisance financière de ces délinquants du haut du spectre […] lorsqu’ils
apparaissent en capacité de rémunérer plusieurs avocats, et non des moindres,
pour leur défense ».
Isabelle Couderc avait en ce
sens dénoncé « la remise en cause permanente et dilatoire des actes
accomplis par une certaine défense qui n’est pas constructive ». Selon
elle, « les délinquants paient très cher une défense qui ne va pas se
battre sur le fond du dossier, – et pour cause, il est souvent accablant –,
mais sur la procédure, avec en ligne de mire la détention, en multipliant des
remises en cause systématiques de certains actes d’enquête, ou bien utilisent
carrément des stratagèmes pour au final obtenir des remises en liberté des
délinquants ».
La vice-présidente avait
également regretté la mise en ligne, en 2021 par deux avocats au barreau de
Paris, du site nullitator.fr, ayant pour vocation de recenser « les
motifs de nullité qui fonctionnent », selon le site internet.
« Actuellement, nous
assistons à une grave remise en cause de notre fonction. Les plaintes déposées
par les avocats à l’encontre des juges d’instruction traitant de cette matière
dans le but de les déstabiliser ne sont plus un phénomène rare »,
avait-elle affirmé.
« Ces déclarations
minent la confiance en notre profession »
Piquée au vif, l’UJA de
Marseille a déploré « le rapprochement effectué par Madame Couderc
entre les honoraires de nos confrères et le narcobanditisme, car il induit une
relation insupportable entre eux ». L’association a dénoncé une « comparaison
qui constitue une attaque grave contre notre profession et son indépendance,
dénotant une méconnaissance du rôle essentiel des avocats dans le système
judiciaire et remettant en question leur intégrité professionnelle ».
Sur le point de l’attaque des
avocats sur les aspects procéduraux plutôt que sur la défense sur le fond des
affaires, l’UJA de Marseille a considéré cet argument comme « une
menace sérieuse pour les droits et les libertés fondamentales de tout
justiciable, y compris le droit à un procès équitable et les droits de la
défense ».
L’association a également rappelé
« l’engagement des avocats à garantir l’accès à une justice équitable pour
tous les individus, quel que soit leur statut ou leurs circonstances »,
regrettant en ce sens des déclarations qui « minent la confiance
en notre profession ainsi que dans le respect des droits fondamentaux de chaque
individu devant la justice ».
Et l’UJA de contre-attaquer, indiquant
que la formulation de telles critiques envers les avocats « semble être
une manière de détourner l’attention des déficiences de l’État dans ce domaine ».
« Plutôt que de pointer du doigt les avocats, il est impératif que les
autorités s’attaquent de front aux véritables lacunes et dysfonctionnements qui
entravent l’efficacité de la lutte contre le narcotrafic », a
également estimé l’UJA, proposant notamment de renforcer l’éducation et la prévention.
L’association a par ailleurs appelé à « un débat responsable et
respectueux entre les autorités et les acteurs de l’institution judiciaire ».
Alexis
Duvauchelle