Le
18 juillet, en Grand’chambre de la Cour de cassation, Agnès Mouillard, doyenne
des présidents de chambre, présidente de la chambre commerciale, financière et
économique, a ouvert l’audience solennelle d’installation du nouveau Premier
président de la Cour suprême judiciaire. Elle a rendu hommage à la Première
présidente partante, Chantal Arens, pour « son engagement, sa
responsabilité et son courage ». Le procureur général, François
Molins, a pour sa part salué « ses qualités d’écoute, son dynamisme et
sa ténacité » au service « d’une gouvernance à la fois
collective et participative ». Lui succède ainsi un homme soucieux de
la place du juge contemporain en France et en Europe.
Juge
civil 9 ans, professeur 12 ans, institutions européennes 9 ans, Cour de
cassation 20?ans, Christophe Soulard a présidé la chambre criminelle à partir
de 2017. Une carrière « marquée par
l’équilibre : entre le civil et le pénal, entre les juridictions
françaises et internationales, entre la magistrature et l’enseignement »,
estime François Molins, qui rappelle par ailleurs
que la Cour de cassation est au service d’une justice de qualité, gardienne des
libertés. Pour le procureur général, cette mission impose qu’au moins trois
conditions soient remplies : le
respect absolu de l’indépendance du juge,
la protection de l’acte de poursuite
contre toute attaque ou pression, et la mise en œuvre
des préconisations du comité des États
généraux, à savoir un renforcement substantiel des moyens et une réforme
systémique.
Christophe
Soulard constate que la conjoncture européenne agitée bouscule les démocraties et la primauté du droit. La défiance envers
l’ordre établi se répand. Les juridictions n’y échappent pas et leur action
fait l’objet de critiques notamment de la part de personnalités qui « opposent
la démocratie au droit ». « À cet égard, le sort de chacune des institutions de la
République est lié à celui
des autres. Tout discours qui sape la légitimité de
l’une affaiblit les autres« précise-t-il.
Le
juge suit la loi, mais il prolonge aussi son esprit quand elle n’a pas envisagé les transformations de la
société. Quelquefois il s’en éloigne, donnant la préséance à des normes
européennes. Ce métier de décisions s’appuie sur une communication intense
nationale et internationale à » la recherche de la solution
conforme au droit« .
Il convient de multiplier les échanges sur les questions de société, sur le
respect des droits fondamentaux, sur les méthodes de travail, et notamment sur
la lisibilité du résultat final.
Il
faut également préserver les qualités indispensables du magistrat, « la
capacité à se déprendre de ses affects et de ses opinions et intérêts
personnels, à dialoguer, à examiner scrupuleusement les faits et à mesurer les
conséquences de la décision, [qui] sont tout sauf innés. Il y faut un apprentissage,
dans lequel la déontologie occupe une large place et qui se prolonge tant que
dure la vie professionnelle. « Président du conseil d’administration de l’École
nationale de la magistrature et de la formation siège du Conseil supérieur de
la magistrature, Christophe Soulard portera une vive attention aux cursus et
aux carrières.
Rendre
justice aux citoyens, le rapport du comité des États généraux de la justice, achevé en avril dernier
« décrit une justice au bord de l’asphyxie, qui ne fonctionne que grâce
aux sacrifices personnels considérables que consentent les magistrats et les
personnels de greffe. Au-delà de la charge de travail, c’est la perte de sens
qui est dramatique, notamment lorsqu’elle affecte nos plus jeunes collègues. »
Les acteurs des tribunaux sont frustrés des mauvaises conditions de
fonctionnement. La relation magistrats/avocats souffre de cette situation. Des
mesures sont attendues. Cette perspective est source d’espoir.
C2M