Le 4 juin
2015, François Hollande lui avait confié la rédaction d’une Déclaration
universelle des droits de l’Humanité : le 2 novembre de la même année, le texte
était rendu public. Depuis, Corinne Lepage ne cesse d’en faire la promotion et
de récolter des signatures. L’ancienne ministre de l’Environnement vise les
États, mais surtout la société à travers, notamment, les barreaux, c’est
pourquoi elle était, présente lors de la rentrée solennelle de celui de
Marseille.
Pourquoi une Déclaration universelle des droits de l’Humanité ?
En
face des défis immenses qui concernent tous les humains : changement
climatique, désertification, évènement extrême, destruction de la biodiversité,
il est nécessaire de définir des Droits et devoirs pour permettre le maintien
de la vie sur Terre et une vie digne à nos descendants.
Quelle est la spécificité de cette déclaration ?
C’est
une déclaration qui se veut être le complément, le pendant, de la Déclaration des
droits de l’homme et du citoyen (DDHC) pour tous les sujets collectifs qui nous
concernent. Ce n’est pas seulement un texte sur l’environnement, il aborde
aussi le développement et le progrès technique qui concerne l’humanité dans ses
droits et dans ses devoirs. C’est un texte très court qui comporte six droits
et six devoirs, mais aussi quatre principes simples : la responsabilité et la
solidarité, l’équité intergénérationnelle, la dignité humaine et le droit au
développement et enfin le principe de continuité de l’espèce humaine.
L’article
8 de la Déclaration des droits de l’humanité est ainsi rédigé : « L’humanité a droit
à la préservation des biens communs, en particulier l’air, l’eau et le sol, et
l’accès universel et effectif aux ressources vitales. Les
générations futures ont droit à leur transmission ». C’est écrit de manière
simple, pour que ce soit accessible et traduisible. La déclaration l’est
aujourd’hui dans toutes les langues de l’Union, en chinois et en Russe. C’est
important qu’il y ait des barreaux pour signer, car chacun d’entre eux va être
un ambassadeur dans son propre pays.
Pourquoi vous êtes-vous tournée vers les avocats ?
L’humanité
c’est tout le monde. Donc notre objectif a été de ne pas nous limiter aux États
(les Comores ont déjà signé la déclaration au moment de la COP22 à Marrakech)
mais de viser toute la société. Les
collectivités publiques sont très importantes, comme les régions. Celle de Tanger
au Maroc a signé par exemple. Nous avons un travail qui est à la fois de porter
la DDHU aux Nations unies, le Président Hollande l’a envoyée en avril 2016, et
tout un travail dans la société parce que l’humanité c’est vous et moi et pas
seulement les États. Lorsqu’on évoque la continuité de l’espèce humaine, nous sommes
tous concernés. C’est important que les avocats soient porteurs de cette déclaration,
parce qu’ils sont porteurs et défenseurs du droit. Je suis très heureuse qu’il
y ait des barreaux étrangers aujourd’hui. Les barreaux européens vont également
s’en saisir grâce au bâtonnier de Paris qui s’en occupe. Aujourd’hui, nous avons
celui de Californie. C’est capital que ce texte essaime dans le monde et que
les avocats s’en fassent les ambassadeurs. Ils sont les meilleurs émissaires
dont on puisse rêver.
Est-ce que cela pourrait aboutir à un texte contraignant ?
Si
le pacte de Laurent Fabius était un jour signé (le pacte mondial pour l’environnement,
« qui sera un traité » selon le président du Conseil constitutionnel, a été élaboré
par une équipe de juristes internationaux et sera bientôt présenté à la communauté
internationale NDLR) ce serait un texte contraignant. Mais, il ne prend qu’une
partie du sujet : celle relative à l’environnement. La partie humanité n’existe
pas. Ce que je voudrais, c’est que cette DDHU soit adoptée aux Nations unies.
Elle restera une déclaration, comme la DDHC, c’est-à-dire qu’elle ne sera pas contraignante,
mais c’est quand même un texte avec une très grande valeur morale.
Propos
recueillis par Victor Bretonnier