Jean Messinesi a été élu Président du
Tribunal de commerce de Paris en octobre 2015, pour quatre ans, succédant ainsi
à Frank Gentin, qui exerçait cette fonction depuis le 15 janvier 2012. Son
mandat a officiellement débuté lors de la rentrée solennelle de la juridiction,
mercredi 20 janvier 2016. Le Journal Spécial des Sociétés l’a rencontré, à son
bureau du 1, quai de Corse, sur l’Île de la Cité.
JSS : Quels
sont les grands projets de votre mandat ? Quelles en sont les
priorités ?
Ma première priorité rejoint
celle du nouveau Ministre de la justice : trouver des moyens pour ce
tribunal. Il faut savoir que les moyens du Tribunal de commerce ont été
considérablement réduits ces dix dernières années. De 115 000 euros en
2006, notre budget de fonctionnement, c'est-à-dire hors entretien du bâtiment,
est passé en 2015 à 11 000 euros par an. On ne donne pas beaucoup de
moyens aux bénévoles qui doivent utiliser leurs ordinateurs, leurs codes, leur
papier…
La deuxième priorité, c’est de
faire connaitre l’excellence du Tribunal, la qualité de ses décisions et la
rapidité avec laquelle elles sont rendues. Bien entendu, nous n’arrivons pas à
avoir le même temps que le temps de l’entreprise. Le temps de l’entreprise est
très court, mais nous essayons de rendre nos décisions suffisamment rapidement
pour que l’impact du délai d’attente soit minime. Par rapport aux délais que
prennent d’autres juridictions, nous sommes exemplaires et cela est encore
plus vrai lorsque l’on nous compare au temps que prend l’arbitrage.
La troisième priorité c’est de
pouvoir donner aux juges plus de facilités. Pas seulement en termes financiers.
Il s’agit d’aides à la décision que les juges sont en droit d’attendre :
l’accès aux bases de données juridiques. Pour l’instant nous n’avons qu’une
seule base accessible alors que nous souhaiterions avoir, comme les magistrats,
accès à celles que développent la Cour d’appel et le Tribunal de grande
instance.
JSS : Quels
sont les grands défis du Tribunal de commerce ?
Le grand défi c’est de faire
reconnaitre les atouts des Tribunaux de commerce, en particulier en matière
internationale. Il faut que le droit français soit plus largement accepté et
que les contrats internationaux soient plus souvent soumis aux juridictions
françaises. Les juges consulaires, qui sont des professionnels de l’économie,
du commerce, de la banque mais aussi des ingénieurs. Ils connaissent le monde
réel dans lequel opèrent les agents économiques. La justice commerciale à
Paris, mais aussi dans la majorité des tribunaux de commerce en France est le
résultat de cette cohabitation entre la nécessité de la vie économique et la
règle de droit. L’efficacité de cette justice consulaire nait de l’expérience,
de la compétence des juges en matière économique et de leurs connaissances en
matière juridique. Le Tribunal consacre énormément d’efforts aux juges qui le
rejoignent. C’est ainsi grâce à cette double compétence que nos décisions sont
très largement acceptées.
JSS : Sur votre
blog, vous revenez souvent sur les « critiques » qui sont faites à la
juridiction. Comment leur répondez-vous ?
Vous savez, on nous reproche un
peu hâtivement d’être soit incompétents soit corrompus. Tout cela est un peu
rapide. Les Tribunaux de commerce ont considérablement changé depuis 15 ans. La
déontologie, le souci d’être attentif à la moindre apparence de conflit
d’intérêt font que je suis convaincu que nous ne sommes pas plus critiquables
que d’autres. Toute activité humaine, malheureusement, comporte des risques.
Mais aujourd’hui pas plus ici qu’ailleurs. Mais il faut que les règles
déontologiques soient très claires et nous sommes très favorables à ce que
pèsent sur nous les mêmes obligations que celles qui pèsent sur les magistrats.
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