Les problèmes de recrutement
se multiplient en France depuis le début de l’année. Dans l’agroalimentaire, ce
manque de main d’œuvre est présent depuis encore plus longtemps, aggravé par
les difficultés de reprises d’exploitations par les jeunes qui entrent sur le
marché du travail. Au Salon international de l’agriculture de 2023, les
notaires ont pu répondre à certaines de leurs questions et dissiper leurs
inquiétudes.
Comment réconcilier la
jeunesse avec son agriculture ? Alors que la France fait face à de grosses
difficultés de recrutement dans le secteur, la problématique de la reprise des exploitations
faisait partie des sujets abordés au Salon international de l’agriculture, dont
les portes se sont refermées le 5 mars dernier.
Présents chaque année, les
notaires du Conseil supérieur du notariat (CSN) ont également ressenti une
inquiétude sur ces questions au fil des quelque 60 consultations par jour. « Il
y a beaucoup d’enjeux de transmission, avec le départ à la retraite de nombreux
agriculteurs. Le corollaire de cette transmission est l’installation des jeunes
agriculteurs ou les regroupements d’exploitation », selon Thomas Roux,
notaire dans les Deux-Sèvres et présent sur le stand du CSN au salon.
50 % des agriculteurs
auront en effet l’âge de partir à la retraite dans les dix ans à venir.
L’urgence est donc réelle pour ces futurs retraités de trouver un moyen de
passer la main de la manière la plus transparente possible pour l’exploitation
et ses clients. « Il est important que les futurs retraités et les
jeunes passent par un notaire pour avoir un conseil plus large, qui peut aller
au-delà de la transmission de l’entreprise pour s’intéresser à la transmission
de patrimoine aux enfants. » D’après Thomas Roux, le réflexe du
notaire n’est pas assez ancré, « c’est pourtant très important pour
éviter certains écueils fiscaux et patrimoniaux ».
Des craintes pour les
transmissions hors cadre familial
Le notaire peut notamment
aider dans le cas de transmissions qui se font hors cadre familial, le bail
rural classique n’étant pas transmissible dans cette situation. « C’est
un point d’inquiétudes rencontré par les agriculteurs qui partent à la
retraite, car si l’on ne peut transmettre le foncier qui porte l’entreprise
agricole, alors celle-ci n’a pas d’assise », comme nous l’a expliqué
le notaire deux-sévrien. Il est possible pour les professionnels de trouver des
solutions pour éviter un risque de refus des propriétaires de conclure de
nouveaux baux.
Mais même à l’intérieur du
cadre familial, la reprise de l’exploitation n’est pas toujours chose aisée. « Aujourd’hui,
on a des exploitations qui ont parfois un gros capital et même les enfants
n’ont pas les capacités financières pour reprendre l’exploitation de leurs
parents », a de son côté déploré Rémi Dumas, viticulteur dans
l’Hérault et vice-président du syndicat Jeunes agriculteurs, qui se revendique
seul syndicat agricole entièrement dédié à la cause des jeunes.
Le groupement a publié un
livre blanc sur le sujet avec un objectif : « Faciliter la
transmission de parent à enfant et pouvoir renouveler les générations en
agriculture. » « Il y a un enjeu fort de renouvellement, en tant
que chef d’entreprise comme au niveau de la souveraineté alimentaire du pays. »
Beaucoup de frais, et des
aides pour s’en sortir
Comme l’a précisé le
viticulteur, de nombreux frais sont à prévoir au moment de l’installation, ce
qui peut freiner les nouveaux entrants dans l’agriculture. « Le
syndicat est là pour mettre toutes ces problématiques en avant et les
travailler politiquement. »
L’organisation accompagne
aussi les jeunes pour bénéficier de la dotation jeune agriculteur (DJA) qui aide
à l’installation les porteurs de projets.
Rémi Dumas souhaite également
l’obligation d’avoir un diplôme pour exercer le métier d’agriculteur. « Pour
nous, ce n’est pas un frein, au contraire. Cela permet notamment aux enfants
d’agriculteurs d’être formés et avoir des bases solides de chef d’entreprise
pour être agriculteur »
Avec toujours la
problématique de faire venir les jeunes dans un métier qui n’attire plus, le
syndicat a créé dans ce but l’association « Demain je serai paysan »,
qui veut rassembler l’ensemble des filières agricoles pour faire la promotion de
tous les métiers de l’agroalimentaire, notamment les laiteries et abattoirs. « Ce
sont des professions souvent décriées, ou méconnues. Il faut réussir à faire
comprendre à tous qu’il y a du sens dans tous nos métiers. »
Alexis
Duvauchelle