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La loi PACTE et ses suites : réforme du commissariat aux comptes

La loi PACTE et ses suites : réforme du commissariat aux comptes
Publié le 16/12/2019 à 15:37


La promulgation de la loi du 22 mai 2019 dite « PACTE » et de son décret du 24 mai 2019 (n° 2019-514), ont profondément modifié le champ d’intervention des commissaires aux comptes.


Ces dispositions ont été complétées par la loi de "simplification, de clarification et dactualisation du droit des sociétés" (n° 2019-744) du 19 juillet 2019, qui a retouché certaines dispositions relatives aux missions des commissaires aux comptes.


 


Mise en place d’une logique de seuils harmonisés pour la certification des comptes annuels des entreprises


La réforme de la mission des commissaires aux comptes pour les certifications des comptes annuels s’appuie, pour toutes les sociétés commerciales, sur la mise en place de seuils en-dessous desquels il n’est pas nécessaire de désigner un commissaire aux comptes. La démarche est ici plus économique que juridique : l’on s’attache désormais davantage aux résultats et à la taille de l’entreprise qu’à sa forme sociale.


 


Nouvelles modalités de désignation d’un commissaire aux comptes


Les sociétés anonymes (non cotées), les sociétés en commandite par actions et les sociétés européennes n’ont plus l’obligation de désigner un commissaire aux comptes.


Elles suivent désormais le mécanisme prévu pour les SARL et les SAS qui s’appuie sur une logique de seuils.


 


Désignation d’un commissaire aux comptes dans le cadre de la nouvelle logique des seuils


Désormais les sociétés commerciales qui dépassent, à la clôture de leur exercice social, deux des trois seuils suivants sont tenues de désigner un commissaire aux comptes :


un total du bilan de 4 000 000 euros,


un chiffre d’affaires HT de 8 000 000 euros ;


un nombre moyen de salariés pour l’exercice considéré supérieur à 50.


Il est intéressant de relever que les seuils minimaux désormais prévus sont précisément ceux qui avaient été fixés par la directive de l’Union européenne n° 2013/34/UE du 26 juin 2013, preuve de la poursuite du mouvement d’uniformisation des normes des États membres, pour ce qui concerne le contrôle comptable.


 


Modalités de désignation d’un commissaire aux comptes dans le cas de sociétés contrôlantes


Les sociétés qui en contrôlent d’autres au sens de l’article L. 233-3 du Code de commerce doivent nommer un commissaire aux comptes lorsque l’ensemble qu’elles forment dépasse les seuils visés ci-dessus.


 


Particularités s’agissant des seuils applicables aux sociétés contrôlées


Par exception, les sociétés contrôlées directement ou indirectement sont individuellement soumises à l’obligation de désignation d’un commissaire aux comptes dès lors qu’elles dépassent les seuils de :


2 000 000 euros de total bilan ;


4 000 000 euros de chiffre d’affaires HT ;


un nombre moyen de 25 salariés.


 


Pour les SAS, en dehors des cas où les seuils seraient atteints, il n’existe plus d’obligation de désigner un commissaire aux comptes dans les cas où cette société contrôle ou est contrôlée par une ou plusieurs sociétés.


 


Sort des mandats en cours des commissaires aux comptes


Les mandats en cours des commissaires aux comptes désignés se poursuivront par principe jusqu’à leur terme en application des dispositions de l’article L. 823-3 nouveau du Code de commerce.


 


De nouvelles missions dévolues aux commissaires aux comptes : laudit légal des petites entreprises (ALPE) et missions ad hoc


La mission d’audit légal des petites entreprises, contrepartie d’un dessaisissement organisé par la loi


La mission ALPE bénéficie aux sociétés qui désignent de manière volontaire un commissaire aux comptes pour les sociétés :


contrôlantes au sens de l’article L. 233-3 du Code de commerce et dépassant 2 des 3 seuils précédemment évoqués ;


contrôlées directement ou indirectement par d’autres sociétés (L. 823-2-2 al. 3 du Code de commerce) ;


ayant décidé d’un commun accord avec leur commissaire aux comptes actuel de réaliser le reste de sa mission suivant ces nouvelles dispositions.


Cette mission comporte l’établissement d’un rapport sur les risques financiers, comptables et de gestion prévu à l’article L. 823-12 du Code de commerce.


Dans ce cadre, le commissaire aux comptes n’a plus à établir les rapports et diligences suivantes :


le rapport sur les conventions réglementées pour les SARL, SAS et SA ;


le rapport sur la régularisation par une assemblée d’actionnaires d’une convention réglementée qui n’aurait pas été soumise à autorisation du conseil d’administration ou du conseil de surveillance dans les SA ;


la convocation de l’assemblée générale en cas de carence des dirigeants de SA et SARL, ou de remplacement d’un gérant unique décédé de SARL ;


la convocation de l’assemblée générale réduisant le capital d’une SARL lorsque les capitaux propres sont inférieurs à la moitié du capital social ;


le rapport relatif à l’appréciation de la réduction du capital des SARL ;


le rapport attestant que les capitaux propres sont au moins égaux au capital social lors d’une décision de transformation de la SA ;


la certification du montant global des rémunérations versées aux personnes les mieux rémunérées dans les SA ;


les rapports exigés pour les SA et SAS en cas d’augmentation de capital avec suppression du droit préférentiel de souscription ;


le rapport dans les SA portant sur le gouvernement d’entreprise ;


le rapport en cas de non-respect par des dirigeants de SA et SAS des obligations en matière de production des documents de gestion ;


la mention des prises de participations significatives ou de prise de contrôle de la société dans le rapport sur les comptes annuels dans toutes les sociétés commerciales ;


l’audition du commissaire aux comptes aux fins d’autorisation par le tribunal de commerce d’une cession de toute ou partie de l’actif de la société dans le cadre d’une liquidation judiciaire ;


la mention au rapport sur les comptes annuels de la réparation du capital et de l’autocontrôle dans les SA et SAS ;


certification de l’évaluation des actions et parts sociales louées dans les SA SAS et SARL.


 


Mise en œuvre de missions ad hoc


La loi PACTE prévoit des cas obligatoires de désignation ad hoc de commissaires aux comptes pour les sociétés qui ne dépassent pas les seuils prévus, pour établir des rapports liés à des opérations ponctuelles, notamment : les augmentations de capital avec suppression du droit préférentiel de souscription sans indication du nom des bénéficiaires (L. 225-136) ;


les augmentations de capital avec suppression du droit préférentiel de souscription avec bénéficiaires dénommés ou au profit de certaines catégories de bénéficiaires ;


l’attribution gratuite d’actions (L. 225-197-1) ;


les conversions de stock-options (L. 225-177) ;


le rachat d’actions à destination du personnel salarié (L. 225-209-2) ;


la libération d’actions par compensation de créances (L. 225-146 du Code de commerce sans pour autant évincer le notaire de ce dispositif).


 


Désignation sur demande des minoritaires


Depuis la loi PACTE et la loi du 19 juillet 2019, les minoritaires qui détiennent au moins un tiers du capital peuvent demander la nomination d’un commissaire aux comptes pour trois ans, sur demande motivée.


Ce dispositif qui préexistait (suivant d’autres modalités) pour les SARL, les SNC et les SCS, a été étendu aux SA (L. 225-218 al. 4), SAS (L. 227-9-1 al. 5) ainsi qu’aux SCA (L. 226-6 al. 4), qui en bénéficient dès à présent.


Cette désignation emporte la mise en œuvre de la mission du commissaire aux comptes pour trois exercices, dans les conditions prévues par la mission d’audit légal des petites entreprises.


 


Désignation judiciaire des commissaires aux comptes


Le seuil pour la demande de désignation judiciaire d’un commissaire aux comptes est désormais fixé à 10 % de détention du capital pour les SA, SCA, SAS et SARL.


Aucun seuil de détention de capital n’est requis pour les associés de SNC et de SCS.


 


Antoine Rousseau,

Avocat associé,

Alerion – Société d’avocats


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