Lancée
en 2020, Elleboss.fr vient de boucler sa première levée de fonds. Cette
plateforme, soutenue par Réseau Entreprendre Yvelines, met en
relation des entreprises qui peinent à recruter de façon
« classique » et des travailleuses indépendantes en quête de missions
flexibles. Entretien avec sa co-fondatrice, Juliette Mandrin.
JSS : Pourquoi avoir
créé Elleboss ? Quel a été le « déclencheur » ?
Juliette Mandrin : Nous sommes un couple à l’initiative du projet. L’idée
est venue d’un ras-le-bol du salariat et de ses contraintes pour ma part, et
d’un besoin de plus de liberté et d’autonomie dans ma prise de décision tout en
ayant un bon équilibre entre vie professionnelle et personnelle. J’ai constaté
que de nombreuses femmes partageaient cette envie de travailler autrement, à
temps choisi pour plus de flexibilité.
De son côté, mon conjoint
et associé, Nicolas Jaboulay, chef d’entreprise dans les assurances depuis 25
ans, identifiait depuis longtemps chez ses clients de vraies difficultés de recrutement,
le besoin pour les entreprises d’être soulagées sur des sujets chronophages et
de trouver des alternatives à l’intérim et au CDD. De ces différents constats
est née la plateforme Elleboss.fr.
Si l’idée a émergé juste
avant la crise sanitaire, nous l’avons mise en œuvre courant 2020, juste après
le Covid qui a provoqué de réelles mutations du marché du travail. Créer une
connexion entre les entreprises ayant besoin de talents et les travailleuses
indépendantes était alors une évidence !
Quel est l’objectif de
votre plateforme et quels sont les services proposés ?
Elle met à disposition
des entreprises un vivier d’expertes. Elleboss initie l’échange entre les deux
parties. Les entreprises peuvent être autonomes (déposer une mission
gratuitement, réaliser un devis, contractualiser avec la ellebosseuse) ou être
accompagnées par un manager qui gérera tout pour elles. Idem pour les candidates,
qui ont de surcroît l’avantage d’accéder à une assurance de responsabilité
civile professionnelle indispensable pour pouvoir exercer, ainsi qu’une
prévoyance et une garantie de paiement.
Juliette Mandrin, co-fondatrice de elleboss.fr
« J’ai constaté que de nombreuses femmes
partageaient cette envie de travailler autrement, à temps choisi pour plus de
flexibilité. »
Par ailleurs, outre un accompagnement
personnalisé, la plateforme propose aux ellebosseuses des tests de compétence
et de personnalité, ce qui rassure également le client.
La plateforme propose enfin
tout un panel de services d’accompagnement via des ateliers pour rompre
l’isolement, développer une communauté inclusive et valoriser l’entrepreneuriat
féminin tout en répondant aux enjeux RSE de mixité dans les entreprises, sujet
très ancré dans l’actualité.
Vous organisez notamment
des webinaires et ateliers. Quels sont les sujets du moment, les préoccupations
phares ?
En effet, nous organisons
un à deux webinaires par mois sur des sujets identifiés auprès de nos
utilisateurs. Animés par des professionnels, ils sont notamment orientés sur le
bien-être des travailleuses indépendantes ou sur les bonnes pratiques en
matière d’utilisation des réseaux sociaux, le tout en partenariat avec les
Foliweb (ateliers gratuits pour aider les TPE, entrepreneurs et indépendants
à réussir avec internet, ndlr). Nous proposons également des rencontres en
présentiel.
Pour l’heure, nos
ateliers s’adressent aux travailleuses indépendantes qui font appel à nous,
mais nous aimerions aussi en proposer qui soient orientés vers les entreprises.
Quels sont les profils
qui font appel à vous ? Combien de candidates Elleboss
recense-t-elle ?
Côté travailleuses
indépendantes comme côté entreprises, les profils sont extrêmement variés, mais
nous remarquons une récurrence dans certains domaines : l’administratif,
le juridique, la comptabilité, la communication, le marketing, la RSE, le
design graphique, l’informatique…
D’autre part, notre
typologie de « ellebosseuses » est très large, nous comptons parmi
elles des étudiantes, des retraitées, des mamans, des freelances ayant choisi
cette voie depuis longtemps. Et les hommes aussi peuvent postuler ! Nous recensons
environ 1 300 candidates actuellement - une centaine nous rejoignent
chaque mois – et notre taux de récurrence de mission s’élève à 70 %.
Quels éléments vous
distinguent d’autres plateformes similaires ?
Nous essayons de nous démarquer
de la concurrence par notre positionnement humain. Avec Nicolas, nous incarnons
notre entreprise. Pour ma part, j’ai un profil autodidacte et atypique, et les
femmes se reconnaissent dans ce que je fais.
Le développement des
services mêlant l’humain et le digital avec un accompagnement personnalisé
auprès des entreprises et des ellebosseuses est également un plus. Mais
surtout, nos candidates sont des femmes qui sont leur propre boss, et qui sont
donc très engagées et expertes en leur domaine.
Aussi, en passant par Elleboss, les entreprises s’exemptent des lourdeurs administratives et des
risques salariaux. Elles apprécient également la souplesse du service que nous
proposons : une entreprise peut tester la formule, sans engagement, et
trouver le service sur mesure dont elle a besoin.
Elleboss.fr est aussi une alternative intéressante à l’intérim, notamment
financièrement, car les entreprises ne paient qu’au moment de la finalisation
d’une mission. Les clients et les ellebosseuses peuvent bien sûr s’offrir des
services complémentaires accessibles sur abonnement, mais l’accès à la
plateforme est lui totalement gratuit.
Enfin, chez Elleboss, il
y a une vraie relation de prestataire à client entre travailleuses
indépendantes et entreprises plutôt qu’une relation hiérarchique, et c’est ce
qui fait, je pense, notre force.
Vous venez de boucler une
première levée de fonds. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ?
Nous venons en effet de
boucler notre première levée de fonds et, bien que cela n’ait pas été simple
étant une structure de taille intermédiaire, nous avons levé au total
400 000 euros. Nous avons trouvé nos business angels au sein de nos
clients et de réseaux d’entrepreneurs, et nous nous sommes rapprochés de la
Banque publique d’investissement (BPI) pour compléter cette levée.
Ces fonds nous permettent
d’augmenter notre visibilité et nos actions de notoriété, mais aussi de
recruter deux salariés supplémentaires dans notre équipe actuellement
constituée de deux associés, deux business developpers et deux salariés à la
fonction-support sur la partie utilisateur. Nous entendons également développer
toute la partie client, grands comptes et start-up.
Quelles sont les
évolutions prévues à moyen terme ? Envisagez-vous de vous étendre au-delà de
l’hexagone ?
Notre objectif est de
proposer de plus en plus de services aux utilisateurs et de faire évoluer la
plateforme et les outils.
Nous voudrions également
proposer un axe formation plus fort et faire grandir le réseau d’ambassadrices
issues de notre communauté d’ellebosseuses. Nos ambassadrices sont nos
meilleurs porte-paroles avec notre équipe commerciale et permettent d’entretenir
une relation de proximité avec de futures ellebosseuses.
Pour l’heure, nous nous
concentrons sur le territoire français. Nous souhaitons rayonner dans la France
entière d’ici deux ans et nous nous déployons en priorité dans les grosses
métropoles comme Lyon, Bordeaux et Lille. Nous envisagerons peut-être une
seconde levée de fonds à horizon 2025 pour poursuivre notre évolution.
Propos recueillis par Allison Vaslin