Pour ce qui est des modes amiables de règlements des
différends, le choix est multiple :
négociation, conciliation directe, conciliation avec un tiers, médiation, médiation
de consommation, médiation pénale, sans parler de processus collaboratif et de
procédure participative de règlement amiable.
La
professeure
Amrani-Mekki écrivait en 2018 : « Concevoir
l’amiable n’est pas chose aisée, car les textes et les pratiques reposent sur
des philosophies bien différentes », et que « la profusion des textes concernant les modes amiables et leur
localisation dans des supports divers conduisent à qualifier d’amiables des
processus très divers (in La Semaine juridique – 26 mars 2018).
Médiation et conciliation sont-ils deux termes pour
désigner la même chose ?
Si on s’intéresse à leur origine latine : médiation vient de mediare qui signifie partager en deux,
être au milieu, s’interposer et conciliation de conciliare qui signifie réunir,
assembler.
Selon le Larousse, la médiation est
l’entremise, intervention destinée à amener un accord. Fait de servir
d’intermédiaire, en particulier dans la communication.
La conciliation est l’action qui vise à rétablir la bonne entente entre des personnes
dont les opinions ou les intérêts s’opposent.
La conciliation est une démarche très
ancienne, c’est pourquoi le doyen Cornu la qualifiait de « millénaire, biblique et proverbiale ».
Deux lois d’août 1790 ont fait de la conciliation un
préalable obligatoire confié aux juges de Paix. Dispositions amendées en 1806,
pour être supprimées en 1949.
Il faut attendre 1975 pour que le nouveau Code de
procédure civile (NCPC) affirme qu’il entre dans la mission du juge de
concilier les parties, ce qu’elles peuvent également faire seules en
application des articles 127 et 131 Code de procédure civile (CPC).
Afin de décharger les juges, mais aussi d’encourager
le règlement amiable des petits Litiges, un décret n° 78-381 du 20 mars 1978 crée la fonction
de « conciliateur ».
C’est un autre décret, celui du 13 décembre 1996 qui en fera des « conciliateurs de justice », et celui du 28 décembre 1998 qui permettra au juge de leur déléguer sa mission de
conciliation.
Les médiateurs n’arriveront dans notre droit
que par la loi du 8 février 1995 et par son décret d’application du 22 juillet 1996 qui traite aussi de la conciliation.
Les histoires de la conciliation et de la médiation
sont donc bien différentes, et si le législateur a institutionalisé la médiation
alors que la conciliation était déjà bien présente, ne serait-ce pas parce que
les deux différent ?
La professeure Guillaume-Hoffnung (in Que
sais-je, Puf 2012) évoque l a «
nébuleuse médiation-conciliation ».
Outre
que la « confusion entre médiation et conciliation
peut véritablement devenir un frein à leur développement » (in Mémoire de
recherche 2015, Médiation et
conciliation, quelle distinction en matière juridique ? de Adeline
Audrerie, – Université de Toulouse 1
Capitole), il ne s’agit pas d’une question de pure sémantique mais aussi
pratique :
• comment le citoyen/consommateur peut-il choisir ?
• comment les avocats peuvent-il en effet
exercer leur rôle de conseil, proposer (« prescrire ») un mode alternatif de
règlement des différends (MARD), accompagner efficacement leurs clients, si
tout est dans tout et réciproquement ?
Pourtant les textes récents les mêlent bien souvent,
comme par exemple :
• le décret de 1996 qui les traite conjointement,
• celui du 11 mars 2015 qui imposait de justifier d’une tentative de
règlement amiable dans les actes introductifs d’instance (art. 56 et 58 CPC),
malheureusement supprimée par le décret du 11 décembre 2019 sauf dans quelques cas assez marginaux,
• de même la directive du 21 mai 2008, transposée sans aménagement qui avance une définition si large
de la « médiation » qu’elle peut recouvrir
la conciliation…
Ainsi médiation et conciliation sont-elles jumelles
(I) ou ont-elles un lien de parenté (II) ?
I. MÉDIATION ET CONCILIATION SONT-ELLES JUMELLES ? (MÉDIATION ET CONCILIATION
JUDICIAIRES)
Pour répondre à cette question, de façon la plus
complète possible, il convient d’examiner médiateurs et conciliateurs à travers
leurs statuts (A), leurs missions et leurs techniques (B).
A. DES STATUTS
DIFFERENTS
Le conciliateur p eut être
le juge (art. 21 CPC) ou un « conciliateur
de justice ».
Dans
ce cas, en application du décret du 20 mars 1978, il est « nommé
pour un an par ordonnance du
Premier président de la cour d’appel, après avis d u procureur général, sur proposition du juge d’instance », puis, peut être maintenu dans sa fonction pour une
période de trois ans elle-même renouvelable (art. 3 D.20.03.78).
Il
prête le serment de « loyalement remplir (ses)
fonctions avec exactitude et probité et d’observer en tous les devoirs qu’elles
(lui) imposent ».
Il « est placé sous l’autorité hiérarchique du Premier président de la cour
d’appel » (in « G uide
des conciliateurs de justice »).
La compétence territoriale du conciliateur de justice
est délimitée dans l’ordonnance de nomination, alors que le médiateur ne
connaît aucune limite territoriale d’exercice.
Quant
à lui, le médiateur jure « d’exercer
(sa) mission de médiateur en (son) honneur et conscience et de ne rien révéler
ou utiliser de ce qui sera porté à (sa) connaissance à cette occasion »
(art. 10 D. 09-10-17).
L’activité du médiateur est rémunérée, celle du
conciliateur bénévole.

La fonction de médiateur est compatible avec
l’exercice d’une profession juridique réglementée (avocat-art 6.3.1 RIN,
notaire, huissier, expert-comptable ou commissaire aux comptes).
La fonction de conciliateur de justice est
incompatible avec toute fonction judiciaire mais aussi avec l’exercice d’une
profession juridique réglementée (art. 3 décret du 20 mars 1978).
Elle
est également incompatible avec to ute « autre fonction de
médiateur, habituelle ou occasionnelle, rémunérée ou bénévole » (in « Guide des conciliateurs de justice »), à
l’exception de la médiation de la consommation…Comme le dit la professeure Natalie Fricero, le
conciliateur est « collaborateur du service de la justice ».
Elle ajoute que le juge est le partenaire privilégié
du conciliateur, présent pour régler toutes les difficultés que peut connaître
ce dernier.
Comme pour le ministère de la Justice (justice.gouv.fr),
et les « Conciliateurs de France » il est « un auxiliaire de justice assermenté
» (conciliateurs.fr).
Le conciliateur
de justice est aussi qualifié « d’adjoint
du juge » (in rapport Magendie « Célérité
et qualité de la justice »), tandis que le médiateur est un tiers à la
juridiction, nommé pour la durée de la médiation, seule période pendant
laquelle il est partiellement sous son contrôle (Ibidem).
Ainsi le conciliateur de justice
tiendrait son autorité du juge, et le médiateur des parties.
En application de l’article 129-1 CPC,
le juge ne peut déléguer sa mission de conciliation qu’en « vertu d’une disposition particulière ».
Ainsi, le juge des référés d’un tribunal de commerce ne peut pas
proposer/ordonner une conciliation, alors qu’un médiateur peut être désigné en
tout lieu de justice.
Le conciliateur, délégué du juge, dispose d’un
pouvoir d’enquête en vue de vérifier la véracité des affirmations des parties
en se rendant sur place et peut entendre toutes personnes en application de
l’article 1538 CPC.
Inversement, le médiateur ne dispose d’aucun pouvoir
d’instruction ainsi que le précise l’article 131-8 CPC.
S’il peut, avec l’accord des parties, entendre des
tiers qui y consentent, c’est pour « étendre le cercle de la communication » (in « Médiation et conciliation quelle distinction en matière juridique ? » – Mémoire de recherche 2015, Adeline Audrerie – Université Toulouse 1 Capitole).
Les
textes ne détaillent pas le rôle du juge conciliateur, mais un arrêt de la
Chambre sociale de la Cour de cassation précise que « la conciliation est un acte judiciaire qui implique une participation
active du bureau…ayant notamment vérifié que les parties étaient informées de
leurs droits respectifs » (Soc. 28 mars 2000, BC V, n° 135).
Ce qui signifie qu’il doit assurer le respect des
principes directeurs du procès. Il ne peut qu’en être de même du conciliateur
de justice, son délégué.
Ainsi en conciliation judiciaire, le principe du
contradictoire des articles 15 et 16 du CPC doit
être respecté, et donc les
« apartés » proscrits, ce qui n’est pas le cas en médiation qui
préfère ceux d’équilibre et d’équité et où les entretiens séparés sont quasi
systématiques.
Les pièces des parties doivent donc être
préalablement communiquées alors qu’elles sont très rarement exploitées en
médiation.
Devant
le conciliateur les parties peuvent être assistées « par
une personne ayant qualité pour le faire devant la juridiction ayant délégué la
conciliation » (art. 129-3 CPC), alors qu’elles le seront, le plus souvent,
uniquement par leurs avocats respectifs en médiation.
Ainsi le conciliateur ne pourra pas s’opposer à la
présence d’un tiers « ayant qualité », alors qu’en
médiation, il
faudra l’accord de tous sauf pour la
présence des conseils.
De
façon plus anecdotique, rappelons que le même article précise que le conciliateur « convoque en tant que de besoin les parties aux lieu, jour et heure
qu’il determine », alors
que le médiateur conviendra d’une date avec elles et ne les « convoque » pas, il les invite.
En fin de processus, le document écrit récapitulant
l’accord des parties est signé par le conciliateur, pas par le médiateur.
Terminons
en relevant que leurs missions sont différentes puisqu’en application de
l’article 1 du décret du 20 mars
1978, le conciliateur a pour mission de « rechercher
le règlement amiable d’un différend… » quand le médiateur doit « permettre
(aux parties) de trouver une solution au conflit qui les oppose » (art. 131-1 CPC).

B. DES
TECHNIQUES ET DES OBJECTIFS DIFFERENTS
Techniques
Les textes sont muets sur les techniques du
conciliateur.
La rapport Magendie affirme que le conciliateur doit
s’attacher aux demandes formées par les parties et donc, si l’on comprend bien,
sur les faits et arguments juridiques qu’elles développent.
Dans son « Guide des modes amiables de
résolution des différends » (Dalloz 2014), la professeure Natalie
Fricero soutient que le conciliateur peut procéder à des incursions dans la
discussion entre les parties et orienter leurs échanges.
Il n’est pas simple de traiter des techniques du
conciliateur car, outre des textes muets, la littérature est quasi inexistante.
Si le conciliateur a suivi des formations à la
médiation, rien ne s’oppose à ce qu’il les utilise, mais encore faut-il que
l’avocat « accompagnateur » en soit prévenu
(cf infra). Si l’on s’en tient uniquement à l’article 131-1 CPC, le médiateur,
de son côté, a deux techniques :
• entendre les parties ;
• confronter leurs points de vue.
Dans « La
gestion des conflits » (Economica 2004), Thierry Garby soutient que la
médiation est une « philosophie de la
facilitation ».
Raison pour laquelle les publications sont nombreuses
tant sous les angles juridiques que psychologiques (Vincent Liquete Médiations
CNRS Éditions 2010) et sociologiques. Ainsi, Monsieur Ben Mrad (in « Informations sociales » 2012/2, n° 170
– Sociologie des pratiques de médiation, L’Harmattan 2002) démontre
qu’elle est un « processus de communication librement consenti ».
L’avocat bien informé peut ici aussi aider son client
dans le choix du médiateur en prenant connaissance de sa formation : médiation « raisonnée »,
« transformative » (travail sur le
futur) ou « narrative » (travail sur
le contexte social et culturel).
Ainsi le processus de médiation peut être varié, mais
à la différence de la conciliation, il sera toujours qualifié de « structure », e t ses th éoriciens ont défini une entrée commune à toutes les
médiations : la PORTE (P : présentations, O : objectifs, R : règles, T : temps,
E : étapes ou engagement).
Pour l’avocat accompagnateur, le R est très
important, car il lui permet d’adapter son accompagnement, c’est-à-dire la
préparation de son client à chacune des phases annoncées.
Objectifs
Si les textes imposent au conciliateur de justice de
justifier d’une formation juridique c’est, à l’évidence, parce qu’il a un rôle
juridique, nous l’avons vu plus haut.
Aussi, l’avocat va activement participer à la
présentation du débat juridique, il peut expliquer au conciliateur les points
de droit en discussion et laisser son client répondre aux questions de ce
dernier sur les éléments factuels.
En conciliation, l’avocat semble devoir être un
participant actif.
Et, dans son rôle de conseil de son client, il va
préalablement déterminer les points de droit les plus faibles et les plus
forts, et ceux sur lesquels un compromis est possible, voire même prudent.
Un certain nombre de médiateurs ne sont pas
juristes.
Tous les travaux sur la médiation considèrent que
l’écoute active que s’impose le médiateur, la communication circulante, et
l’expression des émotions permettent effectivement de traiter, voire même de purger le conflit, mission du médiateur en application de l’article 131-1 CPC.
Béatrice Blohorn-Brenneur le dit fort bien : le conflit
personnel doit être distingué du litige juridique, et allant plus loin, Michèle
Guillaume-Hofn ung (in « La médiation », PUF 2014) conclut que la médiation est « un processus de création du lien social
».
Il
y a une différence de missions et de modes opératoires, pourtant, la durée de
leur mission est la même : trois mois renouvelables une fois pour
l’un comme pour l’autre, mais elle semble pouvoir être
plus courte pour le conciliateur (art. 129-1 CPC : le juge « fixe la durée de sa mission et indique la date à laquelle l’affaire
sera rappelée »).
Médiation et conciliation ne sont donc pas
jumelles !
II. MÉDIATION ET
CONCILIATION ONT-ELLES UN LIEN DE PARENTÉ ? (MÉDIATION ET CONCILIATION CONVENTIONNELLES)
Même
si l’article 1537 CC
précise qu’en matière conventionnelle, comme le médiateur a l’habitude de le
faire, le conciliateur « invite les
intéressés... », il ajoute cependant que ces derniers « peuvent se faire accompagner d’une personne
majeure de leur choix, qui justifie de son identité », ce qui semble inusité en médiation, nous avons
déjà pu rappeler, ci-dessus, quelques points de convergence en droit, il en
existe bien d’autres en particulier juridiques (A), mais qu’en est-il en
pratique (B) ?
A. EN DROIT
Le droit communautaire, lui-même définissant la médiation, manifeste sa
confusion entre ces deux MARD (directive 21 mai 2008 art.
3), puisqu’il est ainsi libellé :
«
Aux fins de la présente directive,
on entend par :
• médiation, un
processus structuré, quelle que soit la manière dont il est nommé ou visé, dans
lequel deux ou plusieurs parties à un litige tentent par elles-mêmes,
volontairement, de parvenir à un accord sur la résolution de leur litige avec
l’aide d’un médiateur. Ce processus peut être engagé par les parties, suggéré
ou ordonné par une juridiction ou prescrit par le droit d’un État membre, même
si elle semble écarter la conciliation par le juge et donc par le conciliateur :
... Elle exclut les
tentatives faites par la juridiction ou le juge saisi d’un litige pour résoudre
celui-ci au cours de la procédure judiciaire relative audit litige (Cf
cependant le Considérant 12 de la directive prévoit que le juge puisse être le
médiateur de l’affaire si la législation de son État membre le prévoit).
• médiateur, tout tiers
sollicité pour mener une médiation avec efficacité, impartialité et compétence,
quelle que soit l’appellation ou la profession de ce tiers dans l’État membre
concerné et quelle que soit la façon dont il a été nommé pour mener ladite médiation ou dont
il a été chargé de la mener ».
La même confusion se retrouve dans l’article 1 de l’ordonnance de transposition du 16 novembre 2011 rédigé de la façon suivante :
Le chapitre Ier
du titre II de la loi du 8 février 1995 susvisée est remplacé par le chapitre suivant : Chapitre Ier La médiation Section 1 Dispositions
générales
« Art. 21. - La
médiation régie par le présent chapitre s’entend de tout processus structuré,
quelle qu’en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent
de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends,
avec l’aide d’un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur
accord, par le juge saisi du litige. »
En matière conventionnelle, aucun texte ne précise l’étendue de leurs
missions respectives mais, pour ce qui est de leurs modalités d’exécution,
médiateurs et conciliateurs sont soumis au même article 1530 CPC qui leur
« impose impartialité, compétence et
diligence ».
L’article 1531
ajoute que « la médiation et la conciliation conventionnelles sont soumises au
principe de confidentialité dans les conditions et selon les modalités prévues
des articles 21 et 21-2 de la loi du 8 février 1995 susmentionnée » (notons
que les articles 21 et 21-1 L. 8 février 1995 traitent de la seule médiation).
La jurisprudence sanctionne de façon identique, par l’irrecevabilité de
l’action, le non respect du caractère obligatoire d’une clause de médiation ou
de conciliation préalable, par une de fin de non-recevoir, non régularisable
(Cf Cass.chambre mixte 14 février 2003
n° 00-19423 et 00-19424 pour une
clause de conciliation et Cass.com. 3 octobre 2018
n° 17-21089 pour une clause de
médiation).
Par application de
l’article 2238 CC, « la prescription est suspendue à compter du
jour où, après la survenance d’un litige, les parties conviennent de recourir à
la médiation ou à la conciliation ou, à défaut d’accord écrit, à compter du
jour de la première réunion de médiation ou de conciliation ».
En fin du processus de médiation (art. 1534 CPC) comme de conciliation (art. 1541 CPC), la demande d’homologation doit
être déposée par l’ensemble des parties.
Terminons en rappelant que médiateurs et conciliateurs encourent
éventuellement les mêmes sanctions pénales de l’article
434-9 !

A. EN PRATIQUE
L’article
1529 du CPC définit de manière étendue
la nature des litiges pouvant donner lieu à la résolution amiable par la voie
de la médiation et de la conciliation : « les
différends relevant des juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière
civile, commerciale, sociale ou rurale, sous réserve des règles spéciales à
chaque matière et des dispositions particulières à chaque juridiction ».
Il
ajoute désormais qu’elle « s’appliquent en matière
prud’homale sous la réserve prévue par le troisième alinéa de l’article 2066 du
Code civil ».
Ainsi, le champ d’action des médiateurs et des
conciliateurs est vaste, les médiateurs pouvant, au surplus, agir dans quelques
domaines spécifiques qui leur sont réservés (médiation familiale par exemple).
Globalement, le même niveau légal de compétence est
attendu des conciliateurs et des médiateurs.
Pour
le médiateur, l’article 1533 du CPC exige qu’il possède «
par l’exercice présent ou passé d’une activité, la qualification requise eu
égard à la nature du différend ou (justifie), selon le cas, d’une formation ou
d’une expérience adaptée à la pratique de la médiation ».
Ajoutons cependant que le Code national de déontologie des médiateurs, sans caractère contraignant,
dispose que le médiateur « doit avoir suivi et posséder la
qualification spécifique à la médiation… » et se trouve tenu par une
obligation de formation continue dans le domaine de la médiation, ce qui est
une exigence pour qu’il soit « agréé FFCM
» (formation initiale : 200h ; formation continue : 20h/an).
De
leur côté, les conciliateurs de justice doivent justifier « d’une formation ou d’une expérience juridique et que (leurs)
compétences qualifient particulièrement pour exercer (leurs) fonctions ».
Un décret du 29 octobre 2018 prévoit en outre en son article 3-1
al. 1 que « le conciliateur de justice suit une journée de formation initiale au cours
de la première année suivant sa nomination. Il suit une journée de formation
continue au cours de la période de trois ans suivant chaque reconduction dans
ses fonctions ».
Mais pour les uns comme pour les autres, aucun
diplôme en droit et/ou en négociation (ou formation à ses techniques) n’est
exigé, si ce n’est, pour cette dernière, en vue de l’inscription du médiateur
sur la liste d’une cour d’appel !
Le seul diplôme national est celui relatif à la
médiation familiale sans qu’il n’entraîne d’ailleurs de monopole de cet
exercice au bénéfice de leurs titulaires.
Dans un mémoire présenté en 2018 (Université Paris
Descartes), éric Charlemagne
présente ainsi la « conciliation idéale » :
Objet : travaille essentiellement sur les contenus.
Durée : fréquemment 30 minutes à 3 heures (souvent
plus court qu’une médiation).
Méthode et aboutissement : aux solutions proposées
par les personnes… le conciliateur, dans son rôle, peut apporter de nombreuses
suggestions dans l’intérêt de toutes les parties, de manière incitative, sans
être décideur. Et la « médiation idéale » :
Objet : travaille sur le contenu, les relations, les
perceptions subjectives et ressenties des acteurs…
Durée
: selon qu’il s’agisse de personnes ou d’équipes, la durée comprend les
entretiens individuels et les entretiens entre les parties. Elle peut varier de
3 heures à environ 12 heures
ou plus…
Méthode et
aboutissement : le
médiateur se donne comme mission de travailler encore plus à la compréhension
réciproque entre acteurs, à la mise à jour des besoins de tous, à l’émergence
du maximum de solutions que les acteurs peuvent se proposer les uns aux autres…
Le médiateur peut ajouter des idées au pot commun des solutions seulement si
les acteurs ne les ont pas trouvées eux-mêmes.
Sur
les méthodes, il synthétise : « le
conciliateur propose aux parties et le médiateur des solutions par les parties
».
Mais, bien que les deux « fonctions » leurs soient incompatibles (service-public.fr), nombre de conciliateurs estiment nécessaire de se former aux techniques
de la médiation et les utilisent dans leur pratique (emploi-public.fr
écrit :
« le conciliateur est un médiateur »
!).
Inversement, en certaines matières (conflits
commerciaux, entre sociétés…), des médiateurs deviennent plus « aviseurs » en n’hésitant pas à proposer eux-mêmes des solutions en cas de blocage.
Si médiation et conciliation ne sont pas sœurs, elles
sont incontestablement cousines !
Dans un article paru en 2016 (In « Village de
la justice ») Christophe
Courtau, conciliateur de Justice près
le tribunal d’instance de Versailles n’hésitait pas à écrire :
« La fusion de la médiation et de la conciliation
conventionnelle : transférer la conciliation conventionnelle au médiateur pour
une meilleure lisibilité ».
À juste titre, il ajoutait : « Confronté à une l’offre pléthorique de modes de
règlement amiable des litiges mis en œuvre par des intervenants aux noms,
statuts et coûts différents, le justiciable, renommé médié, conciliable ou
sollicitant, éprouve des difficultés à identifier
le bon interlocuteur privé ou institutionnel, mais aussi le mode de résolution
amiable adapté à son litige (médiation ou conciliation conventionnelles) ».
Et, allant très loin, il proposait :
« La fusion de la médiation et de la
conciliation conventionnelles sous forme de médiation/conciliation attribuée
exclusivement à un médiateur serait de nature à simplifier cette offre de
résolution amiable des litiges et d’en renforcer l’accès.
Le
conciliateur abandonnerait donc sa compétence en matière de conciliation conventionnelle au
profit du médiateur pour les raisons liées à l’évolution du droit européen en
la matière, de clarification de l’offre des règlements amiables et de
concurrence déloyale avec les professionnels du droit et de la médiation. »
De son côté Jacques Salzer suggère que l’on pourrait aboutir au choix
par un personnage unique, le médiateur/conciliateur, de la méthode la plus
adaptée, en accord avec les parties (In « Méthode de Médiation. Au cœur de
la conciliation » - Ed. Dunod - Alain Pekar Lempereur, Jacques Salzer,
Aurélien Colson).
La conciliation est un rouage actif de l’Institution
judiciaire, la médiation y prend de plus en plus sa place.
La conciliation conventionnelle occupe une part très
importante de l’activité des conciliateurs, les clauses de médiation sont de
plus en plus fréquentes et la médiation, hors toute saisine du juge, connaît
désormais un essor remarquable.
Ainsi, médiation et conciliation occupent une place
majeure au sein des MARD.
Indubitablement,
médiateurs et conciliateurs partagent aussi des convictions et des valeurs
commun : l’apaisement du conflit, la restauration
de la parole et de l’échange, du lien social, l’humanisme.
Il est temps qu’ils échangent pour qualifier et
évaluer ce qui les diffère dans l’intérêt des citoyens !
Il
est temps que, conscients de leurs différences, ils collaborent pour apprécier
et valoriser ce qui les rassemble !
Bâtonnier Claude Duvernoy,
Médiateur,
Ancien Président de la F.F.C.M.,
Président de Médiation en Seine
Claude Bompoint Laski,
Avocat honoraire – médiateur,
Vice-présidente de la F.F.C.M.,
Présidente de Bayonne Médiation