Le président de la République
s’est récemment entretenu avec les industriels du secteur de l’armement
français afin d’évaluer leur capacité à augmenter la production et à quel
rythme. Cette initiative s’inscrit dans un vaste plan de réarmement visant à
faire face à la Russie, tout en réduisant la dépendance de la France vis-à-vis
des États-Unis. Parallèlement, mardi 18 mars, Vladimir Poutine et Donald Trump
sont parvenus à un accord sur un cessez-le-feu de la guerre en Ukraine à
l’issue d’un entretien téléphonique de près de deux heures.
« Face à ce monde de
dangers, rester spectateurs serait une folie. » Mercredi 5 mars,
Emmanuel Macron, dans son allocution, l’air grave, fixait un nouveau cap pour
la France et l’Europe face à la « menace Russe » de Vladimir
Poutine. Pour répondre à cette crise, le président de la République a promis
des « investissements supplémentaires » en matière de défense
miliaire, insistant également sur le fait que la paix pourrait probablement
passer « par le déploiement de forces européennes » en Ukraine.
Un climat d’autant plus incertain que les États-Unis de Donald Trump ne sont
peut-être plus l’allié fiable qu’ils avaient pu être par le
passé, soutenant « moins l’Ukraine » et laissant « planer
le doute sur la suite [du conflit] ».
Comment, dans ce jeu d’échec
géopolitique, la France et l’Europe - à la manœuvre d’un plan de réarmement de
800 milliards d’euros dont 150 milliards de prêt à disposition des États
membres, « ReArm Europe », annoncé par Ursula Von Der Leyen,
présidente de la Commission européenne -, peuvent-elles tirer leur épingle de
ce jeu dangereux ?
« Au moins, maintenant,
il y a un réveil »
Pour Louis Duclos, analyste
géopolitique spécialisé en relations internationales, cette prise de conscience
de l’Union européenne est bienvenue, quoiqu’elle aurait dû survenir bien plus
tôt. « Ce sont des changements qui auraient dû avoir lieu il y a trois ans,
lorsque la Russie a attaqué l’Ukraine. C’est à ce moment-là que l’Union
européenne aurait dû clairement se réveiller et se révolter. Au moins,
maintenant, il y a un réveil. » Un sursaut qui ne découle cependant pas
d’une volonté sincère de protéger l’Ukraine — « ce n’était pas dans leur
plan, car ils n’en avaient pas la capacité » — mais bien d’un instinct de
survie. « Ils n’ont plus le choix », analyse-t-il, pris en étau entre
Vladimir Poutine et Donald Trump.
Ce dernier avait provoqué une
levée de boucliers parmi les dirigeants européens après son altercation
historique avec Volodymyr Zelensky, le 28 février, lors d’une rencontre à la
Maison-Blanche censée aboutir à un accord sur l’exploitation des ressources
minérales ukrainiennes en échange d’un soutien à la sécurité du pays. Le
président des États-Unis avait conclu l’affrontement par un cynique : « Cela
va être formidable pour la télévision. » « Zelensky s’est fait traiter
comme le dernier des nuls », déplore Louis Duclos.
En guise de réponse, dès le
lendemain, Keir Starmer, Premier ministre britannique, convoquait les États
membres de l’UE ainsi que le Canada et la Turquie, également engagés avec
l’Europe contre la Russie, à un sommet sur l’Ukraine, organisé à Londres le 2
mars 2025. Objectif : élaborer, sans l’Amérique, une réponse crédible au
conflit russo-ukrainien.
Cette prise de conscience
vise avant tout à éviter un scénario catastrophe, où une Russie victorieuse et
en plein réarmement poursuivrait son expansion. Emmanuel Macron lui-même alerte
sur cette menace, affirmant que Moscou « consacrerait plus de 40 % de son
budget à l’effort de guerre » et que « d’ici 2030, elle prévoit d’accroître
encore son armée avec 300 000 soldats supplémentaires, 3 000 chars et 300
avions de chasse de plus ». Face à cette hypothèse, le président français s’interroge
: « La Russie d’aujourd’hui s’arrêtera-t-elle à l’Ukraine ? »
Un plan allemand de 900
milliards d’euros qui pourrait profiter à la France
Luis Duclos abonde dans ce
sens : « Si un pays de l’OTAN ou de l’Union européenne est attaqué, Poutine
pourrait très bien s’en prendre à la Moldavie, à la Roumanie ou encore aux
États baltes, car il nourrit une nostalgie de l’URSS de son enfance, dans ce
contexte, une réaction tardive de notre part aurait pu être fatale. Mais avec
les moyens engagés par la France et l’UE, notamment ces 800 milliards d’euros,
la situation est encourageante. Il faut rester optimiste. »
D’autant que l’Allemagne ne
reste pas en retrait. Le futur chancelier Friedrich Merz, qui a dénoncé, mardi
18 mars, devant les députés du Bundestag, une « Russie agressive » et
des « États-Unis imprévisibles », a annoncé un investissement de 900
milliards d’euros pour la défense et l’industrie, qualifié de « premier
grand pas vers une nouvelle communauté européenne de défense ». Pour l’analyste,
« si l’Allemagne prend une telle initiative, c’est le signe d’un véritable
changement de paradigme en Europe. Nous entrons dans une nouvelle ère,
incertaine certes, mais pas nécessairement à notre désavantage. »
Un investissement massif
outre-Rhin qui pourrait, par effet de ricochet, profiter à la France et plus
largement à l’Europe, relève Sylvain Bersinger, chef économiste au cabinet
Asterès : « On peut dire merci à Trump. L’Allemagne opère un basculement
économique majeur, qui stimulera la croissance bien au-delà du seul secteur de
l’armement. Une hausse des dépenses entraîne une baisse du chômage et une
augmentation des salaires. »
Toutefois, les effets ne
seront pas immédiats, nuance-t-il : « Cela pourrait se diffuser vers les
pays scandinaves, et c’est déjà le cas en Pologne, qui investit massivement
dans l’armement. Il y aura sans doute un impact global sur la croissance
européenne, mais plutôt à l’horizon 2026-2027. »
Macron souhaite 100 milliards
d’euros pour l’armée française
Quant à la France, peut-elle,
à l’instar de l’Allemagne, en passe de devenir le « leader européen de la
défense », basculer rapidement vers une économie de guerre ? À ce sujet,
Emmanuel Macron s’est entretenu, vendredi 14 mars, avec les industriels de
l’armement français - Safran, Dassault, Thales… - afin d’évaluer leur capacité
à intensifier la production et à quelle fréquence.
Par ailleurs, le chef d’État
a déjà exprimé, dans les colonnes du Figaro, sa volonté d’augmenter le
budget de la défense, passant de 2,1 % du PIB à 3,5 %, soit un peu moins de 100
milliards d’euros par an. Toutefois, conformément à la loi de programmation militaire (LPM) 2024-2030, et
selon le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, le budget de la défense, qui
s’élève à 50,5 milliards d’euros cette année (hors retraites militaires),
devrait atteindre environ 68 milliards d’ici 2030.
Un montant jugé insuffisant
par le ministre, qui plaide dans La Tribune Dimanche pour une enveloppe
plus ambitieuse, alignée sur la volonté du président : « Si l'on veut
reconquérir nos capacités de manœuvre dans la durée tout en répondant
souverainement aux enjeux posés par les nouvelles technologies, il est clair
qu'un horizon autour de 100 milliards d'euros par an constituerait le poids de
forme idéal pour les armées françaises. »
Cette position ne fait néanmoins
pas l’unanimité au sein du gouvernement. Éric Lombard, le ministre des
Finances, a tenu à tempérer ces ambitions sur BFM le 16 mars : « Je
vais faire mon ministre des Finances un instant. Sébastien Lecornu a parlé d'un
poids de forme de 100 milliards, mais il a dit qu'il était réaliste et que 70
milliards à l'horizon 2030, ce serait déjà très bien. »
La question du financement et
de la faisabilité de ce réarmement se pose donc. Comme pour l’Allemagne,
l’analyste géopolitique souligne qu’un tel effort prendra du temps et dépendra
des priorités budgétaires : « Il faudra voir dans quoi l’argent va être
investi. L’armée de terre ? De l’air ? La Marine ? ».
En revanche, la France
dispose cependant d’un atout majeur, absent chez son voisin : « Grâce aux
choix faits par nos aînés après la Seconde Guerre mondiale, nous sommes dotés
de capacités de dissuasion nucléaire », a défendu Emmanuel Macron dans son
allocution, proposant d’« ouvrir un débat stratégique » sur l’extension
de l’usage de la bombe atomique à certains alliés européens. En 2024, le coût
de modernisation et de renouvellement des systèmes d’armes nucléaires s’élevait
à 6,35 milliards d’euros.
« Faire ce qu’il faut,
ce n’est pas populaire »
D’après l’économiste, une
transition vers une économie de guerre est envisageable, à condition qu’une
véritable volonté politique se manifeste, ce qui suppose avant tout une
amélioration des finances publiques, actuellement très dégradées. Cela
passerait par « une baisse des dépenses, une augmentation des taxes,
travailler plus… mais est-ce que politiquement cela est crédible, surtout au vu
des difficultés actuelles de la France avec la réforme des retraites et le
budget ? ».
Le chef économiste estime que
« pour quelques dizaines de milliards d’euros, économiquement, la France en
est tout à fait capable, mais politiquement, c’est une autre histoire. Faire ce
qu’il faut, ce n’est pas toujours populaire. »
Problème : le chef du pouvoir
exécutif exclut toute augmentation des impôts pour financer le réarmement. Une
alternative envisagée serait la création d’un « Livret A militaire »,
destiné à soutenir l’effort de défense. Cette solution interroge Sylvain
Bersinger sur ses implications : « Si vous faites cela, les taux vont
mécaniquement augmenter pour le reste de l’économie, car une partie de
l’épargne serait orientée vers ce fonds au détriment des autres industries, ce
qui renchérira leurs coûts de financement. Ce ne sera pas gratuit et sans
conséquences. »
De son côté, Louis Duclos
insiste sur la nécessité de changer de perspective : « Il faut cesser de
comparer le budget français à celui de la Russie. On entend souvent dire que
nous ne pourrions pas tenir face à elle, mais c’est une erreur d’analyse. »
Selon lui, il est impératif d’adopter une vision européenne de la défense, en
consolidant un véritable bloc stratégique à l’Est, notamment en sécurisant la
Pologne, voisine de la Biélorussie, alliée de Vladimir Poutine, et la Finlande,
qui partage une longue frontière avec la Russie.
L’Italie de Giorgia Meloni,
mouton noir ?
Les moyens semblent donc
présents, à condition que tous les pays membres de l’Union européenne
parviennent à s’accorder sur une position commune. Or, parmi les États les plus
influents des Vingt-Sept, l’Italie, par exemple, ne partage pas entièrement les
idées affichées par Emmanuel Macron.
Dans un entretien accordé au
quotidien italien Il Foglio, le président de la République a cherché à
convaincre la première ministre italienne Giorgia Meloni de s’aligner sur la
position européenne, affirmant qu’il était « nécessaire que l’Italie soit [aux]
côtés [de l’Europe, qu’elle s’engage sur cette voie et qu’elle le fasse en tant
que grand pays européen ».
Entre l’Europe, l’Ukraine et
les États-Unis, la présidente du Conseil des ministres italien a adopté un rôle
de funambule de la relation transatlantique que Louis Duclos concède être une
bonne initiative : « Je trouve que c’est bien, à l’échelle européenne, que
tout le monde ne rejette pas Donald Trump d’emblée. Meloni adopte une posture
plus nuancée, à la manière du good cop, bad cop : tandis que Starmer et
Macron cherchent à incarner le leadership européen et à renforcer l’autonomie
stratégique de l’Union, ce qui pourrait provoquer des tensions avec Trump,
Meloni tente de maintenir un lien entre l’Europe et les États-Unis ».

Les
représentants de l’UE dont la Turquie et le Canada ont répondu à
l’appel de Keir Starmer pour se réunir à Londres © Union européenne
Ce qui divise, c’est
l’éventualité d’un déploiement de troupes européennes en Ukraine après
l’obtention d’un accord de cessez-le-feu, un projet auquel la France et le
Royaume-Uni se disent prêts à participer. Keir Starmer a d’ailleurs affirmé,
lors du sommet du 2 mars, travailler avec d’autres dirigeants à la formation
d’une « coalition de pays européens volontaires » qui s’engageraient
dans une mission de maintien de la paix à Kiev.
Cependant, Giorgia Meloni a
exprimé ses réticences, déclarant sur la Rai 1 qu’elle ne comptait pas
envoyer de soldats italiens en Ukraine, doutant de « l’efficacité » et
de la faisabilité du projet défendu par Emmanuel Macron et son homologue
britannique. Tout en insistant sur la nécessité d’éviter que « l’Occident se
divise », la première ministre italienne a réaffirmé sa volonté de
préserver de bonnes relations avec les États-Unis, et notamment avec le
président républicain, en matière de politique de défense.
La position de Meloni semble d’ailleurs
être la plus acceptable aux yeux du Kremlin, auprès duquel la proposition d’un
envoi de troupes en Ukraine a suscité une vive réaction. La porte-parole de la
diplomatie russe, Maria Zakharova, a prévenu qu’une telle initiative serait
considérée comme un « conflit armé direct ». Mise en garde qui contraste
avec l’attitude de la Russie elle-même, qui n’hésite pas à envoyer des soldats
nord-coréens sur le front.
Allié de toujours, les États-Unis
s’éloignent de l’Europe
Toutefois, selon l’analyste,
l’Italie ne serait pas le véritable problème. Celui-ci résiderait plutôt dans
la position plus ambivalente d’autres États proches idéologiquement de la
Russie. « Ce qui m’inquiète davantage, ce sont la Slovaquie de Robert Fico
et la Hongrie de Viktor Orbán, qui risquent de compliquer la prise de décision
au sein de l’Union européenne ».
Outre-Atlantique, les
États-Unis restent un allié stratégique, mais l’incertitude plane quant à leur
engagement sous la présidence de Donald Trump, dont la priorité demeure avant
tout les intérêts nationaux — « une tendance déjà observable sous Joe
Biden », juge Louis Duclos. L’ancien président a déjà, à plusieurs
reprises, remis en cause l’engagement américain au sein de l’OTAN, estimant que
les États-Unis ne devraient pas défendre les pays qui, à ses yeux, ne dépensent
pas suffisamment pour leur propre sécurité.
« S’ils ne paient pas, je
ne vais pas les défendre », a déclaré Donald Trump, jeudi 6 mars, devant
des journalistes depuis la Maison Blanche, avant d’ajouter, en critiquant
l’engagement transatlantique : « Si les États-Unis avaient un problème et
qu’on appelait la France, ou d’autres pays que je ne nommerai pas, en disant
"on a un problème", vous pensez qu’ils viendraient nous aider comme
ils sont censés le faire ? Je n’en suis pas sûr. »
Ironiquement, cette remise en
question de l’article 5 du traité de l’OTAN — qui stipule que toute agression
contre un membre de l’Alliance engage une réponse collective, qu’elle soit
militaire, humanitaire ou autre — contraste avec le fait que cette disposition
n’ait été invoquée qu’une seule fois dans l’histoire… par les États-Unis
eux-mêmes, après les attentats du 11 septembre 2001, entraînant la
participation de la France et des autres membres de l’OTAN à la guerre en
Afghanistan.
Dans cette logique de repli
sur soi, à l’issue de sa rencontre avec Volodymyr Zelensky, Donald Trump a
suspendu le 3 mars l’aide américaine à l’Ukraine, incluant le partage de
renseignements et les livraisons d’armes. Le 47e président des États-Unis a finalement annoncé
sa reprise le 11 mars, mais sous condition d’un cessez-le-feu de trente jours
accepté par Kiev.
Bien qu’il cherche à se
positionner comme un négociateur de paix, son approche reste avant tout dictée
par ses propres intérêts, comme l’explique pour TF1 Michael Stricof,
spécialiste des États-Unis : « Il veut être la figure de la paix. Il pense
que sa seule présence peut changer les choses et instaurer une nouvelle ère des
relations internationales, en renversant les équilibres établis. »
L’UE pourrait se passer du
soutien américain
Dans ce cadre où l’Union
européenne tente d’affirmer son autonomie stratégique, peut-elle réellement
assurer sa défense sans le soutien de Washington ? Selon le spécialiste de la
géopolitique, ce revirement ne joue pas en faveur des États-Unis : « Les
décisions récentes de Donald Trump isolent complètement l’Amérique. Ce qui
vient de se passer est catastrophique pour eux : ils se sont mis à dos toute
l’Europe et même le Canada, leur allié historique, qui les a suivis en Irak et
en Afghanistan », souligne-t-il, avant d’ajouter : « Trump pense qu’il a
le plus grand bâton et que ceux qui ne marchent pas avec lui doivent s’attendre
à des représailles. Mais à force de malmener ses alliés, ces derniers vont
finir par créer leur propre cercle sans l’Amérique. C’est déjà le cas en
Europe, et même le Canada préfère désormais se tourner vers l’Europe. »
Avec l’augmentation des
budgets alloués au réarmement, l’Union européenne pourrait donc être en mesure
de se passer du soutien américain. Louis Duclos estime en effet que « si
nous renforçons notre défense, nos effectifs, et que nous investissons
intelligemment les 800 milliards d’euros tout en prenant en compte les 900
milliards de l’Allemagne, cela devrait changer la donne ».
Cette montée en puissance n’a
toutefois pas vocation à préparer un conflit, mais plutôt à dissuader la Russie
de toute tentative d’agression contre les pays européens. « C’est fait pour
se défendre, par pour attaquer », insiste l’analyste.
À l’international, la Chine verrait
d’un mauvais œil le rapprochement entre les États-Unis et la Russie, notamment
si cette dernière se rapproche de l’Amérique. Selon l’analyste, « si la
Russie bascule du côté américain, sa dépendance commerciale avec la Chine
pourrait être fragilisée ». Dans cette optique, « la Chine pourrait
commercer avec l’Europe, un changement qui serait bénéfique pour les deux
parties ».
L’appel téléphonique qui
change tout ?
Après un appel téléphonique
de près de deux heures, mardi 18 mars, Vladimir Poutine et Donald Trump sont
parvenus à un résultat pour le moins très maigre. Si le Kremlin a évoqué dans
un communiqué un « échange de vues détaillé et franc », le président
russe s’est surtout attaché à réaffirmer ses exigences, plaidant pour une
résolution du conflit « globale, durable et sur le long terme », prenant
en compte les intérêts de sécurité de la Russie et les « causes profondes
» de la guerre.
Face à un Trump qui s’est
félicité d’une discussion « très bonne et productive » sur son réseau
Truth Social, l’ancien officier du KGB semble avoir mené le jeu. Les seules
concessions faites par Moscou se résument, outre un anecdotique accord pour
réaliser un match de hockey entre les États-Unis et la Russie, à une trêve « immédiate »
limitée à trente jours, restreinte aux frappes sur les infrastructures
énergétiques, et à une réflexion sur une éventuelle pause des attaques
maritimes.
En revanche, un échange de
175 prisonniers de guerre de chaque camp devrait intervenir dès mercredi 19
mars, selon l’annonce du Kremlin. Mais pour un cessez-le-feu total, Poutine
exige l’arrêt de l’aide militaire étrangère et du renseignement fourni à
l’Ukraine.

Vladimir Poutine et Donald Trump se sont entretenus pour convenir d’un accord de paix © Wiki commons
Sur le réseau social X,
Volodymyr Zelensky a dénoncé une manœuvre dilatoire, affirmant que « Poutine
a refusé aujourd’hui la proposition d’un cessez-le-feu complet ». Le
président de l’Ukraine a appelé ses alliés à réagir en rejetant « toute
tentative de Poutine de prolonger la guerre » et annoncé dans la foulée s’entretenir
avec Donald Trump ce 19 mars.
Pour Janis Kluge, économiste
et spécialiste de la Russie qui s’exprimait récemment sur le même réseau social,
les conditions posées par Moscou visent à affaiblir les capacités militaires de
l’Ukraine : « Il y a deux choses pour lesquelles l'Ukraine est vraiment
douée : frapper les raffineries russes et détruire la flotte russe de la mer
Noire. Coïncidence : Poutine souhaite un cessez-le-feu dans ces deux domaines. »
La Russie « a la
capacité de nous attaquer directement »
Malgré quelques avancées, les
résultats obtenus semblent bien en deçà des espoirs affichés par Donald Trump. Quant
à un véritable accord de paix, Moscou semble inflexible sur ses conditions : la
capitulation de fait de l’Ukraine, son renoncement à l’OTAN, l’annexion
définitive des territoires occupés et la levée des sanctions occidentales
demeurent les conditions sine qua non du Kremlin.
« La paix ne peut pas être
conclue à n’importe quel prix et sous le diktat russe. La paix ne peut être la
capitulation de l’Ukraine. Elle ne peut pas davantage se traduire par un
cessez-le-feu trop fragile », estime de son côté Emmanuel
Macron. Or, si les craintes du président de la République se confirment,
cette trêve limitée pourrait n’être qu’un leurre, permettant à la Russie de se
réorganiser avant de relancer son offensive.
« Parce que nous avons
déjà l’expérience du passé. Nous ne pouvons oublier que la Russie a commencé à
envahir l’Ukraine en 2014, que nous avons alors négocié un cessez-le-feu à
Minsk, et que la même Russie ne l’a pas respecté. Nous n’avons pas su le maintenir,
faute de garanties solides. Aujourd’hui, on ne peut plus croire la Russie sur
parole », a rappelé le président français lors de son allocution aux
Français, mercredi 5 mars.
Alors que la Russie semble
avancer ses pions, Louis Duclos met en garde : « Aujourd’hui, la menace ne
fait que grandir et elle a la capacité de nous attaquer directement d’où
l’importance de devenir une Europe unie militairement. »
Romain
Tardino