Aux
États-Unis, c’est une première, un homme victime d’un accident de la route a pu
témoigner au procès de son assassin. Sa famille l’a fait revivre grâce à une intelligence
artificielle. Un témoignage surprenant, encore loin des coutumes légales en
France.
«
Bonjour, juste pour être clair auprès de tous ceux qui verront ceci, je suis
une version de Chris Pelkey recréée par IA qui utilise ma photo et mon profil
vocal. » C’est une vidéo hors du commun qui a
chamboulé les médias américains et français, un homme victime d’une altercation mortelle est apparu à son procès grâce à… l’intelligence artificielle.
Il a 37
ans et a été tué par balle à un feu rouge en Arizona. Et c’est le premier mort
qui s’exprime dans un procès. Dans la courte vidéo, il n’est pas vraiment là
pour plaider, mais plus pour s’adresser à son meurtrier. « Il est
regrettable que nous nous soyons rencontrés ce jour-là dans ces circonstances.
Dans une autre vie nous aurions probablement pu être amis.» Cette
initiative, formulée par sa sœur, est un peu étrange et difficile à concevoir
au sein de la justice française.
« C’est
clairement une dérive de l’intelligence artificielle » pour Didier Seban. L’avocat spécialisé en cold case
n’approuve pas cette méthode « spectaculaire ». Sur CNN ou encore sur la BBC,
les experts américains s’accordent pour dénoncer la pente glissante que leur
justice est en train de prendre.
L’avocat
du coupable du meurtre de Christophe Pelkey estime « que le juge a donné un
certain poids à la vidéo et que c’est une question qui sera probablement
poursuivie en appel. »
« C’est
évidemment inenvisageable dans notre justice. En France, on ne peut pas juger
les morts. », sous-entendu, on ne
peut pas les faire parler non plus, avance l’avocat parisien. Si cette pratique
pourrait soumettre des idées aux Américains, le cadre légal de notre
législation n’en est pas encore là.
« C’est
évidemment inenvisageable dans notre justice. En France, on ne peut pas juger
les morts », sous-entendu, on ne
peut pas les faire parler non plus grâce à l’IA, avance l’avocat parisien. Si
cette méthode pionnière pourrait bien un jour s’appliquer dans l’hexagone comme
aux États Unis, elle reste pour l’heure encore très loin de notre législation.
Au cours
de la procédure judiciaire
«
L’intelligence artificielle est quand même un outil extraordinaire surtout dans
notre corps de métier », salue maître
Seban. En effet, en dehors de la salle d’audience, cette technologie, bientôt
omniprésente dans notre quotidien, a sa place et sert les enquêtes criminelles.
« Notre logiciel, Spectra, est un outil de recherche plus rapide et qui nous
permet de retrouver par exemple les similitudes entre différentes affaires. »
Ce dernier permet de réduire de 60 % le temps d’investigation en évitant la
saisie manuelle.
Le
ministère de la Justice s’est penché sur cette nouvelle problématique en
émettant les potentiels domaines où l’IA « pourrait apporter une réelle
valeur ajoutée ». Il s’agirait de la retranscription d’entretiens
automatisant la mise en texte, de l’aide à la recherche, comme avec Spectra, ou
encore de traduire et de résumer des dossiers. Maitre Seban nuance : « Il
faut continuer à faire des vérifications humaines, même si finalement l’IA se
nourrit des données qu’on lui donne. »
Dans le
déroulé d’une affaire de meurtre, il y a la question d’autopsie. Et là encore,
la technologie pourrait être d’une grande aide. « On l’utilise déjà pour
reconstituer les scènes criminelles, mais on pourrait reconstituer le corps par
exemple. » Des prototypes d’autopsie virtuelle ont déjà été proposés. Le
concept ? Remodeler le cadavre en entier pour éventuellement voir ce qui n’a
pas été vu précédemment. Car après une autopsie classique, l’état du corps ne
permet pas une deuxième expertise optimale.
Tessa Biscarrat