L’ordonnance du 22 septembre 2017 a transposé les
obligations légales du comité d’entreprise au comité social et économique
(CSE). Les membres élus doivent notamment en maitriser les aspects comptables
pour éviter de se mettre en porte à faux vis-à-vis de l’URSSAF.
Précisément, les articles L.2315-64 à L.2315-77
du code du travail constituent les textes de référence. Les CSE sont soumis aux
obligations comptables définies à l’article L 123-12 du code de commerce, sauf
dérogation. Les règlements (2021-05, 2021-06, 2021-07) de l’autorité des normes
comptables (ANC) précisent les modalités d’application en fonction de la taille
du CSE. Quels sont les points à retenir ?
La séparation des budgets
Les CSE ont l’obligation d’avoir deux budgets,
soit comptablement deux comptes de résultats. Ils sont la conséquence des deux
subventions perçues, l’une de fonctionnement pour les attributions économiques
et professionnelles (AEP), et l’autre pour la participation de l’employeur aux
activités sociales et culturelles (ASC). La subvention pour l’AEP représente
0,2% de la masse salariale pour les entreprises de 50 à 2000 salariés et 0.22%
au-delà. S’agissant de l’attribution pour les ASC, le code du travail ne
fournit pas un mode de calcul, souligne Vincent Ouzoulias, expert-comptable et
CAC. Quelques conventions collectives indiquent des taux minimums. En l’absence
de négociation ou d’accord, l’année précédente sert de base de calcul. La
séparation des budgets concerne les ressources et également les dépenses. Elles
sont enregistrées dans deux comptes de résultat. Certaines dépenses communes ne
sont pas affectables en totalité à un des deux budgets. Elles sont scindées
selon des clés de répartition déterminées par le Bureau qui dirige la gestion
du CSE. Elles sont indiquées dans l’annexe des comptes annuels. Pour les autres
frais, la répartition ne s’appuie pas sur la nature de la charge mais sur sa
destination, c’est-à-dire sur son objet. Ainsi, des bons cadeaux se classent
dans les activités sociales et culturelles, mais aussi tous les frais indirects
liés aux activités sociales, comme ceux de gestion. Tout frais annexe aux
activités sociales doit leur être imputé. Souvent des CSE, qui ont du mal à
utiliser leur budget de fonctionnement, sont tentés d’y faire figurer des frais
de personnel. C’est une erreur si ce personnel travaille pour la gestion des
activités sociales. La charge doit alors être imputée sur les activités
sociales.
Autre obligation comptable du CSE, établir un
budget prévisionnel
Le budget prévisionnel est un outil de gestion
appréciable peu mentionné dans les textes, constate l’expert-comptable.
L’article D.2315-38, indique que le rapport de gestion doit comporter, pour
l’utilisation des ressources ASC, des éléments d’analyse portant sur les écarts
entre le budget prévisionnel et le réalisé. Cette comparaison est une
obligation légale faite au CSE qui impose donc la tenue d’un budget
prévisionnel. Ce dernier projette l’utilisation des ressources, dans le cadre
des règles législatives et du règlement intérieur. Son vote valide la politique
choisie. Il synthétise les opérations antérieures et les orientations futures
décidées. Il doit être présenté et approuvé en réunion plénière. Ne pas
respecter cette procédure, fait peser la responsabilité des dépenses engagées
individuellement sur les membres du bureau.
Commission des marchés
C’est une exigence légale pour les 300 à 400 gros
CSE, explique Xavier Huault-Dupuy, également expert-comptable et CAC. La
commission des marchés structure la procédure d’achat. Ses propositions, qu’il
s’agisse de critères de choix des prestataires ou de la procédure d’achat,
doivent être validées par le CSE en réunion plénière. Elle choisit les
fournisseurs et les prestataires, cependant le choix des prestations reste une
prérogative des élus du CSE. Elle contrôle le respect de la procédure, rend
compte de son activité et rédige un rapport annuel. Le règlement intérieur fixe
ses modalités de fonctionnement. Certaines mentions sont impératives : le
nombre de membres ; la méthode de désignation ; la durée du mandat ; etc.
S’agissant de critères de sélection des fournisseurs, ils peuvent par exemple
inclure les capacités professionnelles, techniques, financières du prestataire,
son antériorité, ou encore sa fiabilité. Toutes ses caractéristiques pondérées
permettent de calculer une note d’évaluation globale pour chaque fournisseur et
de lui délivrer un agrément. Une confusion existe depuis la mise en place des
commissions des marchés avec l’obligation de faire des appels d’offres. Le
fonctionnement d’une commission des marchés et le code du travail n’imposent
nullement à un CSE de faire des appels d’offres. En revanche, qu’il fasse jouer
la concurrence entre les prestataires préalablement agrémentés demeure une
pratique courante. Attention aussi de bien proscrire le saucissonnage,
c’est-à-dire la technique qui consiste à découper une prestation en plusieurs
pour éviter d’atteindre le seuil de 30000€ au-delà duquel l’achat est contrôlé
par la commission des marchés. Précisons également que beaucoup de prestations
s’étendent sur plusieurs exercices et qu’il faut donc comparer leur prix total
au seuil de 30000€. Les textes n’imposent pas de limite de durée pour la
validité des agréments des prestataires. Le CSE est libre de définir sa propre
règle sur ce point.
Chronologiquement, le CSE établit son budget
prévisionnel qui prévoit des achats. Des commissions consultatives proposent
des listes de fournisseurs potentiels. La commission des marchés agrémente ceux
qui répondent aux critères de sa procédure de choix. Un fournisseur ne repasse
pas par cette étape tant que son agrément est valable.
Obligations du CSE relatives au RGPD
L’expert-comptable rappelle que le règlement
général sur la protection des données (RGPD) s’applique au CSE. Celui-ci
dispose en effet de quantité de données relatives aux personnes physiques
identifiables directement ou indirectement. Lorsqu’un CSE désigne un ouvrant
droit et un ayant droit, il connait son identité, sa date de naissance, ses
coordonnées bancaires, son adresse, son mail, son téléphone, sa composition
familiale,… cetera. Il détient souvent des données ultrasensibles comme la
feuille d’imposition pour appliquer les quotients familiaux. Le CSE est dans
l’obligation de respecter les principes du RGPD :
- la finalité, le CSE ne peut conserver les
données personnelles que dans un but précis, légal et légitime ;
- la proportionnalité et la pertinence, les
données conservées doivent être nécessaires au regard de la finalité voulue ;
- la durée de conservation, il n’est pas possible
de conserver les données sur une durée indéfinie. La durée de conservation des
données dans un CSE est fixée à 10 ans ;
- la sécurité et la confidentialité, Les données
ne sont pas accessibles à autrui, mais seulement aux personnes autorisées. Le
CSE se porte garant de la sécurité des données en sa possession. Il assume sa
responsabilité auprès de la CNIL en cas de fuite ;
- la reconnaissance du droit des personnes, il
s’agit là du droit à l’information, à l’accès aux données et au consentement
des personnes. Un salarié peut refuser de fournir ses données, ce qui risque de
l’empêcher de bénéficier des prestations du CSE.

Ouvrant droit et ayant droit
Le code du travail (L.2312-78) précise que les
activités sociales et culturelles (ACS) bénéficient prioritairement aux
employés, à leur famille et aux stagiaires. Le R.2312-35 indique qu’elles
profitent éventuellement aux anciens salariés de l’entreprise. Il existe donc
deux catégories de bénéficiaires. La première, celle des ouvrants droits
regroupe les salariés, les stagiaires, et quelquefois les anciens salariés. La
seconde, celle des ayants droit englobe leur famille. Tout salarié du
périmètre, quel que soit son contrat de travail fait obligatoirement partie des
ouvrants droits, insiste Xavier Huault-Dupuy. Un CSE qui exclut un salarié ou
un stagiaire du bénéfice des activités se place automatiquement en position de
discrimination. Si l’activité est qualifiée de discriminatoire, elle ne remplit
pas les critères des activités sociales et culturelles. Dans cette hypothèse,
l’URSSAF peut redresser l’intégralité de l’activité. CDI, CDD, apprentissage,
ou temps partiel, tous les ouvrants droits doivent être traités de façon
identique. Néanmoins, le CSE peut restreindre l’accès à une activité par
exemple en l’autorisant exclusivement aux employés présents à une date
spécifique. En cas de suspension de contrat de travail, le salarié demeure dans
les effectifs. Là aussi, il a droit aux activités sociales et culturelles. Pour
les anciens salariés, la continuité du statut d’ouvrant droit est facultative,
il appartient au CSE de le préciser. La notion de famille couvre une large
surface. Les textes ne définissent pas les ayants droit de façon exhaustive,
mais en font partie les conjoints et les enfants à charge (famille recomposée).
Là encore, c’est le CSE qui définit les activités ouvertes aux ayants droit.
Le tableau des transactions significatives
L’article L.2325-47 du code du travail donne
l’obligation comptable au CSE de fournir le tableau des transactions
significatives, selon sa taille, soit en annexe des comptes, soit dans le
rapport d’activité. Ce tableau doit présenter par budget les transactions
conséquentes que le CSE a réalisées sur l’année avec les prestataires. Il
affiche le montant de la transaction, la raison de la transaction, le budget
concerné, si l’opération fait l’objet d’une convention ou d’un contrat, si elle
est renouvelable, etc. Les élus du CSE décident du critère de significativité
des informations mentionnées qui est voté par le Bureau. Ils retiennent
habituellement soit un montant fixe, soit un pourcentage du budget ou de la
subvention.
Les contributions volontaires en nature (CVN)
Depuis le règlement ANC 2018-06 le CSE a
l’obligation de prendre en compte les contributions volontaires en nature. En
cas d’impossibilité, remarque l’expert-comptable il faut en mentionner la
raison et les ajouter dans l’annexe. Les CNV, comportent souvent des éléments
accordés par l’employeur. Elles peuvent apparaitre comme des compléments de
subvention disproportionnés par rapport aux ressources normales. Un CSE logé
dans des locaux à la défense, ou qui y jouit d’une salle de sport, ou qui gère
la restauration présenterait, du fait de ces locaux, un compte de résultat avec
des montants colossaux qui déséquilibreraient ses états financiers. C’est
pourquoi ne sont retenues que les contributions en nature de l’employeur qui ne
sont pas associées à une obligation légale. Les murs et les biens mis à
disposition ne sont pas considérés comme des contributions volontaires en
nature. Ils sont mentionnés dans l’annexe sans obligation de les comptabiliser,
à l’inverse des autres contributions volontaires.
Arrêté et approbation des comptes
L’article 2315-68 du code du travail rappelle que
les comptes du CSE sont arrêtés selon des modalités prévues par le règlement
intérieur par des membres élus désignés. Ils sont éventuellement présentés par
un expert-comptable. Le trésorier seul ne suffit pas, note Vincent
Ouzoulias. L’approbation des comptes a lieu en réunion plénière exceptionnelle
et spécifique à ce point, comme le stipule l’article L.2315-68 du code du
travail. Ils doivent être approuvés dans les six mois qui suivent la clôture de
l’exercice (R.2315-37). L’instance en charge de l’arrêté des comptes doit les
communiquer ainsi que l’ensemble des autres documents à traiter lors de la
réunion plénière d’approbation dans un délai de 3 jours avant la réunion plénière,
7 jours si les comptes sont consolidés, 11 jours en présence d’un comité
central.
C2M