L’accord intègre une rubrique
inédite concernant la souveraineté, la sécurité et la stabilité. Il entérine la politique
de cybersécurité de l’instance représentative des notaires,
ainsi que la refonte de sa gouvernance en matière de lutte contre le
blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.
Un nouveau cap est fixé pour
le notariat français. Le Conseil supérieur du notariat et les ministres des
Outre-mer, de la Justice, de l’Intérieur, de l’Économie, de l’Aménagement du
territoire et de l’Europe ont signé mardi 1er juillet la deuxième
convention d’objectifs du notariat.
Cette nouvelle feuille de
route couvre la période 2025-2028. La précédente, signée en octobre 2020 pour
la période 2020-2024, affiche quant à elle près de 80 % des objectifs atteints,
affirme le CSN dans un communiqué. L’institution représentative des notaires précise
qu’une partie de ces objectifs – sur l'authenticité, la performance du service
notarial et sa contribution à la transparence économique et financière – ont
été conservés dans cette nouvelle mouture.
Principale nouveauté :
l’ajout d’une nouvelle rubrique consacrée à la souveraineté, la sécurité et la
stabilité, « en raison des bouleversements survenus depuis 2020 »,
assure le CSN. Les nouvelles conflictualités à travers le monde et le
développement de nouveaux modes de criminalité financière « nécessitent
une importante contribution du notariat pour mieux garantir l’indépendance
stratégique de la France et la protection des données sensibles dont elle est
dépositaire temporairement ou de manière définitive », détaille la
convention.
La sécurisation des échanges
entre notaires et clients en ligne de mire
Dans le domaine numérique, la
convention grave dans le marbre la politique de cybersécurité du CSN. Il y est
rappelé que « les notaires signent leurs actes authentiques sur support
électronique au moyen d’un dispositif de signature qualifié ».
L’instance assure échanger
régulièrement avec l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information
(ANSSI) sur le contenu et les résultats de cette politique, notamment en vue
d’élaborer de nouvelles directives de sécurité numérique, et s’engage à prendre
« toute initiative visant à renforcer la sécurité des offices,
notamment au travers d’actions de sensibilisation, d’assistance, de prévention
et de mutualisation des solutions de remédiation ».
Le Conseil supérieur du
notariat vise dans cette convention l’établissement d’un « hébergement
sécurisé des données » s’appuyant sur le référentiel à haut niveau de
sécurité de l’ANSSI, et assure promouvoir « les échanges sécurisés
entre les notaires et leurs clients, pour en réduire la vulnérabilité ».
La question de la conservation des actes reste aussi à l’agenda, avec des
échanges entre la profession notariale et l’État qui se poursuivent.
Autre chantier en ligne de
mire : l’identité numérique. Mise en place sur certains sites
gouvernementaux, elle pourrait être utilisée par les notaires afin de sécuriser
l’identification à distance.
Côté dématérialisation, déjà
bien engagée dans la profession, le CSN « réaffirme son intention de
poursuivre ses investissements entrepris depuis plus de vingt ans » et
promet aux services de l’État et aux usagers « une disponibilité des
services dématérialisés de la profession de 99 % sur des plages horaires larges ».
La supervision
anti-blanchiment passe à l’échelle nationale
Sur la lutte contre le
blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, la profession notariale
assure « poursuivre ses efforts » déjà engagés, notamment dans
le cadre d’un plan d’action entrepris en 2023, et la mise en place du nouveau
formulaire Ermes (pour Échange de renseignements par messagerie en
environnement sécurisé), permettant aux professionnels assujettis à la lutte
contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme de
transmettre leurs déclarations de soupçon et d’échanger des informations de
manière sécurisée avec Tracfin.
Dans le cadre de la réforme
des inspections déployée à partir de 2025 dans les offices, le CSN vérifie
l’accomplissement des obligations de vigilance dans ce domaine. Pour faciliter
le recueil d’informations, gouvernement et CSN sont convenus d’étudier un projet
d’automatisation des liens entre les logiciels de rédaction d’actes utilisés
par les notaires et les outils déclaratifs déployés par les autorités de
l’État, en particulier la plateforme Ermes.
La profession notariale entérine
par ailleurs dans la convention la refonte de sa gouvernance en matière de
lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, principalement
par le passage du rôle de supervision anti-blanchiment des agences
départementales à l’instance nationale. « À ce titre, le CSN définira
la stratégie et assurera la mise en place de plans de contrôle annuels de la
profession […] en tenant compte notamment de l’analyse nationale des risques de
blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, des retours partagés
par l’autorité judiciaire et des informations transmises par Tracfin. »
Le CSN tient aussi un registre des sanctions disciplinaires prononcées dans le
cadre d’un manquement de vigilance au dispositif LCB-FT.
Des actions à l’étranger en
concertation avec l’État
À l’international, le CSN se
donne pour objectif de « fluidifier l’accompagnement des clientèles du
notariat à l’international et de faciliter les démarches des Français résidant
à l’étranger ». Cela passe par
des accords de coopération avec d’autres notariats, ainsi que des actions de
formation auprès des instances étrangères.
Pendant la présidence française
de l’Union internationale du notariat (UINL) par Lionel Galliez, jusqu’au 31
décembre 2025, le CSN appuie les projets de l’instance, avec un chantier
principal : le projet de code international du notariat, adopté en mai
dernier par l’assemblée générale des notariats membres de l’UINL.
Les relations internationales
sont gérées en lien avec le gouvernement et les ambassades. « Le CSN se
concerte avec le ministère de la justice et le ministère de l’Europe et des
affaires étrangères ou tout autre ministère exerçant une action internationale,
afin d’orienter au mieux son action », indique la convention. Chaque
action du CSN à l’étranger doit être menée en concertation avec l’ambassadeur
de France dans le pays, et « le CSN s’abstient de toute initiative
jugée inopportune par l’État français ».
Un compte rendu des
différentes actions de l’instance représentative des notaires sur son action à
l’échelle européenne ou internationale devra être effectué auprès des
ministères de la Justice et de l’Europe et des affaires étrangères.
Il est en outre prévu que le
notariat s’associe « aux actions de reconstruction de l’Ukraine qui
nécessiteraient son expertise, notamment en matière de numérisation ».
Alexis
Duvauchelle