Par un arrêt rendu le 22
avril 2025, la juridiction a infirmé une décision de première instance qui
imposait à l’association de supprimer une vidéo filmée dans un élevage de veaux
du groupe agroalimentaire Denkavit, mettant en avant la liberté d’informer et l’intérêt
général.
Elles sont difficiles à voir,
mais les photos et les vidéos de l’élevage de veaux maltraités à Montreuil-Bellay
(Maine-et-Loire) sont désormais de retour sur le site internet de l’association
L214. Le 22 avril, la cour d’appel d’Angers a en effet estimé que « l’interdiction
de [leur] diffusion portait atteinte à la liberté d’expression et au caractère
d’intérêt général de l’information ».
Dans un communiqué publié le
13 mai, L214 salue la décision de la juridiction, qui « représente un
signal fort » et « réaffirme le droit d’informer ».
Le collectif « se réjouit de voir ainsi reconnue la légitimité de son
travail d’enquête et d’alerte ». « Nous allons poursuivre notre
mission d’information du public et de plaidoyer auprès des instances politiques
et des entreprises, images à l’appui ! », complète Brigitte Gothière,
cofondatrice de L214.
Prises clandestinement en
avril 2022 dans un élevage du centre de recherche et d’innovation du groupe
Denkavit, alors 2e producteur de veaux en France, les images en cause montraient
des mauvais traitements – coups, insultes, enclos étroits sans paille au sol
couvert d’excréments - commis sur des animaux d’élevage, dont des veaux
destinés à l’abattoir.
Armée de cette « enquête
accablante », l’association avait déposé une plainte auprès du
procureur de la République contre Denkavit pour sévices graves et mauvais
traitements – l’enquête est toujours en cours. Les images avaient par ailleurs
déclenché une inspection des services vétérinaires, diligentée par le préfet du
Maine-et-Loire.
Mais leur diffusion avait également
entraîné une plainte de l’entreprise Denkavit, qui avait saisi le juge des référés
pour obtenir l’arrêt de leur diffusion sur internet et sur les réseaux sociaux.
Le tribunal judiciaire de Saumur avait, en août 2022, donné raison au plaignant,
mettant en avant une infraction au droit à la propriété, et les images avait
été retirées. L214 avait fait appel de cette décision.
La liberté d’informer prime
aussi pour la Cour de cassation
Ce n’est pas la première fois
qu’une décision de justice visant l’association est déboutée par une plus haute
juridiction qui met en avant la liberté d’informer. En août 2020, L214 avait mis
en ligne une vidéo sur les conditions de vie de lapins dans un élevage intensif
de Bretagne. L’association s’était introduite dans les bâtiments sans
autorisation de la société civile d’exploitation agricole (SCEA) REALAP,
exploitante de l’élevage.
Cette dernière, invoquant
dans sa plainte « une atteinte à son droit de propriété et à la
réglementation sanitaire en matière d’élevage, une violation de domicile et un
trouble manifestement illicite », avait également saisi la justice et
obtenu gain de cause devant la cour d’appel de Rennes - après avoir été
déboutée en première instance. L’association avait dû retirer les images et
verser une amende de 5000 euros.
Mais, sur pourvoi de
l’association, la Cour de cassation avait, en 2023, cassé partiellement l’arrêt
déféré pour violation de la loi, en retenant notamment le droit européen, et la
liberté d’expression de l’association et sa contribution « au débat sur
l’intérêt général ». L’arrêt rappelait la jurisprudence européenne,
redéfinissant l’article 10 de la Convention européenne des droits de
l’homme : « toute personne, y compris une association, a
droit à la liberté d’expression, comprenant notamment la liberté de communiquer
des informations ou des idées (…). »
Mylène
Hassany