Malgré leurs divergences sur un
sujet aussi « complexe » qu’« obscur », et
sous l’étendard de l’ENM, Jérémie Marin et Alexia Colin-Bonardot sont ressortis,
fin juin, vainqueurs de la première édition de ce concours réservé au Réseau
des écoles de services public, grâce à leur approche décalée.
« La morale est-elle
la tutrice clandestine de l’éthique du service public ? » C’est au
terme de leur plaidoirie sur ce sujet de haut vol que Jérémie Marin et Alexia
Colin-Bonardot, deux auditeurs de justice choisis pour représenter l’Ecole
nationale de la magistrature, sont ressortis vainqueurs des Olympiades de
l’éloquence.
Le 23 juin dernier, 36 élèves
de 18 écoles et instituts du Réseau des Écoles de Services Public (RESP) se
sont rendus à l’université Panthéon-Assas à Paris pour disputer la finale de la
première édition de cet évènement.
Un événement auquel l’ENM « avait
de bonne raisons d’y prendre part », puisque l’établissement place la
prise de parole au cœur de ses enseignements, assurent Samuel Lainé, Directeur
adjoint de l’ENM en charge des recrutements, et Leslie Pourlenc, magistrate
chargée de mission ayant piloté ce projet.
Quand le désaccord fait la
force
Pour les deux lauréats, cela semblait
pourtant « mal parti ». « De prime abord, le sujet m’a
inspiré beaucoup de perplexité », au point de songer à le « tourner
en ridicule, tant sa formulation semblait complexe et obscure »,
confie Jérémie Marin.
D’autant qu’au sein du binôme,
le sujet inspirait deux visions « radicalement opposées ».
« Alexia affirmait que la morale était assurément la tutrice de
l’éthique du service public et qu’il était donc absurde de s’en cacher, tandis
que cette affirmation me semblait inconcevable ».
Après de « vifs
échanges sur ces perceptions antagonistes », les deux candidats ont alors pris le parti d’exploiter leur divergence sur le sujet. « Nous avons décidé
de mettre en scène ce désaccord dans le cadre de notre discours, ce qui a
sûrement permis d’aborder l’ensemble du sujet dans toute sa complexité »,
rapporte Alexia Colin-Bonardot.
« Qu’importe que nous
ne finissions pas par trancher, puisque cela était conforme à la réalité et
laissait finalement le jury décider à l’instar d’un procès », complète
Jérémie Marin, qui ajoute : « Le jury a d’ailleurs salué notre
traitement du sujet et les approches plus contre-intuitives de la morale que
nous avions adoptées. »
Quatre jours de préparation
Un défi relevé haut la main pour
ces deux orateurs qui n’ont eu que quelques jours pour se préparer.
Comme l’expliquent Samuel
Lainé et Leslie Pourlenc, 17 auditeurs de justice au sein de la promotion
2025-Etat de Droit de l’ENM se sont portés candidats au concours, avant de
désigner, le 17 juin, et à la suite d’un entraînement sur un sujet libre puis
sur celui de la finale potentielle, le binôme qui représenterait l’Ecole aux
Olympiades.
Fraichement sélectionnés, les
heureux élus ont donc dû rapidement accorder leurs violons pour parvenir à une
version finale de leur plaidoirie. Une préparation « intensive »
au goût d’Alexia Colin-Bonardot. « Mes proches et mes voisins ont dû
supporter jusqu’à la veille au soir mes déclamations pour que tout soit parfait
le jour du concours, abonde Jérémie Marin, et je les remercie
pour leur écoute aussi patiente qu’attentive même si elle n’était parfois pas
tout à fait librement consentie » plaisante-t-il.
Une récompense inattendue
Pour les deux magistrats en
devenir, l’annonce de leur victoire, le 23 juin, a été aussi « surprenante »
que « gratifiante ». Une récompense tant espérée pour les deux
participants qui n’en étaient pas à leur coup d’essai. Alexia Colin-Bonardot avait commencé les concours dès sa première année de faculté sans cesser de réitérer
l’expérience depuis. Quant à Jérémie Marin, il avait déjà pris part au concours
de débat et d’éloquence de l’université de Paris II Panthéon Assas.
« Lors de la finale,
nous étions opposés à de très bons candidats » commente Jérémie Marin. Et
Alexia Colin-Bonardot de compléter : « Lorsque les 3e
et 2e prix ont été annoncés, je me suis dit que nous n’étions pas
parvenus à obtenir une médaille pour l’école. Mais finalement, c’est la plus
jolie de toutes que l’on ramène à la maison. »
Allison
Vaslin