Les questions liées à la TVA,
aux droits d’accise ou encore au Code des douanes passeront au 1er octobre dans l’escarcelle de la juridiction de droit commun. L’opération
devrait déboucher sur un délestage de 20% du volume de renvois préjudiciels
traité par la Cour, qui pourra ainsi se consacrer à l’examen des dossiers les
plus complexes.
Le fardeau était trop lourd à
porter. A partir du 1er octobre prochain, la Cour de justice de l’Union
européenne (CJUE) transférera au Tribunal de l’UE une partie des questions
préjudicielles qui lui sont transmises par les juridictions nationales, en
vertu d’un règlement du Parlement européen et du Conseil paru le 12 août au Journal officiel de l’UE.
Ce passage de flambeau vise à
délester la CJUE, qui fait face à un « nombre élevé de demandes de décision
préjudicielle […], mais également à la grande complexité et au caractère
particulièrement sensible d’un nombre croissant de questions » portées
devant la juridiction, justifie l’UE. Ce qui, mécaniquement, allonge les délais
de traitement, qui cascadent en retour sur les procédures instruites par les
juridictions nationales.
Or, les demandes
préjudicielles « doivent être traitées rapidement » pour « garantir
le droit à un recours effectif » affirment les institutions communautaires.
La Cour indique dans un communiqué que l’opération devrait la décharger de 20 %
du volume des renvois préjudiciels qu’elle traite.
Six matières concernées
Les matières sur lesquelles
sera dorénavant amené à se prononcer le Tribunal de l’UE dans le domaine
préjudiciel ont été soigneusement choisies. Pour des raisons de « sécurité
juridique », elles sont « clairement circonscrites et suffisamment
détachables d’autres matières », et ont fait l’objet d’un important
corpus de jurisprudence de la CJUE de nature à guider la juridiction de droit commun dans
sa nouvelle mission.
Six domaines sont ainsi
concernés : le système commun de taxe sur la valeur ajoutée, les droits d’accise,
le Code des douanes, le classement tarifaire des marchandises dans la
nomenclature combinée, l’indemnisation et l’assistance des passagers en cas de
refus d’embarquement ou de retard ou d’annulation de services de transport,
ainsi que le système d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre.
La CJUE reste toutefois
compétente pour toutes les questions préjudicielles qui se trouvent au
carrefour d’une de ces matières et d’une autre qui relève de son domaine. Elle
se réserve aussi les demandes préjudicielles liées à ces six champs qui
soulèvent des questions indépendantes d’interprétation relatives au droit
primaire, au droit international public ou aux principes généraux du droit de l’Union.
La Cour tranchera si telle ou
telle question préjudicielle doit être traitée par elle ou le Tribunal de l’UE,
et non les juridictions de renvoi. Les motifs de l’attribution de la demande
préjudicielle à la CJUE ou au Tribunal de l’UE seront exposés dans la décision par
la juridiction qui en aura pris la charge.
Le mécanisme de restriction
des pourvois étendu
Afin d’assurer que ce report
de charge ne se traduise pas par une avalanche de pourvois
qui ruissellent sur la CJUE, et que celle-ci puisse se consacrer « aux
questions de droit importantes », les autorités européennes étendent
également le mécanisme d’admission préalable des pourvois en vigueur à la Cour.
Depuis le 1er mai
2019, les pourvois dans des affaires qui ont déjà bénéficié d’un double examen
par une chambre de recours indépendante d’un organe communautaire puis le Tribunal
de l’UE ne sont d’office pas admissibles devant la CJUE. Au nombre de quatre et
statuant sur un nombre restreint de thématiques (la propriété intellectuelle et
les substances chimiques, notamment), ces chambres passeront à dix avec le
nouveau règlement, avec l’entrée d’acteurs tels que l’Autorité européenne des
marchés financiers basée à Paris, ou bien l’Agence de l’Union européenne pour
les chemins de fer installée à Valenciennes.
Le nouveau règlement apporte enfin
d’autres modifications d’ordre général à la procédure préjudicielle, dont la
notification obligatoire au Parlement européen, au Conseil et à la Banque
centrale de toutes les demandes. En outre, l’ensemble des
mémoires ou observations écrites déposés par un intéressé dans le cadre de ces
procédures seront publiés sur le site de la CJUE après la clôture de l’affaire,
à moins que le contributeur ne s’y oppose.
Nicolas
Turcev