JUSTICE

Les cours criminelles départementales jugées conformes à la Constitution

Les cours criminelles départementales jugées conformes à la Constitution
Publié le 24/11/2023 à 14:36

En répondant à deux questions prioritaires de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a validé la compatibilité de ces nouvelles juridictions avec la Constitution, estimant notamment que la présence d’un jury populaire pour juger les crimes de droit commun était « une tradition républicaine », mais pas un principe fondamental.

Le Conseil constitutionnel a tranché : les cours criminelles départementales sont conformes à la Constitution. Ces juridictions faisaient l’objet de deux questions prioritaires de constitutionnalité (QPC). En cause principalement : l’absence de jury populaire au sein de ces cours.

Dans leur unique décision répondant aux deux questions, les Sages expliquent qu’« une tradition républicaine (la présence d’un jury populaire, ndlr) ne saurait être utilement invoquée pour soutenir qu’un texte législatif qui la contredit serait contraire à la Constitution ». Ils appuient cette justification par le fait que si la très grande majorité des textes pris en matière de procédure pénale avant l’entrée en vigueur de la Constitution de 1946 assurent la présence d’un jury, ce principe a néanmoins déjà été écarté, « en dépit de son importance », pour certains crimes. Le Conseil cite notamment une loi de 1938 révisant le Code de justice militaire pour l’armée de mer.

Les crimes « de droit commun » pas réservés aux cours d’assises

Autre argument avancé par l’institution : les dispositions assurant le jury présentes dans la loi « n’ont eu ni pour objet ni pour effet de réserver à une juridiction composée d’un jury le jugement des crimes « de droit commun », catégorie qui n’a au demeurant été définie par aucun texte ». Le Conseil constitutionnel estime également sur ce point que « le principe invoqué ne saurait être regardé comme répondant à l’ensemble des critères requis pour la reconnaissance d’un principe fondamental reconnu par les lois de la République ».

S’appuyant sur la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, l’institution assure également que le législateur peut prévoir des règles de procédure différentes selon les faits, les situations et les personnes auxquelles elles s’appliquent, mais à la condition que « ces différences ne procèdent pas de distinctions injustifiées et que soient assurées aux justiciables des garanties égales ». 

Elle constate à ce titre que « les personnes jugées devant une cour criminelle départementale sont, eu égard à la nature des faits qui leur sont reprochés et aux circonstances exigées pour leur renvoi devant cette juridiction, dans une situation différente de celle des personnes jugées devant une cour d’assises ». Avec ces critères, le Conseil constitutionnel estime que « le législateur n’a pas instauré de discriminations injustifiées entre ces personnes ».

Des règles de majorité différentes mais justifiées

Un autre problème soulevé par ces QPC concernait la différence dans les règles de majorité. Les accusés jugés devant une cour criminelle départementale seraient, selon les auteurs des questions, défavorisés par rapport aux accusés jugés devant une cour d’assises. « Si les accusés ne sont pas soumis aux mêmes règles de majorité selon qu’ils comparaissent devant une cour d’assises ou devant une cour criminelle départementale, cette différence de traitement est justifiée par une différence de situation tenant à la composition respective de ces deux juridictions », estime le Conseil constitutionnel, qui assure également que « les règles applicables devant la cour criminelle départementales sont identiques à celles applicables devant la cour d’assises », mais aussi que ces deux types de cours présentent « par [leur] composition, les mêmes garanties d’indépendance et d’impartialité ».

Dans un tweet, Éric Dupond-Moretti s’est félicité de cette décision, un « jour important pour les victimes », selon lui. « Je le répète, ce n’est pas la mort de la cour d’assises que j’ai renforcée en redonnant toute sa souveraineté au jury populaire », a-t-il assuré.

Benjamin Fiorini, maître de conférences en droit privé et sciences criminelles à l’université Paris 8 et fondateur de site Internet Sauvons les assises, a lui déploré « un raisonnement qui est une insulte à notre histoire judiciaire et à la logique juridique », annonçant une suite de son combat « sur le terrain politique cette fois ».

Alexis Duvauchelle

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