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Un ministère dédié à la cause animale va-t-il voir le jour ?

Un ministère dédié à la cause animale va-t-il voir le jour ?
Publié le 03/01/2025 à 12:13

Restées lettre morte auprès des anciens gouvernements, les demandes de création d’un ministère de la Condition animale par plusieurs associations de protection animale ont de nouveau afflué dans les jours suivant la nomination du nouveau Premier ministre.

Mis à jour le 9 janvier

La demande ne date pas d’hier, mais n’a pourtant toujours pas trouvé d’écho auprès du gouvernement français.

C’est pourquoi quelques jours à peine après la nomination du nouveau Premier ministre François Bayrou le 13 décembre dernier, plusieurs organisations de protection animale ont, en groupe ou de manière indépendante, réitéré leur souhait de voir un ministère dédié à la Condition animale enfin créé.

Une demande que 21 ONG, dont Convergence Animaux Politique (CAP), Code animal ou encore la Fondation Droit Animal, Éthique et Sciences (LFDA) ont formulé dans un courrier commun adressé au Premier ministre le 16 décembre dernier, sollicitant dans le même temps une audience. Le 19 décembre suivant, l’association La ligue des animaux (LLDA) envoyait elle aussi un courrier similaire, rappelant « l’urgente » et « évidente » nécessité de créer un tel ministère et l’importance de la cause animale pour près de 70 % des Français (selon un sondage IFOP de 2023). 82 % des Français se disent même favorables à la création d’un tel ministère. « Face à l’urgence, un engagement politique fort est indispensable. Les animaux ne peuvent plus attendre ! » est-il ainsi martelé par le président de la LLDA Enzo Ridel.

Le Parti animaliste n’a quant à lui pas attendu la nomination du nouveau Premier ministre pour interpeller le chef de l’État et réclamer une nouvelle fois la création d’un ministère de la Condition animale après l’annonce de la démission du précédent gouvernement.

S’inspirer des voisins européens

Car si la condition animale est aujourd’hui traitée par différents ministères tels que celui l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire pour les sujets relatifs à l’élevage, ou celui de la Transition écologique en ce qui concerne la faune sauvage libre et captive, « l’État agit sur ces dossiers sans coordination et sans traiter la question animale de manière transversale. Si un ministre de la Condition animale était nommé dans votre gouvernement, il aurait une compétence étendue pour traiter de tous ces sujets de manière autonome et indépendante » est-il indiqué dans le courrier collectif. « Le bien-être animal est bel et bien à la croisée d’autres enjeux » nous explique Enzo Ridel.

Des propos qui font écho à ceux déjà formulés en 2021 par l’association le Mouvement des animaux dans un programme de 40 pages, dans lequel était réclamée la création d’un ministère dédié à la Condition animale plutôt qu’un Secrétariat dépendant du ministère de l’Agriculture, « compte tenu des très nombreux domaines où les animaux sont directement concernés ». Un ministère de la Condition animale pourrait ainsi être « l’interlocuteur direct des autres ministères concernés par les animaux », et traiter la question de la souffrance animale, notamment dans les abattoirs, pour l’habillement et dans les laboratoires où ils font l’objet de tests, dans son ensemble.

Pour le président de la LLDA, cette création serait un moyen « d’encadrer les pratiques liées aux animaux, d’assurer leur bien-être et de coordonner les actions en matière de lutte contre la maltraitance animale ». D’une pierre deux coups, cette création permettrait également de « renforcer la place de la France parmi les pays engagés ».

Comme le rappellent les 21 ONG signataires du courrier du 16 décembre, les gouvernements allemand et belge ont pour leur part franchi le pas et disposent respectivement d’une commissaire fédérale au bien-être animal depuis 2023, et d’un ministère dédié depuis plusieurs années déjà. La Commission européenne s’est quant à elle dotée d’un Commissaire européen à la Santé et au Bien-être animal pas plus tard que le 17 septembre dernier, qui témoigne de « l’importance croissante du bien-être animal au sein des politiques européennes » pointait la LFDA à cette occasion. Ce commissaire aura notamment pour tâche celle de réviser la législation sur le bien-être animal d’ici 2026.

1,8 million d’animaux utilisés à des fins scientifiques

Chaque année, environ 1 000 taureaux sont mis à mort lors de spectacles tauromachiques en France. Une source de « souffrance inacceptable » soutenue par moins de 20 % des Français, rappelle la LLDA dans son courrier. 100 000 animaux de compagnie sont abandonnés dans ce même laps de temps, phénomène accentué par les ventes en salons qui encouragent des « adoptions impulsives et surcharge les refuges » en grande difficulté, ne pouvant plus accueillir d’animaux faute de place mais également de moyens.

Du côté des laboratoires, si le nombre d’animaux utilisés à des fins scientifiques diminue d’année en année en France, notre pays est actuellement le plus gros utilisateur européen d’animaux dans des procédures expérimentales : en 2022, l’Hexagone a ainsi eu recours à plus d’1,8 million de bêtes, selon les chiffres de la Commission européenne. La France est également responsable de près d’un tiers des cas d’expérimentation associées à une douleur sévère.

Par ailleurs, 80 millions de poulets sont tous les ans enfermés dans des hangars où ils ne voient jamais la lumière du jour, et autant de canetons naissent pour le foie gras, rapportait le Mouvement pour les animaux dans son programme. Un ministère dédié pourrait donc, à défaut d’interdire ces pratiques, les réguler et offrir à ces animaux des conditions de vie et une fin de vie plus décente, de même pour les 5 millions de bovins, 25 millions de porcs et 850 millions de volailles. En Île-de-France, 100 % des bêtes sont égorgées sans étourdissement préalable, souligne pour sa part la Fédération Française de Protection Animale.

Les associations peu optimistes quant à une réponse favorable du gouvernement

Mais alors que le budget 2025 n’a pas encore été voté, et avec un ministère de la Famille et de la petite enfance dépourvu de représentant, la priorité a semble-t-il peu de chances d’être donnée à la cause animale dans les jours à venir.

C’est en tout cas ce que nous confirme l’association Convergence Animaux Politique qui porte la demande de création d’un ministère dédié depuis 2017. Au-delà des délais de réponse de Matignon qui « ne mettent en général pas moins d’un mois à nous parvenir », à l’instar de celle de Michel Barnier faisant suite à la demande de l’association, cette dernière ne se fait pas « d’illusion » : « nous pensons en effet que notre demande ne recevra pas de suite favorable, cependant, c'est notre rôle de faire pression sur le gouvernement pour qu'il entende les demandes des ONG ». En cause selon elle, probablement un « manque de considération envers les enjeux liés à l'amélioration de la condition animale » estiment-elles.

Pour le président de la LLDA, cette absence de reconnaissance de la condition animale réside dans une priorité mise ailleurs : « Les activités humaines – et non pas leurs impacts – sont les sujets qui ont été adressés en priorité par les Gouvernement successifs de ces dix dernières années dans des visions court-termismes (…) Répondre à l'impérativité des crises sociales et économiques entraine inévitablement la mise en place de mesures politiques d'urgence. Celles-ci ne doivent pas pour autant être des freins à la réduction de nos impacts et à l'amélioration des conditions de vie de tous les êtres vivants » abonde-t-il.

À l’instar de l’association CAP, Enzo Ridel n’a à ce-jour pas obtenu de réponse à ses demandes qui sont à chaque changement de gouvernement transmises de nouveau « sans qu’elles soient retenues ». Le président doute également, « compte tenu de la crise politique actuelle qui traverse la France, et de sa gestion », que cette nouvelle demande soit prise en compte. « Elle serait pourtant un signal positif et un symbole rassembleur autour d'une cause commune pour le progrès de notre société » nous confie-t-il. « Nous espérons qu'un jour les animaux seront représentés au sein du gouvernement avec un ministère dédié afin qu'il ne soit plus sous la tutelle de celui de l'Agriculture. » L’espoir est permis.

Allison Vaslin

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