DROIT

Le Conseil constitutionnel devra se prononcer sur les cours criminelles départementales, juge la Cour de cassation

Le Conseil constitutionnel devra se prononcer sur les cours criminelles départementales, juge la Cour de cassation
Publié le 21/09/2023 à 14:13

La plus haute juridiction de l’ordre judiciaire a notamment considéré que le Conseil n’avait encore jamais eu l’occasion de juger de la constitutionnalité de ces cours pour justifier la transmission de quatre QPC en la matière.

Le Conseil constitutionnel devra trancher. La Cour de cassation lui a transmis, mercredi 20 septembre, huit questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) au sujet des cours criminelles départementales. Quatre d'entre elles avaient auparavant été analysées par une cour criminelle départementale de Lyon dans une autre affaire.

Ces cours, initiées par le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti, sont censées récupérer une partie des affaires jugées par les cours d’assises, à la différence desquelles elles ne font pas intervenir de jurés populaires, étant composées uniquement de cinq magistrats. Généralisées début 2023, elles visent à raccourcir les délais de jugement, mais aussi à réaliser des économies et à éviter la correctionnalisation des viols. 

Dans une brève, la Cour de cassation assure, pour justifier leur transmission, que les QPC en question invoquent la violation d’un principe constitutionnel selon lequel le jugement des affaires criminelles devrait faire intervenir des jurés. « Or, cette question est nouvelle, le Conseil constitutionnel n’ayant encore jamais eu l’occasion de dire si un tel principe constitutionnel existe ou non », estime la juridiction.

La Cour de cassation considère également que ces QPC permettaient d’interroger la différence de traitement entre les accusés en fonction de la cour qui les juge (cours criminelle départementale ou cour d'assises). « Les règles concernant la détermination de la majorité nécessaire pour prononcer un verdict de culpabilité ou la peine maximale encourue sont différentes selon que les accusés sont jugés par une juridiction comprenant ou non des jurés », poursuit la chambre criminelle de la Cour.

Dans un texte publié en juin dernier sur Lexbase, Benjamin Fiorini, maître de conférences en droit privé et sciences criminelles et auteur de propositions de QPC à ce sujet, avait également dénoncé cette différence de traitement qui selon lui « pose un problème constitutionnel sérieux, puisque selon la juridiction criminelle devant laquelle les accusés sont poursuivis, la proportion de juges à convaincre pour obtenir un acquittement est plus ou moins forte ».

Le barreau de Paris et le Conseil national des barreaux en appui

Réuni en séance le 12 septembre, le conseil de l’Ordre du barreau de Paris avait décidé d’intervenir au soutien de ces QPC. En fin d’année dernière, ce même barreau avait déploré que la généralisation des cours criminelles départementales avait été décidée « avant la remise du rapport du comité d’évaluation de suivi de la cour criminelle départementale du mois d’octobre 2022, et ce en dépit des alertes du Conseil national des barreaux », affirmant dans le même temps que ce comité n’avait pas pu vérifier les éventuelles économies engendrées par ces cours.

Le Conseil national des barreaux s’était lui aussi prononcé contre cette généralisation, « constatant que les objectifs initiaux de la réforme introduite par la loi de programmation de la justice du 23 mars 2019 n’ont, en réalité, pas été atteints à l’issue de la période d’expérimentation ». Il avait aussi annoncé s’associer « à tout projet ou proposition de loi tendant à préserver le jury populaire en cour d’assises ».

Alexis Duvauchelle

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