Les conséquences de la crise sanitaire
pourraient frapper bien plus durement les TPE, moins au fait des dispositifs de
soutien aux entreprises en difficulté et pour qui le droit actuel est moins
adapté, s’inquiète le CIP national, qui appelle à un débat public sur le sujet.
D’après la plupart des observateurs économiques, les
mesures de soutien aux entreprises n’empêcheront pas une augmentation des
faillites d’entreprises d’ici à 2021, et cela d’autant plus que nombre de
secteurs étaient déjà en difficulté à la suite des mouvements des gilets jaunes
puis de grève de l’hiver 2020.
C’est dans ce contexte de tension économique que le CIP
(Centre d’information sur la prévention des difficultés des entreprises)
national et le réseau des CIP territoriaux appellent à un « plan Marshall » pour « accompagner la reprise économique des
entreprises, artisans, commerçants, professions libérales ». Le
réseau, témoin du parcours des entreprises dans la tourmente, et en particulier
des TPE, depuis plus de 20 ans, souhaite engager un « débat national » sur ces
questions :
• que signifie pour une entreprise être « en
difficulté » dans la crise majeure que nous traversons ?
• ne faudrait-il pas adapter le droit des entreprises en
difficulté à la situation ?
• ne faudrait-il pas créer un droit spécifique aux
TPE ?
• est-il possible et souhaitable de transformer les PGE
(Prêts garantis par l’État) en quasi fonds propres ?
• qui doit tenir le rôle « d’actionnaires
dormants » pour ces entreprises ?
Selon le CIP, l’environnement actuel serait
particulièrement défavorable pour les TPE, qui note également un « manque de culture de la prévention, à
commencer par les autodiagnostics », et suggère de s’appuyer sur son
réseau : « Tous les
entrepreneurs en difficulté qui auraient besoin d’être écoutés et orientés vers
les dispositifs adaptés pourraient être dirigés vers les CIP », qui
sont en lien régulier avec les services de l’État, les branches
professionnelles, les associations du Rebond et celles de soutien
psychologique, au niveau national comme territorial.
Avec la volonté de mener un plan d’action global pour la
prévention, le CIP national souhaite la rédaction d’un « texte » des pouvoirs publics qui
adresserait systématiquement aux CIP les entreprises « détectées par les greffes, ou grâce aux
“signaux faibles”, ou encore en réelle difficulté ».
Pour un dispositif dédié aux TPE
Par ailleurs, le CIP fait le constat que l’embauche d’un
salarié permettrait à beaucoup d’entreprises de se développer, mais que
celles-ci ne franchissent pas le cap par crainte des charges et des lourdeurs
administratives.
Les TPE pourraient bénéficier des procédures de
prévention (mandat ad hoc et
conciliation), qui fonctionnent bien pour les entreprises plus importantes. Le
CIP propose ainsi que soit faite une communication large sur les dispositifs de
prévention, les procédures amiables et la sauvegarde, à destination des
entrepreneurs et suggère de concevoir un droit des entreprises en difficulté
particulier aux petites entreprises, dans la lignée de ce que certains
professeurs de droit proposent.
Entretemps, des mesures d’urgences s’imposent, selon le
CIP :
• rétablissement d’un plafonnement des charges
sociales ;
• incitations significatives à l’embauche d’un salarié,
apprenti ou non, du type exonération de charges patronales la première
année ;
• incitation des responsables de la commande publique à
pratiquer l’allotissement ;
• adaptation du mandat ad hoc ;
• autoriser les petites cessions par le président du
tribunal sous contrôle du ministère public.
Le CIP National propose de :
• Soumettre l’adoption des
plans à une négociation préalable
Cette négociation n’est pas
aisée et l’Ordonnance du 20 mai 2020 impose un accord exprès pour un
abandon de créance. Le CIP suggère de faciliter les abandons de créances de
l’État et de permettre l’abandon « tacite » pour les autres créances.
• Faciliter l’obtention de
délais judiciaires
L’article 2 de
l’Ordonnance du 20 mai 2020 permet au président du tribunal d’interrompre
ou d’interdire toute action en justice d’un créancier refusant de suspendre
l’exigibilité de sa créance pendant la durée de la procédure de conciliation et
de reporter ou d’échelonner le paiement des sommes dues. Cet article lui permet
aussi d’appliquer l’article 1343-5 du Code civil avant toute mise en demeure.
Le CIP considère que cette modification correspondant à l’esprit de la
Directive européenne, dont la transposition est à l’étude, mériterait d’être
conservée.
• Renforcer le dispositif
pour éviter la dégradation des cotations par les assureurs crédit
Le CIP note et approuve
l’initiative prise par l’État d’apporter sa garantie à la Caisse centrale de
réassurance mais constate que le dispositif est moins généreux que celui mis en
place en Allemagne et considère qu’il s’agit d’un point de vigilance.
• Doter les entreprises de
fonds propres
Le CIP observe que
400 000 PGE ont été signés en France et que leurs remboursements
risquent de poser problème. Les taux au-delà d’un an ne sont pas encore connus
mais il est déjà acquis que beaucoup d’entreprises auront des difficultés à
rembourser. Le CIP estime que l’État pourrait devenir un « actionnaire
dormant ». Par ailleurs, des moyens pourraient être mis en œuvre pour que
les investisseurs potentiels (banques, assureurs, fonds d’investissement…)
puissent s’engager rapidement dans les entreprises endettées.
• Élargir les compétences
des tribunaux de commerce
Le CIP propose de créer des
tribunaux ayant vocation à juger des contentieux et des difficultés de toutes
entités ayant une activité économique, ce qui permettrait un regroupement
efficace avec des greffes performants.
• Rendre obligatoire la
continuation des contrats financiers en cours
Dès l’ouverture de la
procédure (sauvegarde et redressement judiciaire). Il s’agit de contrats vitaux
qui préexistaient à la procédure tels que découverts, Dailly, escompte, crédit
revolving, etc.
• Prévoir une année blanche
en termes de donations « exceptionnelles Covid »
Le CIP propose d’autoriser
cette solidarité intergénérationnelle exceptionnelle non fiscalisée et
n’entrant pas dans l’agenda fiscal usuel des familles.